Jan Garbarek

Dernière mise à jour : 08/01/2025

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C’est d'un excellent musicien, cependant controversé dans le milieu du jazz, qu'il va être question ici : Jan Garbarek, saxophoniste (ténor et soprano) de jazz norvégien né en 1947.

Il commence à enregistrer au début des années 70 pour le label allemand ECM, basé à Münich, mais dont le célèbre studio d'enregistrement se situe à Oslo. Il fait alors partie de l'avant garde scandinave aux côtés notamment du pianiste Bobo Stenson, du guitariste Terje Rypdal, des batteurs Edward Vesala et Jon Christensen, du bassiste Arild Andersen... Sa carrière prend un tournant décisif quand il rencontre Keith Jarrett, qui l'intègre dans son quartet dit « européen », avec Jon Christensen et Palle Danielsson. Cette expérience lui permettra d'obtenir une reconnaissance internationale et de mener une carrière en leader très suivie et appréciée bien au delà des frontières de la Norvège.

Jan Garbarek multiplie ensuite les collaborations avec des musiciens de jazz de renommée internationale comme John Taylor, John Abercrombie, Bill Frisell, Miroslav Vitous, Ralph Towner, Bill Connors... avec lesquels il développe une esthétique très particulière. Loin des fureurs électriques et virtuoses de l'époque, ses formations (essentiellement en quartet) produisent une sonorité légère et aérée, très axée sur la mélodie, le silence et la respiration. Ce côté aérien est renforcé par un son de saxophone caractéristique, notamment obtenu par un fort effet de réverbération, au ténor comme au soprano, ses instruments de prédilection. Son jeu « éthéré » vaudra parfois à sa musique le qualificatif (un peu méprisant) de "New Age Music".

À partir de la fin des années 1980, il forme un groupe régulier avec Rainer Brüninghaus, Eberhard Weber, Manu Katché et Marylin Mazur, communément appelé le Jan Garbarek Group. Il se tourne également vers les musiques du monde. Il rencontre notamment Anouar Brahem, Zakir Hussain, Mari Boine, Ustad Fateh Ali Khan.

En 1993, il collabore avec l'Ensemble Hilliard spécialisé dans le chant grégorien pour créer l'album Officium qui remporte un succès inattendu. Expérience réitérée depuis avec l'album Mnemosyne en 1999 puis Officium Novum.

Garbarek, c'est un son clair de sax soprano ou ténor, c'est surtout une transparence, une sonorité aérienne évoquant les grands espaces, et un lyrisme contenu. Si sa sonorité n'est pas éloignée de celle de Michael Brecker, son lyrisme limpide, sorte d'équivalent boréal à l'expressionnisme torride d'un Gato Barbieri crée une musique à la fois sauvage et glacée, tendue et retenue. Il y a du feu sous sa glace !

Le modèle de Jan Garbarek est John Coltrane, dont le son le fascine. Une autre influence est celle de Dexter Gordon. Il cite également Johnny Hodges, Gene Ammons, Lester Young et Ben Webster.

Au début de sa carrière, la sonorité de Garbarek est encore relativement agressive, marquée par le free jazz et ses meneurs tels que John Coltrane, Albert Ayler, Pharoah Sanders ou Gato Barbieri. Toutefois, il développe rapidement une sonorité beaucoup plus tendre, en particulier à partir de 1971 et de l'album Sart. Le son de Garbarek est immédiatement reconnaissable, généralement décrit comme étant clair, frais, tout en étant ample et totalement maîtrisé. Il utilise un léger vibrato, ainsi qu'un fort effet de réverbération. Ses attaques sont parfois amenées avec un léger glissando, ce qui peut donner une sonorité plaintive à ses mélodies. C'est la qualité de projection du son chez Garbarek qui frappe les auditeurs, ainsi que la capacité de faire sonner le saxophone comme une véritable voix, à la fois transparente et chaleureuse.

Ce son est le reflet de la personnalité du saxophoniste, de sa morphologie et de son contrôle du souffle, mais aussi d'un long travail. Garbarek a passé de longs mois, de six à sept heures par jour, à s'entraîner uniquement à tenir des sons, et à en maîtriser la dynamique.

Influencé à ses débuts par le free jazz, il développe toutefois, dès ses premiers albums, une approche nouvelle, qui n'est ni l'héritage du free jazz historique, ni le radicalisme européen développé par les musiciens allemands et hollandais à la même époque. Là où un Peter Brötzmann tendance à remplir l'espace, Garbarek laisse au contraire de la place au silence et remet au centre la mélodie. L'influence de Don Cherry et surtout de George Russell, avec qui Garbarek a collaboré, ont aidé Garbarek dans sa remise en cause.

Les formations de Garbarek produisent une sonorité légère et aérée, très axée sur la mélodie, le silence et la respiration. Ce côté aérien est renforcé par un son de saxophone caractéristique. Le lyrisme, voire le romantisme de Garbarek est mis en avant, et est salué par les critiques sur ses disques des années 1970. Garbarek ne joue jamais de standards; Il dira même que « les standards du jazz ne sont pas [s]es standards ». Il préfère des compositions personnelles ou des chansons traditionnelles. Le style obtenu s'éloigne du jazz américain, plus marqué par le ryhtme, le swing et le blues, mais se rapproche d'une sensibilité plus européenne.

C'est aussi un pionnier de l'ambient, notamment avec l'album Dis. L'album sera abondamment réutilisé comme musique d'illustration par la télévision, le cinéma et les documentaires télévisés. ll est difficile de catégoriser le travail de Garbarek, en particulier ses collaborations avec des musiciens classiques, qui ne sont vues ni comme du classique, ni comme du jazz. Garbarek estime que ces questions de genres ne sont pas de son ressort, même si la visibilité de son travail peut pâtir du fait qu'il ne tombe dans aucune catégorie. Un album comme Aftenland, duo d'improvisations orgue-saxophone, n'a jamais été critiqué par les journaux et magazines norvégiens car inclassable.

Les avis des critiques et des amateurs sur Jan Garbarek sont très partagés. Il est décrit comme fascinant pour les uns, horripilant pour les autres.

Son travail des années 1970est généralement très bien perçu, notamment parce qu'il apporte une véritable nouvelle direction au jazz de l'époque. Afric Pepperbird (1970), Sart (1971) sont particulièrement appréciés, autant par les critiques européens qu'américains (Jazz Magazine, Down Beat, Melody Maker, Jazznytt, etc.) Le jeu de Garbarek lui-même est trouvé très convaincant, et il se voit même qualifié de musicien le plus intéressant et original venant d'Europe par le magazine américain Down Beat.

Toutefois, dès l'album Dis (1976), certains critiques expriment leur incompréhension, voir leur agacement face aux climats développés par Garbarek, et ce qui peut être perçu comme une « musique d'atmosphère ». Les critiques portent essentiellement sur le fait de chercher à créer des climats exotiques, des ambiances, et accusent Garbarek de « favoriser la manière sur la matière ». Ces critiques sont en général aussi reliées à l'esthétique de la maison de disques ECM, qui produit Garbarek, accusée de favoriser des climats lénifiants, sans prise de risque, et produire de ce fait des disques aseptisés et monotones. Ces critiques sont récurrentes sur les albums de Garbarek, et s'exprimeront également pour Aftenland (1979), Paths, Prints (1982), Wayfarer (1983), ou It's OK to Listen to the Gray Voice (1985). Ces opinions ne sont pas partagées par de nombreux critiques, qui voient au contraire beaucoup de sensibilité, de sensualité dans l'approche de Garbarek, dont le son exerce une certaine fascination. Le sens de la respiration et de la mélodie est également apprécié. De fortes critiques s'expriment aussi envers le Jan Garbarek Group des années 1990, où Garbarek est accusé de s'y auto-caricaturer.

Un album particulièrement critiqué est Officium, réalisé en collaboration avec le Hilliard Ensemble, ainsi que sa suite Mnemosyne. Les critiques viennent autant du milieu de la musique classique que du jazz, et accusent le disque de flirter avec le new age ou le kitsch. Paradoxalement ou non, cet album est la meilleure vente de Garbarek, et l'une des meilleures ventes du label ECM.

Certains albums de Garbarek remportent cependant une adhésion très large. C'est le cas de ses coopérations avec des musiciens world, par exemple avec Anouar Brahem sur Madar et Zakir Hussain sur Making Music. Son seul album enregistré en live en tant que leader, Dresden, beaucoup plus proche du jazz, a également rencontré un écho très positif chez une grande majorité de critiques.


ESOTERIC CIRCLE (1969)

Freedom FR 11010 (FLP 41031)

Les débuts discographiques de Jan Garbarek. Si sa personnalité s’affirmera par la suite (on sent ici les influences de Gato Barbieri, Albert Ayler et Sonny Rollins), on peut déjà percevoir les belles qualités du saxophoniste : sens mélodique, sonorité…

AFRIC PEPPERBIRD (1970)

ECM 1007

afric

C'est le premier album de Garbarek pour le label ECM.

C'est un album encore très marqué par le free jazz, avec beaucoup d'énergie, et de techniques bruitistes au saxophone et à la guitare. Garbarek joue ici du saxophone ténor, saxophone basse, clarinette, flûtes et percussions.

L'album se termine par un titre humoristique de Jon Christensen, où le batteur vocalise des « Blupp », ponctués de quelques coups de toms.

Ce disque éveille fortement l'intérêt des critiques, à la fois en Norvège comme à l'international. Le critique Gérard Noel dans Jazz Hot souligne les qualités rythmiques de l'album, tandis que tous les critiques s'accordent sur la qualité du son : clair frais, transparent. Le critique insiste également sur le son de Jan Garbarek, à la fois transparent et plein, évoquant le meilleur de Pharoah Sanders.

SART (1971)

ECM 1015

sart

Excellent disque, entre romantisme éthéré et expressionnisme dru.

La critique AllMusic de Brian Olewnick attribue à l'album 4 étoiles et déclare : « Un enregistrement solide et, avec toutes les autres premières sorties d'ECM Garbarek, recommandé aux fans qui l'ont découvert beaucoup plus tard dans sa carrière. »

TRIPTYCON (1972)

ECM 1029

triptycon

Jan Garbarek pas encore dégagé de ses influences free (notamment Albert Ayler).

L'historien du jazz et journaliste de Jazzwise, Stuart Nicholson, désigne Triptykon comme l'un des cinq enregistrements essentiels de Garbarek, notant qu'il présentait une « tournure radicale » dans son style musical.

Dans la même veine, la revue AllMusic de Brian Olewnick déclare : « Le saxophoniste norvégien Jan Garbarek a pris plusieurs virages stylistiques intrigants au début de sa carrière, aucun plus extrême que celui montré sur Triptykon... Un trio expressionniste s'appuyant à la fois sur l'improvisation libre et le folk scandinave, rugissant, trébuchant et chancelant, évoquant un équivalent sonore d'Edvard Munch. Le travail de Garbarek sur toutes les anches est assuré et imaginatif, même si le contexte est souvent sombre et lugubre.... Fortement recommandé.

JAN GARBAREK/ART LANDE : RED LANTA (1973)

ECM 1038

red

Les compositions d'Art Lande mettant ici à l’épreuve un Garbarek flûtiste, ahurissant de justesse dans la mise en place de longues mélodies aux envolées vertigineuses à la fin desquelles les musiciens se retrouvent au rendez-vous fixé par l’écriture. Garbarek s’y montre léger et subtil, le saxo basse gronde. le soprano chante avec le même bonheur que dans le disque en quartet. Entre jazz et classique, belle musique introspective.
Peut-être reprochera-t-on à ce joli disque une certaine froideur...

WITCHI-TAI-TO (1973)

ECM 833 330-2

witchi

Partie intégrante du Bobo Stenson Quartet, Jan Garbarek réalise avec Witchi-Tai-To, enregistré fin 1973 pour le label de Manfred Eicher, un des plus mémorables albums de jazz de la décennie.

Bobo Stenson, le pianiste, n'a rien à envier à un Keith Jarrett au meilleur de sa forme, au meilleur de son inspiration, de son agilité. Son jeu, complètement Jarrettien, rivalise avec celui du maître. Il est mélancolique, lyrique, puis léger et sautillant sur « Witchi-Tai-To », sensible et perdu dans ses pensées sur « Kukka », dansant sur « A.I.R. », cristallin, aérien, fluide, lumineux comme celui d'une harpe céleste, puis se fait maelström qui emporte tout sur « Desireless ».

Sur ce morceau fleuve de vingt minutes « Desireless » justement, les notes de Stenson s'envolent, son piano semble échapper à toute notion de gravité alors que Garbarek introduit un fabuleux thème mélodique, soutenu par les percussions, tellement puissant et ensuite si délicat, qui s'invitera également en fin de morceau, pour clore le trio. « Desireless » s'avère être une composition imposante et dont pourtant chaque seconde n'est que délectation. Rarement vingt minutes paraîtront aussi courtes, et rarement morceau n'entraînera l'auditeur avec tant de facilité; Celui-ci est littéralement happé par ces notes qui déferlent de la main droite de Stenson, une main qui semble vivre sa propre vie, complètement détachée, en apesanteur, et en même temps si incroyablement énergique. Stenson nous scotche et nous emporte avec lui, en transe.

Et Garbarek n'est pas en reste, son long solo de saxophone ténor, en partie inspiré par John Coltrane, s'engouffrant dans des humeurs tour à tour excitées et aériennes, ce n'est plus un saxophone mais un insecte mécanique qui s'envole vers l'horizon, fait vibrer l'air et se voit être poussé dans ses derniers retranchements, on frôle souvent le point de rupture !

Au soprano, il se fait exotique et dansant sur « A.I.R. ». On décèle les prémisses de la passion de Garbarek pour les musiques du monde. Le très connu « Hasta Siempre » évoquera évidemment Gato Barbieri.

Jan Garbarek, qui s'était un peu contraint à jouer une musique linéaire avec Art Lande, donne ici plus libre cours à son lyrisme qui, quoique contrôlé, est assez coltranien et même barbierien. Dans des compositions moins “ planantes ” qu’à son ordinaire - des thèmes signés entre autres par Carla Bley, Don Cherry et Jim Pepper, le jeu de Garbarek est plus intense que dans ses disques précédents (voir en particulier Desireless).
C'est probablement le disque où il "se lâche" le plus. Sa sonorité au soprano étonne : proche du hautbois, mais aussi d'instruments folkloriques plus simples  Bobo Stenson se montre, en adepte de McCoy Tyner et de Jarrett, un accompagnateur attentif. L’accompagnement racé qu’il délivre avec Palle Danielsson et Jon Christensen est en tout point digne d'éloges.

Witchi-Tai-To, est considéré par certains critiques comme l'un des deux meilleurs albums jamais sortis par ECM, avec Conference of the Birds de Dave Holland, et l'un des meilleurs albums de jazz des années 1970.

DANSERE (1975)

ECM 1075 / 829 193-2

dansere

Après le magnifique Witchi-Tai-To, Jan Garbarek et le Bobo Stenson Quartet changent radicalement d'humeur. Ici place aux atmosphères soucieuses de poésie et d'images raffinées, inspirées notamment par la culture et les origines nordiques du quartet. Plus feutré, plus intimiste, moins mélodique, Dansere est également encore plus représentatif de la signature sonore du label ECM, cristalline et spatiale.

A peu près à cette époque sortait également Belonging avec le quartet réuni cette fois-ci sous l'égide de Keith Jarrett, et on peut faire la jonction entre les images des pochettes de ces deux albums, la pureté, la réverbération et le reflet de l'eau sur Belonging, le grand espace ouvert de Dansere. Deux directions qui se rejoignent et qui finissent par former en quelque sorte l'identité sonore du célèbre label de Manfred Eicher.

Une autre particularité de ce Dansere tient au fait que les compositions permettent une grande lisibilité des instruments. Lorsqu'un instrument est mis en avant, les autres diminuent leur intensité, ou restent en retrait, afin de lui permettre d'occuper un maximum d'espace, se rapprochant par là également d'un ensemble de chambre. On peut d'ailleurs noter que si Witchi-Tai-To était co-dirigé par Stenson et Garbarek, Dansere correspondrait plutôt à l'idée d'un Jan Garbarek Quartet, tellement celui-ci a pris l'ascendant sur le piano de Bobo Stenson.

On découvrira sur ce Dansere les influences folk des origines nordiques du quartet, plus particulièrement évidentes sur "Skrik & Hyl".

Cet album court (moins de quarante minutes), s'avère être moins évident et accessible que Witchi-Tai-To mais n'en demeure pas moins un excellent album, dans un style qui se situe entre Sonny Rollins, John Coltrane et Gato Barbieri avec un lyrisme prestigieusement maîtrisé et un son d'une belle densité.

DIS (1976)

ECM 1093

dis

Un disque assez surprenant, avec dans trois morceaux une harpe éolienne. Jan Garbarek, accompagné par la guitare classique et 12 cordes de Ralph Towner, délivre une belle musique dépouillée et inquiétante.

La pochette de l'album est une photographie de Franco Fontana, représentant une plage, la mer et le ciel, mais l'image est quasi monochrome, avec une couleur très pâle.

La harpe éolienne dont joue Ralph Towner a été construite par le Norvégien Sverne Larssen, selon ses propres expérimentations et intuitions. L'album comprend également des enregistrements de vent, qui ont été enregistrés par l'ingénieur du son Jan Erik Kongshaug sur la côte sud de la Norvège. L'endroit est particulièrement propice à cause de la présence de vent en continu, en provenance de la mer du Nord

Dis est la seconde collaboration entre Ralph Towner et Jan Garbarek, qui ont enregistré en quartet avec Eberhard Weber et Jon Christensen l'album Solstice en 1974. Dis est très différent de cette première collaboration, et est selon Garbarek, le début d'un nouvel axe de travail, où Garbarek est peu directif et laisse beaucoup d'espace à l'improvisation.

À l'époque de l'enregistrement de Dis, Garbarek s'intéresse aux haiku, et est depuis longtemps attentif aux sonorités de la flûte japonaise shakuhachi, ainsi qu'au travail du compositeur japonais Toru Takemitsu.

Outre cette possible influence japonaise, c'est essentiellement une influence nordique qui est évoquée dans l'album.

PLACES (1977)

ECM 1118


Places est un album sombre, composé de quatre titres. Musique d’une sereine beauté à l’angoisse sous-jacente mais riche aussi d’une émotion sans aucune trace de morbidité : musique ambiguë, énigmatique. Climats parfois livides, éclairés par la sonorité superbe, implorante, intense mais froide, du saxophone.

Il n'y a pas de contrebasse sur Places, mais l'album n'en souffre pas. L’absence de basse créé un climat particulier. Trois des quatre longues compositions s'ouvrent sur l'orgue éthéré de John Taylor qui tisse de grandes nappes denses, DeJohnette, fin, subtil, découpe ses figures rythmiques avec imprévisibilité et énergie. Bill Connors assure, à mi-chemin entre Abercrombie et Towner  

Sur "Reflections", une première partie est introduite par des phrases lentes de Garbarek, accompagné de la guitare acoustique subtile de Bill Connors et les cymbales délicates de Jack DeJohnette. Soudain, le tempo s'accélère pour une deuxième partie. Taylor apporte des couleurs sur les fortes improvisations de Garbarek tandis que Connors joue un solo sur la batterie plus forte et plus vibrante de DeJohnette.
"Entering" est la piste la plus courte et la plus accessible. Garbarek joue plaintivement, avec nostalgie, sur la guitare acoustique de Connors. DeJohnette entre à mi-chemin et e morceau se termine paisiblement avec une courte coda. .

Après une belle ouverture de DeJohnette (il est ici à son meilleur) et un solo strident de Garbarek, Going Places évolue vers un tempo plus ralenti. Il y a un superbe solo de Connors et un duo batterie / orgue avant que Taylor ne passe au piano percussif pour la seule fois sur cet album.
"Passing" : Connors introduit la mélodie avant que Garbarek ne se joigne aux cadences d'orgue de Taylor. Ce morceau plus discret, presque bluesy, clôt l'album avec de beaux gémissements gutturaux de Garbarek.

Places n’est pas un classique révolutionnaire comme Witchi-Tai-To, ou un album ouvertement expérimental comme Dis ou All These Born With Wings.

JAN GARBAREK/ KJELL JOHNSEN : AFTENLAND (1979)

ECM 1169 (Phonogram)

aftenland

Ce duo avec l'organiste classique Kjell Johnsen, interprète très respecté de la musique d'orgue d'égliseest assez particuler.

Un chant funèbre, lourd et sombre, qui s’étire pendant trois-quarts d'heure sur un tempo languissant et presque morbide. Les montées déchirantes du saxophone dans le suraigu, son souffle glacial apparaissent par moments un peu comme des clichés, bien que, par moments, le rapport entre les deux musiciens atteigne une réelle intensité, et la sonorité du saxophone est alors envoûtante et mystérieuse, moins agressive que de coutume.

Aftenland (qui se traduit par « pays du soir ») évoquera par moments Messiaen, ou Milhaud peut-être, avec quelques notes de jazz.

Certains commentateurs ont comparé cette musique à de la poésie, tant les improvisations de Garbarek sont profondes,En tout cas elle réclame de l'auditeur une extrême concentration. A l’ère du numérique, consommer cette musique d'une façon distraite via un smartphone ou un iPod serait passer à côté de l’intérêt de cette œuvre.

PHOTO WITH BLUE SKY WHITE CLOUD... (1978)

ECM 1135 (Phonogram)

photo

Enregistré en décembre 1978 au Talent Studio d'Oslo, ce disque regroupe Jan Garbarek au saxophone ténor et soprano, Bill Connors à la guitare, John Taylor au piano, Eberhard Weber à la contrebasse, et Jon Christensen à la batterie.

Le style de Garbarek porte encore des traces d'une influence de Coltrane, mais il reflète de plus en plus la beauté claire et austère de sa patrie montagneuse.

Au cours des huit années écoulées entre Afric Pepperbird et l'enregistrement de Photo With…, le saxophoniste a étudié la musique folklorique norvégienne. Mais l'explique Garbarek, ses études ont plutôt servi à confirmer son approche musicale qu'à la changer : « De toute façon, j'ai trouvé ce vers quoi je m'orientais en jouant – quelque chose de direct, très « fort » d'une certaine manière, mais avec un son flottant, un sentiment de lointain ainsi qu'un sentiment de proximité. »
Le fait qu'il ne s'agissait pas là d'une direction exclusivement nordique a été prouvé par la réaction que la musique de Garbarek a suscitée chez les auditeurs et les musiciens du monde entier. "On pourrait dire", fera remarquer plus tard Jan, "que je vis dans un quartier spirituel dispersé géographiquement à travers le monde."

Rien de très excitant, mais un disque de qualité.

EVENTYR (1980)

eventyr

Paru en 1980, Eventyr ("conte" en norvégien) est un disque en trio avec John Abercrombie aux guitares et Naná Vasconcelos aux percussions. Jan Garbarek s'est inspiré de mélodies traditionnelles norvégiennes, en allant visiter les collections musicales de Chateau Neuf

Selon certains critiques, Eventyr est le premier album de Garbarek où l'influence scandinave se manifeste aussi fortement et profondément, tout en étant une approche fraiche et nouvelle de l'utilisation de la musique folklorique.

Eventyr est également l'album qui voit les premières critiques du travail de Garbarek, comme étant fade et manquant de profondeur émotionnelle...

Un exemple tiré du Jazz Journal (UK) :

« En termes conceptuels, il y a peu de choses ici que ce saxophoniste au talent indéniable n’a pas exposé lors de précédents et meilleurs disques (« Dis », « Places »), et la présence d’Abercrombie et Vasconcelos a peu d’effet bénéfique sur la musique de Garbarek.

L’interminable morceau d’ouverture de l’album, Soria Maria, est la quintessence de Garbarek et illustre pourquoi un critique l’a surnommé « l’Ingmar Bergman du saxophone ». Un sentiment oppressant de morosité glaciale prédomine (...)

Ailleurs, notamment sur Lillekort et Once Upon A Time, on retrouve une plus grande sensation de fluidité et de mouvement – ​​Abercrombie livre sur ce dernier un solo fulgurant d'une grande intelligence considérable – mais "Eventyr" n'est qu'un autre album typique d'ECM, avec la façade sombre du grand art mais sans la profondeur émotionnelle qui l'accompagne.

Pour savoir de quoi ce saxophoniste est réellement capable, écoutez son travail sur l’album « Solstice » de Ralph Towner, « Deer Wan » de Kenny Wheeler ou « Othello Suite » de George Russell. »

PATHS, PRINTS (1981)

paths

Une équipe de rêve pour ce disque : Jan Garbarek, Bill Frisell, Eberhard Weber et Jon Christensen.
Cet album propose des sonorités similaires à ses œuvres précédentes, mais l'arrivée du talentueux Eberhard Weber à la basse sur cet album apporte une densité partulière au son, largement dominé par le saxophone de Garbarek domine largement la procédure.

Paths, Prints est un bon album, pas très différent de Places sorti en 1978 et contient quelques morceaux musicaux plus courts. Les points forts ici sont "Arc", le titre astucieux "Considering The Snail", le morceau d'ouverture "The Path" et le passage final "Still". Le thème de l'album parle de déplacement, de voyages et de destinations et sur ces quatre morceaux en particulier, le saxophone de Garbarek est à son meilleur.

La rencontre avec Bill Frisell et Eberhard Weber est très fructueuse. Un excellent disque.

WAYFARER (1983)

wayfarer

Wayfarer se caractérise par des paysages sonores éthérés, combinés avec la musique norvégienne. Assez proche de Paths Prints : même approche générale pour les ensembles. Le jeu de Garbarek est marqué par de longues phrases mélancoliques.

On pourra estimer que le swing en est absent, mais l'objectif de Garbarek est plutôt de créer des interactions entre couleur, sonorité et rythme.

Le guitariste Bill Frisell a fourni à Garbarek inspiration et énergie à une période cruciale de sa carrière. Selon les propres mots du saxophoniste, il s'est senti perdu lorsque Frisell a décidé de retourner aux États-Unis. Ensemble, ils ont produit une synergie créative à la fois inspirée et inspirante. Issu d’une période clé de l’évolution de Garbarek en tant qu’artiste, cet album est un classique méconnu.

IT'S OK TO LISTEN TO THE GRAY VOICE (1984)

ECM 1294

ok

Le multi-instrumentiste David Torn est principalement responsable du côté plus agressif que prend ce disque. Ses lignes de guitare explosent d'énergie et de tension, donnant à Garbarek un terrain plus décentré dans lequel jouer - et compte tenu de son penchant pour la retenue excessive, c'est un environnement bienvenu pour l'entendre.

Le morceau-titre présente Garbarek sollicitant les notes suraigues de son soprano. sax sur un lit de changements d'accords étonnants. Les points faibles de ce disque montrent que le groupe entre dans le territoire du soft rock : « Mission : To Be Where I Am » – et à plus de huit minutes, c’est un creux important dans le disque.

Mais dans l’ensemble, Garbarek se montre plus dynamique qu’il ne l’avait fait depuis un certain temps et certainement plus que ce que les auditeurs entendraient de lui pendant de nombreuses années.

Un disque manquant quelque peu de consistance et de profondeur malgré un lyrisme tour à tour tranquille et exacerbé, A noter la cohésion du groupe, avec notamment l’excellent Eberhard Weber..

ALL THOSE BORN WITH WINGS (1986)

Un album solo.
A mon avis, ce n'est pas l’un des meilleurs disques de Garbarek.

LEGEND OF THE SEVEN DREAMS (1988)

ECM 837 344-2

legend

 Legend Of The Seven Dreams ” est un disque en quartet avec Jan Garbarek au saxophone ténor et soprano, Rainer Brüninghaus aux claviers, Eberhard Weber à la contrebasse et Naná Vasconcelos aux percussions.

Enregistré pendant l’été 1988 au Rainbow Studio à Oslo, Legend of the Seven Dreams fait partie de ces albums de Jan Garbarek qui souffrent quelque peu de l’épreuve du temps. L’utilisation des synthétiseurs dessert clairement l’album (à ce titre « Voy Cantando » est symptomatique).

Garbarek a peut-être cédé un peu trop facilement à la tentation de composer des musiques très atmosphériques, ou aux structures trop compréhensibles. En écoutant Legend of the Seven Dreams on mesure le grand écart avec le jazz avant-gardiste, free et expérimental de Sart ou le superbe jazz de Witchi-Tai-To.

Paradoxalement, Legend of the Seven Dreams n’est pas non plus un mauvais album. En fait, il y a toujours quelque chose d’intéressant ou qui accroche dans un album de Garbarek. La mélodie introductive de He Comes From the North est tirée d’un joik (chant traditionnel lapon). Cette longue composition de plus de treize minutes a quelque chose d'hypnotique avec une ligne de sax est étonnamment belle.

Aichuri, the Song Man, dansant et mystique, est particulièrement réussi, avec son saxo alternant mélodies et rythmes. L'intérêt du disque diminue progressivement à partir du 3 morceau. Tongue of Secrets, Brother Wind , Send Word, et Voy Cantando, sont plus anecdotiques malgré quelques bons passages.

ROSENSFOLE - Medieval Songs From Norway (1988)

ECM 1602

rosensfole

Rosensfole est un album de collaboration entre le saxophoniste Jan Garbarek et la chanteuse Agnes Buen Garnås. Les compositions trouvent leur source dans la musique folklorique médiévale norvégienne.

Rosensfole est à vrai dire plus l'album d'Agnes Buen Garnås que de Jan Garbarek. Le saxophoniste se fait en effet très discret, il n'est ici essentiellement présent qu'au travers des synthétiseurs et des percussions (certaines reproduisent le gatham, donnant un aspect très world music à une composition comme Margjit Og Targjei Risvollo par exemple). Son instrument de prédilection, le saxophone, est malheureusement bien trop absent. Il n'y fait que de rares apparitions pour s'éclipser presque aussitôt.

Rosensfole est certes un album agréable. Toutefois, la prépondérance du synthétique donne à l'ensemble un côté new age. Margjit Og Targjei Risvollo, morceau très long (de près de seize minutes ), fait indéniablement de l'ombre aux autres compositions. Il s'agit d'un chant particulièrement joli, mais trop long avec des refrains répétés à l'envi. A côté de ce morceau fleuve, les autres compositions ou ballades, parfois courtes, ont du mal à s'imposer, d'autant plus qu'elles manquent singulièrement d'accroches, mis à part  Stolt Øli, à la mélodie fort plaisante, ou le titre éponyme Rosensfole.

I TOOK UP THE RUNES (1990)

ECM 1419 - 843 850-2

itook

Plus éclectique que ses précédents, I Took Up the Runes de Jan Garbarek est aussi moins planant et plus musclé. Le groupe s'est étoffé puisqu'il rassemble Jan Garbarek (ts/ss); Rainer Bruninghaus (p); Eberhard Weber (b); Nana Vasconcelos (pc); Manu Katché (d); Bugge Wesseltoft (syn); Ingor Antte Ailu Gaup (voc).

S'ouvrant sur une reprise jazzy de "Gula Gula" de Mari Persen, enrichie par un accompagnement de basse qui modifie la structure d'accords de l'ensemble de la mélodie, l'album présente ensuite le "Molde Canticle" composé par Garbarek pour la célébration l’été dernier du trentième anniversaire du festival de Molde en Norvège. Ce morceau en cinq parties est le cœur du disque. Sur le plan de la composition, c'est l'un des plus forts à ce jour ; tandis que d'un point de vue instrumental, l'expressivité dans les registres les plus aigus du ténor qui se révèle dans la pièce titre, par exemple, est sûrement unique. . Les sons du synthétiseur commencent à devenir moins importants. Rainer Brüninghaus au piano est excellent, ainsi que l'artiste invité Ingor Ántte Áilu Gaup.

La musique passe de moments de gravité à des passages swinguants, emmenés par la batterie de Katché et les percussions de Vasconcelos. Weber est toujours aussi imaginatif : il crée un « groove flottant » caractéristique derrière la puissance en spirale, parfois sauvage, du ténor de Garbarek sur Runes.

Dans une critique de "Keyboard", Jim Aikin décrit l'album comme une « session d'euro-jazz envoûtante et évocatrice » et identifie « Gula Gula » comme « particulièrement mémorable ».

La critique AllMusic de Mark W. B. Allender attribue à l'album 3½ étoiles et déclare : « Une sortie plus éclectique que ses versions précédentes, I Took Up the Runes de Jan Garbarek satisfait les auditeurs qui étaient plus ou moins impatients de quelque chose avec de la viande et du muscle. Un signe de bonnes choses à venir. »

"Jan Garbarek a pris les pierres runiques des anciens autochtones du grand nord européen pour sources d’inspiration. Le résultat est éclatant d’universalité : la musique est sans frontières, son passeur est norvégien, il se nomme Jan Garbarek" (André Francis).

RAGAS AND SAGAS (1990)

ragas

Ragas and Sagas est une œuvre à part dans la discographie de Garbarek. Et ça fonctionne ! On a là l'un des meilleurs disques de Jan Garbarek.

On savait le saxophoniste norvégien Jan Garbarek amoureux des musiques folkloriques nordiques et scandinaves. Sur Ragas and Sagas c'est un nouveau dépaysement qu'il nous propose ; il s'associe avec le chanteur et musicien pakistanais Ustad Fateh Ali Khan et divers musiciens du Pakistan. Cette association pourrait paraître étrange mais cela va être l'occasion pour Garbarek de réaliser un de ses plus beaux albums.

Le saxophone n'est pas un instrument habituellement associé à la musique pakistanaise. Et les Pakistanais ne sont pas particulièrement réputés pour collaborer avec les Norvégiens. Mais c’est ce que les auditeurs ont sur cet incroyable enregistrement. La musique est majoritairement pakistanaise en termes de son, de tonalité et de structure ; la voix, le sarangi et le tabla improvisent avec le saxophone de Garbarek sur chaque morceau. Contrairement à Jon Hassell, qui reproduit les techniques de chant de la musique Hindustani à la trompette, Garbarek se cale sur le chant ou l'accompagne ; et il va mêler ses influences à celles des musiciens du Pakistan qui restent prédominants. Le saxophone de Garbarek se fond admirablement dans les humeurs de chacun de ces rāgas. Les lignes de Garbarek s'inscrivent parfaitement dans les styles traditionnels d'improvisation.

« Raga 1 » est introduit par le saxophone qui dresse le paysage exotique dans lequel vont se dérouler les rāgas. Sur un lit de tablas calmes, le chant très mélodieux de Ustad Fateh Ali Khan est accompagné par le sarangi légèrement vibrato. Une composition véritablement hypnotique !
« Saga », avec Manu Katché à la batterie, est un titre qui détonne quelque peu car il s'agit d'un mélange musical plus occidentalisé avec des synthés et un chant alternant mélodie, saccades et envolées. Le saxophone est ici plus présent et signe une très belle intervention.
« Raga 2 », est une ritournelle entêtante de plus de 13 minutes avec un thème où se superposent le chant de Fateh Ali Khan, celui de la chanteuse Deepika Thathaal, le sarangi et parfois même le saxo. Garbarek y recopie parfois les saccades de Fateh Ali Khan. On y ressent vraiment l'improvisation typique de ce type de musique; et c'est même le saxo de Garbarek qui s'autorise à relancer la ritournelle vocale.
Le sarangi introduisant « Raga 3 » nous offre des belles images, profondes et mystiques, de ces contrées avec également un thème répétitif autour duquel vont tourner les instrumentistes.
« Raga 4 » est également une belle pièce où Fateh Ali Khan semble entrer en transe, son chant approchant parfois le rire; très surprenant !

STAR (Miroslav Vitous) (1991)

ECM 1444

star

Les disques se suivent et ne se ressemblent pas... Ce qui frappe ici, c'est la confrontation féconde entre l'évanescence de Garbarek, la rigueur, la sobriété, l'efficacité d'Erskine, l'épaisseur et la rondeur de Vitous, délivrant son instrument des contraintes rythmiques pour souvent doubler la voix mélodique, ou pulsant d'un swing discret une musique parfois alanguie. Garbarek fond ici sa voix dans le collectif pour un vrai disque de trio.

Les morceaux sont peut-être quelque peu interchangeables, mais la musique est virtuose, réfléchie et parfois déchirante.

Certains pourront néanmoins trouver le climat un peu monocorde, sans relief, voire sans chaleur...

MADAR (1992)

ECM 1515 / 519 075-2

madar

Après la rencontre avec Ustad Fateh Ali Khan, celle du saxophone de Garbarek avec le luth arabe d’Anouar Brahem donne lieu à un des meilleurs disques du saxophoniste : un éclatement de finesse.

Jan Garbarek, Anouar Brahem et Shaukat Hussain tissent ensemble un tapis de sons intimistes où le silence a sa place, où les fils se dénouent, se distendent puis se rejoignent de nouveau. Ces musiciens savent s'écouter et se répondre avant de s'assembler. Nulle profusion dans leur musique, mais un grand dépouillement.

Au ténor ou au soprano, Garbarek emprunte à l'Orient son lyrisme. L'oud (luth) de Brahem se teinte de syncopes jazzy ou de vélocité évoquant le flamenco. Le tabla de Ustad Shaukat Hussain complète magnifiquement la douceur veloutée de l'oud et du sax. Superbe !

 

TWELVE MOONS (1992)

ECM 1500 / 519 500-2

twelve

Enregistré à Oslo en septembre 1992 par Jan Garbarek au saxophone ténor et soprano, Rainer Brüninghaus au piano, Eberhard Weber à la contrebasse, Marilyn Mazur aux percussions et Manu Katché à la batterie, Twelve Moons divisera encore le public.
Considérée comme trop facile, trop atmosphérique, ultra léchée – arguments que l'on peut entendre - la musique du Jan Garbarek Group est pourtant indéniablement digne d'intérêt, ne serait-ce que pour son sens de la mélodie et la maîtrise de l'instrument. Ici Garbarek mélange encore de nombreuses influences, loin de se limiter au jazz : musiques folkloriques norvégiennes et nordiques, world music, new age, musiques contemporaines et synthétiseurs. Peu de « swing » classique, on est dans un univers profond et contemplatif, épuré et riche.

« Twelve Moons » qui entame l'album, comme « Brother Wind March », est représentatif de cette dichotomie. D'un côté les synthés peuvent rebuter par leur sonorité artificielle, les percussions peuvent évoquer un peu trop la world music, mais le saxophone (essentiellement soprano) est excellent.
La suite est plus intéressante Le chant à la fois magnifique et triste de Agnes Buen Garnås sur « Psalm » qui compose avec un saxo qui émerge d'un tapis de synthés est un ravissement profond. Souvent de longs silences ponctuent le phrasé du chant ou du saxophone, renforçant cette impression de liberté et d'espace.

Les arabesques sur « Brother Wind March » sont particulièrement touchantes, les pleurs du saxo de « The Tall Tear Trees » font frissonner. La longue pièce de 12 minutes « Gautes-Margjit » est un concentré de sensibilité, de sérénité, d'écoute et de raffinement. Le piano a également ses moments de solos, rappelant par moments ( Arietta » la musique contemporaine de Steve Reich ou de Philip Glass. « Witchi-Tai-To » est quant à lui un rappel au saxo et piano du thème du superbe album de 1974, qui restera l'album phare de Jan Garbarek - au sein du Bobo Stenson Quartet.

A l'image de la pochette, le son de Garbarek, qui lui est véritablement propre, est porté par une légère et froide réverbération et coule de manière cristalline, lumineuse. Le son du saxophone est d’une précision fabuleuse, coupant comme de la glace mais aussi lumineux, pur comme du cristal. Chaque musicien a l’espace pour s’exprimer pleinement. Twelve Moons reste un album jazz malgré son côté largement métissé et son peu de swing.

OFFICIUM (1993)

ECM 1500 / 519 500-2

officium

La magnifique rencontre du chant grégorien et du saxophone !

Jan Garbarek improvise sur les musiques chantées par le quatuor vocal anglais The Hilliard Ensemble, qui reprend des œuvres, à destination liturgique, de compositeurs polyphoniques anciens, tels que Pérotin, Guillaume Dufaÿ et Cristobal de Morales, entre autres.

L’album combine les solos de jazz de forme libre de Garbarek avec des pièces allant du plain-chant grégorien aux premières polyphonies en passant par les motets de la Renaissance.

Parce Mihi Domine de Christóbal De Morales est la pièce la plus récente (« XVIe siècle ») et elle est jouée trois fois. Une première version avec le saxophone s'élevant au-dessus des voix, une interprétation purement vocale au milieu du disque et enfin une version mettant en vedette Jan Garbarek à la fin de l'album
Dans Regnantem Sempiterna, une pièce du XVe siècle d’un compositeur inconnu, le magnifique ténor de Garbarek hurle et gémit.
O Salutaris Hostia de Pierre De La Rue, également du XVe siècle, est beaucoup moins austère avec un Garbarek plus festif et tendre. Les voix semblent se replier autour du son du saxophone et le caresser. La belle acoustique de St Gerold donne une merveilleuse clarté et présence au sax de Garbarek.
De Spineto Nata Rosa est une autre composition anonyme, datant du XIVème siècle en Angleterre, et voit le saxophone de Garbarek contrastant avec le quatuor vocal.
Sur Virgo Flagellatur, le saxophone de Jan Garbarek éclipse les voix des chanteurs, avec un écho qui crée comme un second sax fantomatique Ce morceau est le point culminant du saxophone de l’album. Désormais, les voix flottent sur une mer de saxophones au lieu de l’inverse, et c’est une mer lumineuse, presque éblouissante, comme si le soleil venait de se lever. Le monastère Saint-Gérold était précisément le genre de bâtiment auquel étaient destinés ces chants. Il est fascinant d’entendre comment l’acoustique répond au son moderne d’un saxophone. Le résultat est d’une beauté saisissante. L'anonyme Primo tempore fait appel au registre inférieur de l'instrument ; sur le Sanctus on peut entendre (à environ 1'46') une légère dissonance.

Quelle que soit la façon dont on considère ce qu'on appelle le crossover (un terme tellement idiot), les preuves restent concluantes : « Officium » transcende avec succès toutes les limitations imposées par le temps et le style. Le mélange de jazz profane contemporain et de musique spirituelle européenne ancienne est audacieux, mais il fonctionne de manière saisissante.

VISIBLE WORLD (1995)

ECM 1585 529086-2

visible

Comme d’habitude, ce disque suscitera la controverse ; course à l’objet sonore idéal, lisse et poli à souhait, ou musique subtile et troublante ? World music sans racine ou vraie rencontre entre le génie du jazz et la richesse intelligemment conjuguée de traditions puisées aux quatre coins du monde ?

Visible World fait partie de ces albums qui ont rencontré un incontestable succès, mais qui sont également critiqués par les puristes. Visible World peut être estampillé new age avec nappes synthétiques flattant l'oreille, servies de surcroît par une production impeccable, devenue typique d'ECM, avec une profondeur et une luminosité particulièrement plaisantes.

Disons-le d'emblée : « Red Wind », « The Creek », « The Survivor », le traditionnel africain « Pygmy Lullaby » ou encore « The Healing Smoke » et « The Quest » sont très "new age" : des mélodies faciles, des rythmes entraînants.... On pourrait s'arrêter là. Et pourtant...
Dans ce long album (75 minutes environ), plusieurs titres se démarquent. Les compositions insérées au milieu de l'album (de « Visible World chiaro- » à « Desolate Mountains III ») sont plus jazzy, plus sombres et moins aguicheuses, servies par le piano léger et sautillant de Rainer Brüninghaus. Notamment « Evening Land », longue composition finale pleine de sensibilité, et dans laquelle intervient la chanteuse Mari Boine. Le saxophone de Garbarek décrit des arabesques dans une ambiance chaude et colorée, avec de douces percussions. Une jolie réussite évoquant Jon Hassell.

Plus globalement, cet album est vraiment dédié au saxophone de Garbarek. Une pureté du timbre qui rend ses interventions particulièrement scintillantes.


RITES (1998)

CD ECM 1685/86 - 559 006-2

rites

Ce double CD de Jan Garbarek est un peu l'aboutissement de l'approche qu'il poursuit plus ou moins résolument depuis près de trente ans maintenant. Pratiquement tous les chemins qu'il a parcourus dans le passé sont revisités ici, d'une manière ou d'une autre.

Dès la première plage (Rites), des chants d'oiseaux et bruits de village captés en Inde insufflent leur vie à l'atmosphère onirique tissée par les synthétiseurs et le soprano, tandis que sourd une pulsation étrange et pénétrante (une sorte de techno, dans son plus noble traitement). Claviers (Rainer Brüninghaus, Bugge Wesseltoft), basse (Eberhard Weber) et percussions (Marilyn Mazur) créent, en osmose avec le saxophone, une texture organique ou, au contraire, un flamboiement d'ombres et de lumières.

Comme d'habitude, le jeu magistral de Garbarek est l'élément central qui retient l'attention. Son jeu de soprano sur le joyeux, optimiste et jazzy "Her Wild Ways" montre une maîtrise parfaite de l'instrument de même que « Malinye » de Don Cherry. Ces deux morceaux, ainsi que l'entraînant "It's High Time", démontrent une capacité souvent négligée de Garbarek à travailler dans des contextes plus rapides que ce qu'il a généralement préféré ces dernières années.

Les rythmes du monde sont là avec des morceaux comme « Song, Tread Lightly » et « One Ying for Every Yang », entre autres. Sur « We Are the Stars » intervient la chorale Salvguttene et sur « The Moon Over Mtatsminda » le chanteur géorgien Jansug Kakhidze ajoute une texture plus terrienne.

Le premier disque approfondit plutôt le côté spirituel et mystique de son langage. La musique est lente, ténue et répétitive. Les mélodies sont épurées, semblables à un chant, portées par une myriade d'instruments à percussion et de clavier. Le deuxième disque de Rites est un peu différent, beaucoup plus festif. Ici le saxophone souvent glacé de Garbarek est chaud et chaleureux. It's OK to Listen to the Grey Voice est interprété avec une conviction plus profonde et s'intègre mieux que sur l'album dont il porte son nom.

RARUM - Selecteds recordings

ECM

rarum

Une rétrospective de la carrière de Garbarek depuis Triptycon jusqu'à Visible World.

 

IN PRAISE OF DREAMS (2004)

CD ECM 1880

praise

In Praise of Dreams, s'il reste un album très accessible, a le mérite d'être débarrassé du côté synthétique de nombre des réalisations "new age" de Garbarek. De surcroît, toutes les compositions, signées Garbarek, sont vraiment de qualité. Garbarek fait une nouvelle fois appel à Manu Katché à la batterie, et surtout a la bonne idée de recruter la violoniste Kim Kashkashian. Les compositions possèdent une agréable unité de ton qui donne un côté très harmonieux à cet album, une unité des atmosphères qui va renforcer l'impression de délicatesse de cet album.

Le nu-jazz de « As Seen From Above », assez proche de Nils Petter Molvaer, fait immédiatement mouche.
« In Praise of Dreams », aux senteurs folkloriques, voit le violon et le saxophone ténor se saluer, se répondre, ils finissent par s'unir.
« One Goes There Alone » et « Knot of Place and Time » représentent en quelque sorte la poursuite de cette conversation. Le violon est empreint d'une tristesse et d'une beauté particulièrement touchantes. Garbarek n'est pas en reste et la force des émotions, des humeurs de son saxophone soprano, rivalise avec la pertinence de ses interventions et de ses silences. « Scene From Afar » et l'irréel « Cloud Of Unknowing » possèdent la sensualité et la justesse d'un lent tango. Superbe ! « Conversation With A Stone » s'avère être également une vraie réussite.

Avec ce disque, Garbarek réalise une de ses oeuvres les plus délicates et raffinées de ces dernières années. Empreint de mélancolie, mariant admirablement bien saxophones et violon, In Praise of Dreams est une réussite.

DRESDEN (2004)

CD ECM 2009

dresden

Dresden est un double CD du quartet de Jan Garbarek avec Rainer Brüninghaus au piano, Yuri Daniel à la basse électrique et Manu Katché à la batterie. Le disque a été enregistré live au Alter Schlachthof (de) à Dresde le 20 octobre 2007 Jan Garbarek aura attendu presque quarante ans avant de sortir un disque enregistré en public.

Dresden suit un silence discographique de six ans, depuis 2003 et In Praise of Dreams, soit le plus grand écart entre deux albums en leader du saxophoniste. De plus, le disque n'était au départ pas destiné à être publié, mais n'était qu'un document de travail.

La qualité du disque est telle que, quoiqu’il arrive, il fera date dans la carrière du saxophoniste. On y retrouve bien évidemment ce qui a fait, et fait encore, le succès de Jan Garbarek : belles mélodies, ambiances variées et aérées. Mais cette fois, le groove est là ! Manu Katché dynamise (dynamite ?) le concert. La musique de Garbarek reste néanmoins aérienne car aucun débordement gratuit, aucune surenchère, ne l’affectent.

OFFICIUM NOVUM (2004)

ECM New Series 2125

officium

Malgré le titre de l'album, ce n'est pas un ré-enregistrement ou le reconditionnement de Officium mais une création entièrement nouvelle constituée de morceaux de la liturgie arménienne, de deux originaux de Garbarek et d'une composition d'Arvo Pärt. La fusion des voix de l'Hilliard Ensemble et de celle de Garbarek est fabuleuse. Un très grand disque.

« Comme le premier album, celui-ci est imprégné d'un sentiment de mystère lointain et d'une mélancolie profonde et puissante qui s'exprime avec une sensation intense. Le son est à nouveau spacieux et chaleureusement résonnant, avec un son terreux, ambiance enveloppante. Cet album sera un incontournable pour tous ceux qui ont aimé le premier, et il devrait plaire à tout auditeur ayant une affinité pour la spiritualité méditative de l'Europe de l'Est, en particulier lorsqu'elle est liée à l'expressivité contemporaine. et liberté stylistique. »
Stephen Eddins

Jan Garbarek a également participé aux disques suivants:

rypdal   deer   caris   eleni   neighborhood   atmos

Terje Rypdal, 1971 (Terje Rypdal)
Belonging
, 1974 (Keith Jarrett)
Luminessence, 1974 (Keith Jarrett)
Solstice, 1974 (Ralph Towner)
Arbour Zena, 1975 (Keith Jarrett)
Sound and Shadows, 1977 (Ralph Towner)
My Song, 1977 (Keith Jarrett)
Deer Wan, 1977 (Kenny Wheeler)
Sol Do Meio Dia, 1977 (Egberto Gismonti)
December Poems, 1977 (Gary Peacock)
Of Mist And Melting, 1977 (Bill Connors)
Personal Mountains, 1979 (Keith Jarrett)
Nude Ants, 1979 (Keith Jarrett)
Voice from the Past - Paradigm, 1981 (Gary Peacock)
Cycles, 1981 (David Darling)
Vision, 1983 (Shankar)
Song For Everyone, 1984 (Shankar)
Chorus, 1984 (Eberhard Weber)
Making Music, 1986 (Zakir Hussain)
Guamba, 1987 (Gary Peacock)
Rosenfole, 1988 (Agnes Buen Garnas)
Music For Films, 1990 (Eleni Karaindrou)
Alpstein, 1990 (Paul Giger)
Star, 1991 (Miroslav Vitous)
Atmos, 1992 (Miroslav Vitous)
Small Labyrinths, 1994 (Marylin Mazur)
Caris Mere, 1995 (Giya Kancheli)
Agram, 1996 (Lena Willemark & Ale Müller)
Universal Syncopations, 2003 (Miroslav Vitous)
Neighbourhood, 2005 (Manu Katché)

Comme on le voit, une palette très étendue.

Avec Keith Jarrett :

Keith Jarrett enregistra plusieurs albums pour ECM avec Jan Garbarek.

belonging   song 
  luminessence   arbour   mountains   nude_ants   sleeper

Belonging

Cette première séance du pianiste avec Jan Garbarek, Palle Danielson et Jon Christensen est très réussie. Le disque n'a pas vieilli (contrairement à "Nude Ants"), sans doute grâce à l'intelligence, la beauté du matériel thématique, exclusivement des compositions de Jarrett, souvent modales, et au jeu lumineux de ce dernier. Le lyrisme du pianiste s'allie à la sonorité de Garbarek, qui au ténor, à mi-chemin entre Rollins et Barbieri, fournit un chant plein et généreux (Blossom, Belonging, Solstice), aux longues phrases flexibles. Remarquable accompagnement du tandem scandinave

My Song (1978) montre encore l'excellence de Garbarek, dont les longues plaintes angoissées apportent aux mélodies du pianiste un lyrisme nouveau. A cet égard, l'exposé du morceau qui donne son titre à l'album mérite à lui seul l'acquisition du disque: le soprano recourbé du Norvégien y fait merveille. L'autre raison pour laquelle ce disque est excellent, c'est que Jarrett s'y révèle à l'écoute de ses partenaires. Il maîtrise ici sa forte personnalité et permet à sa musique de s'imprégner de leur influence. Ses propres mélodies en ressortent magnifiées. 

On trouve aussi deux enregistrements de concerts du quartet en 1979 : Personal Mountains tout d'abord. Le groupe est parfaitement soudé, Jarrett et Garbarek, infiniment complices. Le discours est ici riche et varié. Au foisonnement percussif, aux stridences du saxophone vient répondre l'admirable phrasé du piano, le lyrisme expressif du même Garbarek dans les mouvements lents. Le résultat est impressionnant, à la fois par la brillance des thèmes et la haute qualité de leur interprétation, qui laisse en outre parfois la place à d'excitantes improvisations (Oasis, lnnocence).

Nude Ants, enregistré en public au village Vanguard de New York en 1979, est nettement moins bon. Chaque titre paraît fondé sur une seule idée directrice, ce qui peut donner le meilleur (New Dance, Sunshine Song) comme le pire (Oasis : trente minutes d'ennui).

Et voilà qu'ECM exhume de ses archives un double CD, Sleeper, témoignage du "quartet européen" (dit "Belonging Band") au sommet de son art, Un concert inédit dans son intégralité au Nakano Sun Plaza de Tokyo en avril 1979.

Luminessence

Luminessence publié en 1974 est un album de compositions pour orchestre symphonique et saxophone, exécutées par l'Orchestre symphonique de la radio de Stuttgart et Jan Garbarek . Jarrett lui-même ne joue pas sur l'album, se mettant au service du saxophoniste, réservant dans sa musique des espaces étudiés avec précision où Garbarek se déchire, crie, pleure et rugit avec une sûreté, un sentiment de puissance et une parfaite maîtrise de ses moyens.

La relation entre Jarrett et Garbarek est si forte qu'il est impossible d'imaginer quelqu'un d'autre jouer cette musique. L'écriture de Jarrett est belle, émouvante, parfois énigmatique et le saxophoniste dispose d'une merveilleuse toile pour ses improvisations.

La partition permet au saxophoniste de suivre son propre chemin, et tout développement linéaire est laissé à l'orchestre à cordes pendant que Garbarek lance ses phrases.

Sur Numidor, magnifique passage majeur/mineur. Le dernier tiers de la composition contient quelquesbelles envolées de Garbarek.

Windsong met en vedette le saxophone soprano en passant de son thème d’ouverture, lyrique et luxuriant, à un passage plus agité avec un drone sur lequel Garbarek peut improviser.

Le dernier morceau de l’album, Luminessence, est le plus ouvertement joyeux, et peut-être le plus satisfaisant. L’ouverture par les cordes est assez dramatique, utilisant efficacement les membres du registre inférieur de l’orchestre qui s’ouvre ensuite sur une tapisserie musicale riche et complète mettant en place le solo le plus lyrique et le plus expansif de Garbarek.

Six mois plus tard, Jarrett et Garbarek seront de retour en studio avec le bassiste Charlie Haden et les membres du RSO Stuttgart pour enregistrer Arbour Zena, avec Jarrett compositeur et cette fois également au piano.

Arbour Zena
Après Belonging, Keith Jarrett compose une œuvre ambitieuse, Arbour Zena , pour ensemble à cordes, qui peut évoquer par moments Grieg, Bartok ou Berg, avec le saxophone de Jan Garbarek et la contrebasse de Charlie Haden. Beau disque, notamment les deux premières suite (Runes et Solara March) où la basse de Charlie Haden fait merveille.

Les trois pièces étendues d'Arbour Zena - la plus courte, "Solara March", dure près de 10 minutes tandis que la plus longue, "Mirrors", approche près de 28 minutes - explorent le côté plus romantique de Jarrett, avec des références occasionnelles à ses racines américaines et gospel. . L'écriture de Jarrett est en grande partie structurée pour l'orchestre à cordes, le pianiste, Haden et Garbarek superposant leurs improvisations qui s'intègrent parfaitement. Sur "Mirrors", Jarrett et Garbarek explorent les interactions pour créer quelque chose qui n'est ni du jazz ni du classique.

La critique de Richard S. Ginell de AllMusic accorde 3/5 à l'album et souligne que bien qu'attirante à petites doses, la musique devient rapidement ennuyeuse, du fait de l'absence de tempo et de changements de texture. Ceci étant particulièrement marquant sur les 28 minutes du titre Mirrors

Un disque qui avait été "descendu" par la critique de jazz. « Ennui indescriptible », écrivait Musica Jazz. « Musique hybride », écrivait André Francis. Pourtant, ce disque ne manque pas de charme, et Charlie Haden est impérial. A vous de juger !

Avec Ralph Towner :
solstice   sss
Avec Egberto Gismonti :
folk   sol   carta

En 1977, Garbarek collabore avec le guitariste et pianiste Egberto Gismonti pour Sol do Meio Dia, puis en 1979 ils enregistrent Folk Songs en trio avec Charlie Haden. Le trio enregistre ensuite Magico en 1979. Et 30 ans après (en novembre 2012) sort Carta de Amor, enregistré en public à Münich en 1981 (ECM 2280/81).

Capturé à l'Amerika Haus de Münich en avril 1981, ce concert montre le trio à son apogée après deux ans de tournées et deux albums, Magico” et “Folk Songs”.
Cinq compositions de Gismonti, avec deux versions de Carta de Amor, une version très libre de la composition de Garbarek “Spor”. Quant à lui Charlie Haden apporte “La Pasionaria”, du Liberation Music Orchestra et un inédit, “All That Is Beautiful”.

Avec Shankar et Zakir Hussain :
vision    song   making


Jan Garbarek est l'un des pionniers dans le croisement du jazz avec la musique traditionnelle. C'est Don Cherry, alors exilé en Suède, qui est à l'origine de cet intérêt pour des collaborations avec des musiciens folkloriques. C'est lui qui suggère et organise, vers 1967, une session où Garbarek, Arild Andersen, Terje Rypdal et Jon Christensen improvisent avec une chanteuse folklorique norvégienne. Garbarek trouve l'expérience très positive, et considère sérieusement cette idée de collaboration avec des musiciens folk.

Le saxophoniste ressent à la fin des années 1970 le besoin de s'éloigner du jazz, qu'il trouve trop bavard, et trop éloigné de son origine traditionnelle. Il se tourne alors vers sa propre tradition, en intégrant quelques éléments de musique folklorique norvégienne, à travers des instruments (flûte traditionnelle en bois), ou des compositions. Il espère ainsi retrouver un rapport à la mélodie plus classique, avec une distinction plus claire entre accompagnement et mélodie. Pour l'album Eventyr, il s'inspire de mélodies traditionnelles norvégiennes, en allant visiter les collections musicales de Chateau Neuf à Oslo.

L'implication devient plus forte à partir des années 1990, où Garbarek se met à dialoguer avec des instrumentistes traditionnels. Il collabore avec des chanteurs norvégiens (Agnes Buen Garnås, Mari Boine, Ingor Ánte Áilo Gaup), puis avec des musiciens de cultures différentes (le Tunisien Anouar Brahem, les Indiens Zakir Hussain, L. Shankar ou le Pakistanais Ustad Fateh Ali Khan). Ces rencontres sont vues par Garbarek comme un véritable dialogue avec un autre musicien, une rencontre de personnalités plus qu'une rencontre entre musiques.

Garbarek est particulièrement intéressé par la ressemblance entre sa propre musique folklorique et des musiques a priori éloignées, comme la musique des Balkans, la musique indienne ou la musique arabe. Des points de rencontre existent, notamment en matière de gammes ou de modes, ce qui permet aux musiciens de dialoguer facilement. Ces relations ont également été notées par d'autres musiciens, comme la compositrice grecque Eleni Karaindrou, qui ressent une composante balkanique dans la musique de Garbarek, ou le flûtiste bulgare Theodosii Spassov, qui pointe les similitudes avec la musique des Balkans, et jusqu'à la musique indienne. Anouar Brahem a été également impressionné par l'aisance avec laquelle Garbarek s'est approprié les modes utilisés en musique arabe. Le percussionniste indien Trilok Gurtu, avec qui Garbarek a joué à des multiples reprises, a lui aussi remarqué la parfaite compréhension de Garbarek des complexités rythmiques de la musique indienne.

Garbarek enregistre tout d'abord en 1983 Vision avec Shankar, puis Song For Everyone l'année suivante. En 1986 il retrouve Zakir Hussain avec qui il enregistre Making Music. Des vidéos ici.

dansere

A noter la réédition en coffret de trois enregistrements des débuts de Jan Garbarek, Sart (1971), Witchi-Tai-To (1973) et Dansere (1975). Deux orchestres, Garbarek/Stenson/Rypdal/Andersen/Christensen dans Sart et le Jan Garbarek-Bobo Stenson Quartet.

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