E nove (archives)
2009
.
Natale...
La procédure de
Cassation d’Yvan Colonna
Communiqué du Comité de Soutien à Yvan
COLONNA :
Vendredi 2 octobre 2009
La procédure de Cassation ne vise pas à réexaminer les faits. Elle
n’est pas un troisième procès.
La Cour de Cassation se contente de vérifier si la Loi et le Droit ont
été correctement appliqués, uniquement d’un point de vue de la forme et
de la procédure.
Dans le Cas d’Yvan, de l’avis unanime des professionnels qui ont eu à
examiner la procédure ou à suivre le procès, de nombreux moyens de
cassation devraient être retenus, et le seraient de façon
quasi-certaine, dans le cas d’une procédure normale.
Le mémoire déposé par Me Patrice SPINOSI, Avocat au Conseil (ce sont
des avocats spécifiques qui ont le monopole de la plaidoirie et de la
représentation devant la Cour de Cassation), développe 12 moyens de
cassation, autour de 6 thèmes principaux :
1 - Le premier est relatif aux incidents VINOLAS et LEBBOS.
L’incident VINOLAS est, selon le recours, constitutif d’une atteinte au
principe d’impartialité du Président de la Cour d’Assises, doublé d’une
rupture de l’égalité des armes et enfin d’une atteinte aux droits de la
défense.
Le grief d’impartialité sera étayé par l’incident relatif au témoin
LEBBOS, comme le fait que le Président ait attendu le départ de la
défense pour verser aux débats les écoutes constitutives d’éléments à
décharge, dont l’existence a été révélée à l’audience d’appel, alors
que l’existence de ces écoutes avait été cachée à la défense pendant
toute la durée de la procédure antérieure, soit pendant 10 ans !
2 - Le deuxième champ de critiques est tiré des atteintes aux droits de
la défense.
Seront ainsi mis en cause :
1) Le refus de la Cour d’acter l’interruption, par la partie civile et
l’accusation, de l’audition du témoin MANNARINI ,
2) Le refus de se souvenir, la Cour se bornant, pour répondre aux
différents donnés acte, à relever qu’elle n’est pas mémorative,
limitant ainsi le droit de l’accusé à formuler des moyens de cassation
et, partant, de son droit d’accés à un tribunal garanti par l’article 6
de la Convention Européenne des Droits de l’Homme ,
3) Le refus de la Cour d’annuler la procédure, suite aux conclusions
qui avaient été déposées, qui caractérise un excès de pouvoir négatif
de la juridiction,
4) Le refus de la Cour de faire droit à la demande de reconstitution,
interdisant ainsi à l’accusé d’obtenir les moyens nécessaires à la
démonstration de son innocence.
3 - Le troisième bloc de critiques est plus classique. Il est relatif à
la méconnaissance du principe de l’oralité des débats.
Qu’il s’agisse :
1) de l’audition interrompue du témoin MANNARINI,
2) de la communication lors de l’audience de l’avocat de la partie
civile avec l’un des témoins (incident dont la presse ne s’est pas fait
l’écho, mais dont la défense s’était faite donner acte pendant les
débats),
3) du fait qu’un des témoins, en l’espèce un policier de la DNATn ait
avoué avoir relu la procédure antérieurement à son audition, ce qui est
interdit par la Loi,
4) du fait qu’un des témoins ait, antérieurement à la déposition
d’autres témoins acquis aux débats, fait référence au témoignage de ces
derniers que la Cour n’avait pas encore entendus
5) du fait que, contre l’avis de la défense, il ait été projeté les
diapositives du transport à Ajaccio intervenu en première instance.
4 - Le quatrième bloc sera relatif au fait que, suite à la récusation
de ses avocats et son départ de la Cour d’Assises, Yvan COLONNA a été
jugé en son absence et sans défense.
5 - Le cinquième bloc met en cause plus généralement la procédure
d’exception des Cours d’Assises spéciales, en vue d’une saisine de la
Cour Européenne des Droits de l’Homme.
1) On peut ainsi faire valoir la jurisprudence TAXQUET c. BELGIQUE
(hélas mis en cause devant la Grande Chambre) qui a condamné cet état
du fait de l’absence de motivation des décisions d’assises. Cette
absence de motivation est d’autant moins compréhensible dans le cas qui
nous occupe que l’ensemble de la Cour est constitué de magistrats
professionnels.
2) On peut reprocher la rupture d’égalité devant la loi (article 14 de
la CEDH) qui naît de ce que, en cas de crime terroriste, une majorité
simple est suffisante pour caractériser la culpabilité de l’accusé
s’acquiert quand, en droit commun, cette majorité doit être qualifiée
(10 voix ai moins). Pourquoi le poseur de bombe a-t-il droit à une
moindre garantie que l’assassin d’enfant ?
3) De la même manière, on peut s’interroger sur les justifications d’un
jury uniquement constitué de magistrats dans un cas, et d’un jury
populaire dans l’autre, et invoquer, là encore, caractériser une
rupture d’égalité devant la Loi.
6 - Le sixième bloc de moyens est tiré des multiples violations de la
présomption d’innocence dont a été victime Yvan COLONNA tout au long de
la procédure.
On sait que, depuis le procès "Clearstream", les hommes politiques et
observateurs qui se souviennent enfin qu’il là d’un principe
fondamental dans toute démocratie, sont beaucoup plus nombreux et
n’hésitent pas à manifester leur indignation...
Si la Justice est la même pour tous, Yvan COLONNA n’a donc pas
d’inquiétude à se faire !
Source : Comité de Soutien à Yvan COLONNA
http://www.yvan-colonna.com
Lire également en page "
Livres" la
présentation du livre de Gérard Amaté, L’Affaire Colonna.
Un reportage sur les animateurs de la revue Fora! :
http://www.kewego.fr/video/iLyROoaftKqI.phpl
5ème Université
Citoyenne de Corsica Diaspora
Vendredi 24 et samedi 25 juillet 2009 Corsica Diaspora et Amis de la
Corse organise à Corte sa 5ème Université Citoyenne : ‘’La Corse au
cœur de l’Euro-Méditerranée’’.
Corsica Diaspora a pour mission de soutenir le développement des
initiatives et des projets dans l’île et à l’extérieur en créant ou
sollicitant les réseaux de la diaspora et des amis de la Corse.
L’’’Université Citoyenne de Corsica Diaspora’’, ‘’la Journée Mondiale
de la Corse’’ et ‘’la Biennale des Cultures Euro-méditerranéennes’’,
sont autant d’évènements passerelles qui permettent à nos compatriotes,
nos amis, ici et ailleurs de se retrouver autour de projets qu’ils
portent, de réalisations concrètes communes, dans l’île et dans le
monde. Le matériau de base, solide, est le lien affectif inaltérable
qui enjambe les siècles, solidarise les générations et rattache les
Corses de manière indissoluble à leur terre.
Depuis 2004, Corsica Diaspora organise tous les ans, fin juillet, à
l’Université Pasquale Paoli, à Corte, cette rencontre importante. Le
choix de la date ne doit rien au hasard ; en effet, nous connaissons
tous et attendons le retour estival massif des Corses et amis de la
Corse qui vivent à l’extérieur de l’île. La période est propice aux
retrouvailles familiales, au renouvellement de ce bain affectif rituel,
rempli d’émotion partagée, qui est un bien précieux pour celles et ceux
qui, par obligation mais aussi parfois volontairement, ont leurs
activités professionnelles ailleurs.
Tables rondes et débats accueillerons des invités prestigieux et des
experts dans les domaines de l’Environnement et du développement
durable, de la Société de la connaissance, de la Culture et des
échanges en Méditerranée, des nouvelles technologies (et leur
utilisation dans le réseau), et des médias. Cette manifestation apporte
des éclairages sur des thématiques importantes pour l’île que
l’association développera dans le cadre de la Biennale des Cultures
Euro-méditerranéennes, que Corsica Diaspora co-organise à Marseille
(11, 12, 13 décembre 2009 – Parc Chanot).
Renseignements :
http://www.corsicadiaspora.com
Tempi
Fa
Tribbiera à Vallecalle
Une enquête du "Monde" :
Fièvre immobilière et risques affairistes en Corse
LE MONDE | 15.07.09
BASTIA CORRESPONDANT
En lettres bâtons, l’argumentaire commercial incite le futur acquéreur
à saisir les "possibilités de défiscalisation" et profiter sans plus
tarder de "T4 de standing" avec "vue sur parc arboré". Depuis quelques
mois, les imposants panneaux publicitaires aux couleurs criardes, qui
jalonnent les itinéraires touristiques corses, de Bastia à Calvi en
passant par Porto-Vecchio, donnent aux voies de communication
insulaires des allures de routes pavées d’or. Maisons individuelles,
appartements, pavillons de lotissements aux noms champêtres ou pompeux,
ont parfois trouvé preneurs avant même l’achèvement des travaux.
Certains de ces lots seront revendus par des propriétaires qui n’en
auront pas même poussé la porte. Avec une confortable plus-value à la
clé.
Difficile de connaître avec précision la surface totale de ces projets
immobiliers champignons.
Une certitude est toutefois inscrite dans les chiffres du ministère de
l’industrie : pour la seule année 2008, les délivrances de permis de
construire ont explosé : + 49,3 %. Longtemps préservée du béton, la
Corse se hérisse de flèches de grues et avance au son des claquements
métalliques des mâchoires de pelleteuses. Même les côtes paisibles du
Cap Corse, semées de minuscules villages de pêcheurs aux terrains
jusqu’ici peu convoités, sont gagnées par le tsunami immobilier et la
hausse du prix du mètre carré. D’après les chiffres parvenus aux deux
fédérations départementales du BTP, près de 50 % des résidences
édifiées dans la région de Porto-Vecchio (Corse-du-Sud) ont été
acquises par des "non résidents", notamment d’origine italienne.
Lancés au cours des quatre dernières années, ces programmes auraient
surtout bénéficié des différents dispositifs gouvernementaux destinés à
faciliter l’accession à la propriété (prêts à taux zéro, etc.). Reste
que ce brutal développement ne manque pas d’aiguiser l’appétit
d’acteurs moins institutionnels. Bon an mal an, une ou deux affaires de
racket viennent troubler la réalisation des profits d’un secteur qui
contribue à hauteur de 7 % au PIB local. Les affaires "sorties" par les
services de police ou de gendarmerie grâce aux rares témoignages de
victimes ne constituent que la partie émergée de l’iceberg.
ENGINS DE CHANTIER INCENDIéS
Pour s’en convaincre, il suffit de se pencher sur les statistiques des
services des deux préfectures de Corse pour constater combien la nature
des cibles de plasticages a changé. Palais de justice et gendarmeries,
symboles de "l’Etat français colonial" honni des indépendantistes
armés, constituent aujourd’hui la portion congrue. Ils ont été détrônés
par les entreprises de BTP et, fait nouveau, par les chantiers en cours.
Le 6 juin, à Alata (Corse-du-Sud), une résidence en construction est
soufflée par une charge explosive ; deux jours auparavant, c’est à
Lucciana, une grosse commune du sud de Bastia, qu’un immeuble en
construction était endommagé ; dix jours plus tôt, une maison en cours
d’achèvement à deux pas de la plage de Palombaggia, près de
Porto-Vecchio, avait été rasée.
Sur octobre et novembre 2008, quatorze engins de chantier appartenant à
plusieurs sociétés du BTP ont été incendiés à travers la Corse. En deux
ans, 57 attentats et tentatives ont visé des sociétés du secteur à
travers le territoire de l’île, jusqu’à de petits villages comme
Casalabriva (Corse-du-Sud), où la voiture d’un entrepreneur avait été
soufflée par une bombe en novembre. "Soyons honnêtes, tempère Jean-Marc
Cermolacce, entrepreneur et patron du Medef dans l’île, la situation
est beaucoup moins tendue qu’il y a dix ans. Il y aura toujours des
tensions commerciales exacerbées, mais nous ne sommes plus face aux
tentatives de prédation organisées des années passées."
Les services de sécurité ne partagent pas cet optimisme. Signe des
temps, les atteintes aux entreprises du BTP étaient auparavant
intégrées dans la statistique globale sur les attentats : "Elles sont
différenciées depuis 2006, explique un officier de gendarmerie. Oui, il
y a bien un phénomène, c’est certain. Restent à définir les mobiles...
et à persuader les victimes de coopérer." Dans un climat plombé par une
quarantaine d’assassinats en trois ans, dont treize pour les six
premiers mois de 2009, cette "coopération" reste toute théorique.
Si la fièvre immobilière est loin de suffire à expliquer la série de
règlements de compte qui a lieu dans l’île, les services d’enquête
regardent en direction des équipes de voyous locaux, visiblement
engagées, comme de véritables entreprises, dans une concurrence
effrénée pour profiter des retombées de la manne immobilière et
touristique. Paul-Marie Romani, professeur d’économie à l’université de
Corse, s’inquiète "non de l’abondance des projets mais des gens qui
sont derrière. D’anciens projets ressortent des cartons, de grands
groupes financiers reviennent, et on se retrouve dans la même situation
qu’avant Aleria". Aleria est ce bourg de la côte orientale où Edmond
Simeoni, alors jeune médecin bastiais, avait donné le coup d’envoi de
la revendication nationaliste en occupant une cave viticole, fusil de
chasse au poing. A l’époque, les premiers autonomistes dénonçaient les
liens entre spéculation immobilière et affairisme. C’était en août 1975.
Antoine Albertini
Article paru dans l’édition du 16.07.09
Polémique au Festival
de Cannes
Extrait de l’article de Corse Matin daté du 18 mai 2009
Lorsqu’à la sortie d’un film vous entendez des spectateurs déclarer
haut et fort
« Les Corses ne sont vraiment que des brutes sanguinaires », avouez
qu’un certain malaise peut vous saisir imparablement.
C’est ce qui s’est produit ce dernier week-end après la projection du
film de Jacques Audiard, Un prophète, qui, excusez du peu, représente
la France dans la compétition officielle du Festival de Cannes.
Ce long-métrage qui, durant 2 h 30, vous plonge dans un terrible
univers carcéral où des nationalistes corses comparés à des voyous sans
foi ni loi font régner la terreur, a suscité une vive polémique sur la
Croisette.
René Viale, le président du Festival du cinéma italien de Bastia, s’est
déclaré « très choqué par ce film qui, une fois encore, donne une
déplorable image de la Corse et des Corses ».
« Même s’il s’agit d’une fiction, je trouve intolérable ce côté
réducteur qui fait passer les insulaires pour des assassins avides de
sang et de pouvoir, racistes et désormais esclavagistes. Comme le
festival de Cannes a une portée internationale, que va-t-on penser de
nous dans le monde entier ? Il faut arrêter de sacrifier la Corse sur
l’autel du septième art. La série télévisée de Canal +, Mafiosa, avait
déjà déchaîné les passions par des scènes violentes et totalement
gratuites. Là, c’est encore pire, car dans le film de Jacques Audiard
l’hémoglobine coule à flots à cause des Corses, bien sûr ».
Un prophète a été tourné cet hiver à Gennevilliers dans un décor de
prison superbement reconstitué. Sa distribution officielle est prévue
pour le 26 août.
L’histoire raconte le parcours initiatique d’un jeune maghrébin qui,
suite à son incarcération, tombe sous la coupe d’un groupe de
prisonniers corses dont il devient l’esclave. Un vieux truand insulaire
du nom de César Lucciani lui donne alors l’ordre de tuer une « balance
» puis d’assurer des missions de plus en plus violentes, à l’intérieur
et à l’extérieur de la prison lorsqu’il sort en permission. Mais, très
rusé, le jeune Malik utilisera toute son intelligence pour développer
discrètement son propre réseau afin de se venger.
Certaines séquences sont véritablement insoutenables. Et le clan des
voyous corses est toujours là quand la violence atteint son paroxysme.
Plusieurs acteurs corses
Jacques Audiard qui, rappelons-le, est le fils du célèbre scénariste
Michel Audiard, et le réalisateur du film aux six Césars De battre mon
coeur s’est arrêté, a souhaité jouer « la carte identitaire ». C’est
pour cela qu’il a donc choisi de mettre en exergue des Corses dans son
film. Mais, selon nous, sa décision ne tient pas car il aurait pu alors
y intégrer des gitans ou des basques. Selon René Viale, « s’il a décidé
que les Corses seraient les brutes de service de son film, c’est parce
que la Corse est aujourd’hui à la mode et que tous les faits-divers qui
défrayent la chronique judiciaire insulaire sont très vendeurs ».
Ce qu’il faut également remarquer est que dans ce film, l’avocat
insulaire du vieux truand joué par Niels Arestrup, est bien entendu
malhonnête : on n’en est plus à un excès près !
Il faut noter aussi que plusieurs comédiens insulaires tiennent un rôle
dans Un prophète. On retrouve notamment Jean-Emmanuel Pagni,
Jean-Philippe Ricci, Pierre Leccia qui a écrit le scénario de Mafiosa,
et Frédéric Graziani qui a réalisé il y a quelques années à Bastia Le
cadeau d’Elena. Ils sont tous remarquables dans la peau de leurs
personnages respectifs. De fait, beaucoup de festivaliers se sont
étonnés de ne pas les voir lors de la traditionnelle conférence de
presse cannoise.
Ambiguïté malsaine
Président de la cinémathèque de Corse, Dominique Landron, estime pour
sa part que « ce film est réussi d’un point de vue purement
cinématographique ». Selon lui, « depuis Le Trou de Jacques Becker, on
n’avait pas fait mieux sur l’univers carcéral ». Il pense également
qu’il « faut prendre Un prophète pour ce qu’il est, à savoir une oeuvre
fictionnelle et pas un documentaire.
« Il ne faut pas retirer à un créateur son pouvoir de création,
précise-t-il. Toutefois, je regrette amèrement deux choses.
« La première est une erreur historique, en l’occurrence faire croire
au public que le rapprochement des prisonniers politiques corses a été
accepté par Nicolas Sarkozy et que, de ce fait, les détenus peuvent
désormais regagner la prison de Borgo et quitter les prisons
continentales en chantant le Dio vi salvi Regina, comme c’est le cas
dans le film.
« Le second point qui m’a vraiment interpellé est que le réalisateur a
créé un véritable amalgame entre les nationalistes et les voyous. »
Dans son film, qui est souvent parlé corse avec des sous-titres
français, Jacques Audiard laisse en effet planer une ambiguïté malsaine.
Jean-Baptiste Croce
Bientôt un lieu de
culture pour Calvi !
Le pesant silence du
Parti socialiste sur le procès Colonna
Le journal réunionnais
Témoignages
publiait le lundi 6 avril 2009 un article sous ce titre.
Le procès en appel d’Yvan Colonna, accusé d’être l’assassin du préfet
Erignac, s’est déroulé devant un tribunal d’exception, une Cour
d’assises composée uniquement de magistrats professionnels nommés par
le pouvoir.
Bien qu’il n’intègre en son sein aucun jury populaire, ce tribunal très
spécial héritier direct de la cour de sûreté de l’Etat (abolie,
rappelons-le, par un ministre socialiste), est censé, paradoxalement,
rendre la justice au nom du peuple français.
Il a condamné en appel Yvan Colonna, citoyen français, à la réclusion à
perpétuité assortie d’une peine de sureté de 22 ans, la peine la plus
lourde de notre code pénal et "réservée" d’ordinaire aux tueurs en
série.
Cette sentence a été rendue sur la seule foi des accusations des
membres du commando ayant avoué avoir assassiné le préfet, puisqu’il
n’existe aucune preuve matérielle contre Colonna et que les dépositions
des témoins directs du crime l’innocentent.
Ce tribunal d’exception, qui n’a donc pas été capable de prouver les
responsabilités exactes de Colonna dans cette affaire lui a toutefois
attribué le rôle du tireur, et a condamné cet homme à la peine maximale
sur la base de son "intime conviction".
Pour bon nombre d’observateurs français et étrangers bon connaisseurs
du dossier (dont la Fédération internationale des Droits de l’Homme),
ce procès a été mené uniquement à charge contre l’accusé, le doute qui
doit bénéficier à tout citoyen de notre pays n’ayant à aucun instant
été pris en compte par cette cour de magistrats pour rendre sa sentence.
Le procès en appel, tout comme l’instruction, a été entaché de graves
atteintes au droit ainsi qu’au au déroulement serein de la justice. (…)
Sans parler de l’étrange refus d’une reconstitution, (pourtant réclamée
pour la troisième fois par l’accusé lui-même), du refus de
confrontation de ce dernier avec ses accusateurs, de l’absence
d’expertise balistique, etc. Toutes démarches pourtant très habituelles
dans un procès d’assises « ordinaire ».
Que l’on croie ou non à l’innocence du berger de Cargèse, force est de
constater pour les observateurs impartiaux que, dans ce procès,
l’article 11 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen qui
proclame que : « Toute personne accusée d’un acte délictueux est
présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement
établie au cours d’un procès public où toutes les garanties nécessaires
à sa défense lui auront été assurées. » a été largement bafoué.
Comment la justice française peut-elle affirmer, au nom du peuple
français, quelque chose qu’elle a été incapable d’établir ? Comment
l’avocat général, dans son réquisitoire, a-t-il pu affirmer de l’accusé
qu’il était « le tireur, l’exécuteur et le bourreau » ?
Les Verts relèvent « les nombreuses carences dans le dossier
d’instruction venant corroborer les remarques déjà émises par la FIDH
concernant les manques graves au respect des droits de la défense, et
réaffirment qu’en démocratie la raison d’Etat ne doit en aucun cas se
substituer à la Justice sous peine d’entraîner son discrédit ». (…)
Hormis une piteuse déclaration de François Hollande (1) (qui n’engage,
espérons-le, que lui - même), le silence du parti socialiste sur ce
procès est assourdissant.
Pas un commentaire. Pas un mot.
Ce Parti prétend pourtant qu’il « plonge ses racines dans la tradition
de l’humanisme et dans la philosophie des Lumières ». Et qu’il « fait
siennes les valeurs de Liberté, d’Egalité, de Fraternité, proclamées
par la Révolution Française. »
Il faut donc supposer qu’aujourd’hui le Parti socialiste, pourtant si
épris de justice sociale, s’est affranchi aujourd’hui de l’esprit des
Lumières, s’accommode fort bien des tribunaux d’exception - nommés par
le pouvoir - au pays des droits de l’homme, qu’il admet ce nouveau
fonctionnement des institutions françaises, qu’il n’a rien à redire sur
la remise en question de l’idée somme toute assez partagée selon
laquelle, dans une démocratie, la justice ne pourrait enfermer
quelqu’un à vie que si elle a la certitude - honnêtement acquise - du
geste accompli ou de la faute commise.
Enfin, depuis quand, en France, un accusé doit-il apporter la preuve de
son innocence, ainsi que l’a exigé l’accusation tout au long de ce
procès ?
Yvan Colonna, désigné autrefois par Sarkozy comme « l’assassin du
préfet Erignac » au mépris (déjà) de toute présomption d’innocence (2),
n’intéresse donc pas le parti qui fait sienne les valeurs de la
Liberté, de l’Egalité, de la Fraternité et de la Justice. (…)
Lorsque les tribunaux d’exception avancent, ce sont les droits les plus
élémentaires du citoyen qui reculent.
Patric Nottret
(1) L’ancien numéro un du PS, François Hollande, a jugé « moralement
inacceptable et politiquement intenable » une comparaison entre
l’affaire Dreyfus et le procès d’Yvan Colonna, comme l’ont fait les
défenseurs du berger corse. « Cette comparaison me choque. Dreyfus a
été condamné par une parodie de justice, un déni de justice », il a été
victime d’un « complot contre la vérité ».
(2) Pour mémoire, le public ignore souvent qu’auparavant, deux autres
hommes avaient été désignés comme étant les commanditaires du meurtre
d’Erignac : Jean Castela et Vincent Andriuzzi, deux enseignants,
avaient été condamnés par une même cour spéciale à trente ans de
réclusion criminelle pour avoir été reconnus (principalement par le
commissaire Marion et le juge Bruguière, principaux accusateurs de
Colonna), comme étant les "cerveaux" ayant commandité l’assassinat du
Préfet Erignac, et pour attentats.
A la veille de leur procès en appel, la Ligue des droits de l´homme
s´interrogeait déjà sur « les possibles conséquences d´un certain
nombre de dérives dans la justice qui hypothéquaient le droit à un
procès équitable et qui, par voie de conséquence, pouvaient faire
craindre une erreur judiciaire ».
Après avoir été maintenus en détention provisoire durant 7 ans, Jean
Castela et Vincent Andriuzzi ont été lavés de ces accusations et
relaxés après leur procès en appel.
Dernier procès
d’assises pour Wacogne
Didier Wacogne, le président très controversé de la cour d’assises
spéciales de Paris qui a jugé en appel Yvan Colonna, ne présidera plus
à l’avenir de session d’assises. En effet, il a été convoqué par le
premier président de la cour d’appel de Paris, Jean-Claude Magendie qui
lui a notifié sa décision en vertu d’un pouvoir discrétionnaire.
Yvan
Colonna se pourvoit en cassation
Les avocats d’Yvan Colonna ont déposé lundi 30 mars un pourvoi en
cassation contre la condamnation vendredi par la cour d’assises d’appel
de Paris du berger de Cargèse à la réclusion criminelle à perpétuité,
assortie d’une mesure de sûreté de 22 ans.
Ce pourvoi, déposé en milieu d’après-midi, vise notamment le manque de
partialité et l’absence de loyauté du président de la cour d’assises
d’appel, Didier Wacogne, a précisé Me Garbarini.
Le silence et la
démission des journalistes
Sur le blog de Jean-Michel Aphatie :
"Samedi, Libération a titré ainsi son papier, publié page 6: « Yvan
Colonna: le procès tangue, pas le verdict. » Cette mise en
contradiction du procès et du verdict synthétise formidablement le
problème. Ce titre dit bien que le verdict est indépendant du procès.
Ce qui, dans une démocratie, n’est pas acceptable.
Curieusement, ce constat, partagé, est demeuré sans suites. Nulle part
dans la presse, un éditorial n’a posé la question, soulevé le problème.
Certains papiers, mais de manière très inégale, ont souligné la
partialité du président, donc l’orientation du cours de la justice.
Mais pas un commentaire sur ce sujet, dans la presse, donc encore moins
d’indignation. Le procès a été suivi de manière factuelle, et faut-il
le préciser, de manière très inégale, mais pas une plume ne s’est
consacrée à l’observation des principes."
On pourrait en dire autant de la plupart des partis de gauche, prompts
à dénoncer les manquements aux Droits de l’Homme en dehors de
l’Hexagone. Seuls à ce jour les Verts et le NPA ont réagi...
Une commission
d’enquête parlementaire ?
Jean-Guy Talamoni a déposé à l’Assemblée de Corse une motion demandant
la constitution d’une commission d’enquête parlementaire sur "l’affaire
Colonna et les activités des juridictions spéciales dites
"antiterroristes".
"De graves atteintes aux droits de la défense" justifient cette
demande, a précisé Jean-Guy Talamoni.
"Malgré les doutes que l’on peut nourrir sur la capacité des
institutions politico-judiciaires françaises à se remettre en cause,
surtout lorsqu’il s’agit du problème politique corse, il n’est sans
doute pas inintéressant de voir une telle commission enquêter sur les
dérives des juridictions dites "antiterroristes", a-t-il ajouté.
Manifestation à Ajaccio
C’est la réponse de la rue au verdict de la cour d’assises. Hier
après-midi, à Ajaccio (Corse-du-Sud), plusieurs milliers de
manifestants ont défilé pour dénoncer la condamnation d’Yvan Colonna.
Peu importe le chiffre exact, entre 4 000 selon la police et plus de 10
000 pour les organisateurs, cette manifestation a rempli son objectif :
montrer qu’une partie de la population corse soutient le berger
condamné, et pas seulement la mouvance nationaliste.
Le défilé s’est déroulé dans le calme et sous la pluie avec, au premier
rang du cortège, les proches de Colonna, son père et sa sœur notamment,
mais aussi des leaders politiques locaux comme Jean-Guy Talamoni et
Jean-Christophe Angelini. Edmond Simeoni a déclaré : "C’est une honte
dans un pays démocratique comme la France et notre combat prend
aujourd’hui une valeur symbolique", a-t-il dit. "Nous devons tous nous
dresser contre ce déni de justice. Ce n’est pas une affaire entre les
Corses et les Français. C’est une affaire de justice, de démocratie et
de droits de l’Homme qui nous concerne tous".
Procès Colonna : "Un
fiasco"
Par Marie-Lys LUBRANO
Le JDD.fr
Reconnu coupable de l’assassinat du préfet Erignac, Yvan Colonna a été
condamné, vendredi soir, à la réclusion criminelle à perpétuité
assortie d’une peine de sûreté de vingt-deux ans. Une peine plus lourde
qu’en première instance, puisque c’est la peine maximale.
Pour le JDD.fr, Maître Gilles Simeoni, avocat de Colonna, réagit au
verdict et revient sur ce procès particulièrement agité.
A la fin du procès en première
instance, vous disiez que votre client,
qui avait échappé à la peine de sûreté, avait été condamné "au bénéfice
du doute". Est-ce encore le cas?
Là non, on n’est plus dans le bénéfice du doute. Avec ce procès en
appel, on était dans un train lancé sur les rails de la condamnation à
tout prix. Dans des conditions normales, il n’y aurait pas eu d’autres
issues que l’acquittement. Malheureusement ce que nous avions pressenti
est arrivé. La cour nous a démontré de façon délibérée, systématique et
même provocante, qu’elle n’était pas là pour arbitrer entre la thèse de
l’accusation et celle de la défense. Elle a refusé ne serait-ce que
d’envisager l’hypothèse de l’innocence d’Yvan Colonna. Sa seule
fonction et son seul objectif étaient d’arriver - au forceps si
nécessaire - à une condamnation, y compris au mépris de la vérité.
C’est ce qu’il s’est passé.
En première instance, vous disiez dans
votre plaidoirie que le procès s’était bien passé. Cela n’a pas été le
cas en appel?
On disait du procès en première instance qu’il avait présenté les
apparences de l’équité. Mais nous avions déjà bien compris, notamment
au travers de la reconstitution "croupion" qui avait été ordonnée -
c’est à dire un simple transport sur place - que la cour d’assises,
même en première instance, ne voulait pas aller au bout de la vérité.
Nous avions décidé d’exercer une défense classique parce que nous
n’avions rien à craindre du débat judiciaire, dès lors qu’il se tenait
dans des conditions normales. En appel, nous sommes encore venus jouer
le jeu judiciaire. Mais on nous a bien fait comprendre qu’il n’y avait
pas de place pour le débat et pour l’équité. Cette condamnation
intervient dans des conditions particulièrement scandaleuses.
Le "diktat" de Sarkozy
Yvan Colonna a écopé d’une peine plus lourde qu’en première instance,
comment l’interprétez vous ?
La cour d’assises a voulu se venger de lui. Les juges n’ont pas accepté
qu’il résiste à l’injustice. Et cette condamnation n’est autre que la
traduction juridique du diktat énoncé contre lui, à l’époque de son
arrestation, par le ministre de l’Intérieur (Nicolas Sarkozy, ndlr), en
violation totale de la présomption d’innocence.
Ne regrettez-vous pas, maintenant, de
ne pas avoir plaidé?
Nous ne regrettons pas parce que nos plaidoiries n’auraient eu aucune
incidence. La cour avait démontré qu’elle ne voulait pas aller vers la
vérité, alors nous n’avons pas eu d’autre choix que de quitter le
procès.
Qu’auriez-vous pu dire de plus si vous
aviez plaidé?
Il y avait tout à dire... Mais de toute façon, si nous avions été
devant une cour d’assises fonctionnant normalement, il n’y aurait même
pas eu besoin de plaidoirie de la défense.
Vous allez vous pourvoir en cassation.
Mais l’absence de l’accusé
pendant les débats n’étant pas du fait de la cour, quels vices de
procédures allez-vous invoquer?
Nous avons plusieurs autres moyens. D’abord la rupture de l’égalité des
armes entre la défense et l’accusation: le témoignage de Didier Vinolas
était connu de l’accusation mais pas de nous. Ensuite, il y a des
écoutes téléphoniques effectuées pendant l’enquête qui nous ont été
cachées et la reconstitution précise des faits qui nous a été refusée.
Enfin, il y a les témoins qu’on a bombardés de questions avant même
qu’ils ne fassent leurs dépositions...
Toute cette affaire, y compris sur le terrain juridique, est un
véritable fiasco.
A lire, une très intéressante étude de Daniel Arnaud :
Le Procès Colonna, les médias et la démocratie
C’est ici : http://generation69.blogs.nouvelobs.com/index-2.phpl
Condamnation d’Yvan
Colonna
Yvan Colonna a été condamné en appel à la réclusion criminelle à
perpétuité avec une période de sûreté incompressible de 22 ans pour
l’assassinat du préfet de Corse Claude Erignac en 1998.
Lors d’une déclaration publique à Bastia, Edmond Simeoni a qualifié le
verdict de "terrible parce qu’il aggrave la peine du premier procès,
marquant ainsi la volonté délibérée, provocatrice, d’emmurer Yvan
Colonna vivant".
Une manifestation est prévue à Ajaccio samedi à 15h00.
Edmond Simeoni a souligné "l’intention des nationalistes de manifester
dans le calme et la dignité, non pas pour protester seulement contre un
jugement inique, mais pour montrer aussi qu’il s’agit d’un problème
concernant le peuple français au nom duquel la justice est rendue".
"A chaque fois que les justices d’exception avancent, la démocratie
recule. Le combat continue! Nous irons en cassation, puis
éventuellement devant la juridiction européenne des droits de l’Homme".
Les avocats de la défense ont d’ores et déjà annoncé leur intention de
se pourvoir en cassation.
Communiqué du comité de soutien à Yvan Colonna :
Madame, Monsieur, cari amichi,
Malgré la démonstration du caractère exclusivement à
charge de l´instruction et des pressions scandaleuses éxercées par le
pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire.
Malgré l´absence totale de preuves ou d´indices matériels,
et des dépositions de témoins oculaires de la scène du crime, qui
innocentent Yvan Colonna, malgré les témoignages non démentis,
établissant l´impossibilité matérielle qu´Yvan ait participé aux faits
qui lui sont reprochés.
Malgré la mise à jour de pratiques policières dignes d´un
état totalitaire (faux procès verbaux, pressions sur les témoins,
détournement de procédures, disparition d´éléments de preuves
favorables à l´accusé).
Malgré le fait que le doute doive profiter à l´accusé
alors qu´il a été présent tout au long d´un procès émaillé de zones
d´ombres et d´incertitudes.
Malgré le fait que la conviction intime du juge ne doive
s´appliquer qu´en cas d´acquittement,
YVAN COLONNA A ETE CONDAMNE A LA RECLUSION CRIMINELLE A PERPETUITE
par une justice solidaire du pouvoir politique au titre de la raison
d´état et animée d´un esprit de vengeance.
En fait, les audiences «équitables» dans leur forme ont dissimulé le
poids de la raison d´état.
Appel a aussitôt été formé contre cette décision.
Yvan reste présumé innocent.
Le comité de soutien fort à ce jour de plus de 48 000 signatures,
continue et accentue son combat, y compris sur le plan européen, pour
que soit enfin reconnue l´innocence d´Yvan Colonna à la prochaine
échéance judiciaire en appel.
Au delà du cas d´Yvan, c´est aussi une exigence de démocratie et
d´indépendance de la justice face au pouvoir politique et à la raison
d´état que nous revendiquons.
http://www.yvan-colonna.com/
Sept
semaines de procès dans une ambiance délétère
Un article édifiant du Figaro sous la plume de Stéphane
Durand-Souffland, dont il faut souligner l’objectivité et la pertinence
tout au long de ce procès.
27/03/2009
La tension entre la cour et les défenseurs de l’accusé n’a cessé de
croître au fil des audiences.
Un rendez-vous de Me Pascal Garbarini chez son dentiste a sans doute
précipité le départ d’Yvan Colonna et de sa défense. Mais le procès du
berger de Cargèse avait déjà failli s’arrêter, à peine commencé. Voici
pourquoi.
Me Garbarini, donc, avait prévenu le président Wacogne qu’il serait
légèrement en retard le 10 mars au matin de fait, l’avocat de la
défense arrive peu après 10 heures. Le soir de ce 10 mars, Me Lemaire,
principal conseil de la partie civile, demande que soient projetées des
photos prises en 2007, lors d’un transport de la première cour
d’assises sur les lieux du crime. Il est déjà 19 h 40 et la défense
charge Me Garbarini qui, contrairement à Me Sollacaro, n’a jamais tenu
de propos désobligeants à l’encontre des juges, d’aller solliciter un
report de ce visionnage au lendemain, arguant de la fatigue générale.
L’avocat se rend dans la chambre du conseil, où les dix magistrats
(neuf titulaires et un suppléant) de la cour spécialement composée
discutent à bâtons rompus.
Reconstitution refusée
Alors qu’il plaide la lassitude, un assesseur rétorque sèchement :
«Vous ne devez pas être si fatigué que ça, puisque vous êtes arrivé à
10 h 30 ce matin». L’une de ses collègues renchérit : «Nous ne sommes
pas à la botte d’Yvan Colonna». Le président n’intervient pas. Un
magistrat, témoin de la scène, en a confirmé le déroulement au Figaro,
ironisant : «Reprocher à un avocat d’être en retard alors que le
président n’a jamais repris l’audience à l’heure…»
Le report est accepté, mais les cinq avocats concluent que l’hostilité
est telle à leur égard que certains assesseurs ne font même plus
l’effort de la masquer : ils décident de claquer la porte au premier
incident. Pourtant, jusque-là, ils étaient partagés sur cette
stratégie, certains restant partisans du combat judiciaire traditionnel.
Le prétexte leur sera fourni le 11 mars, avec le refus prononcé par la
cour d’organiser une reconstitution. Ce déplacement, bien que lourd à
organiser et à l’intérêt aléatoire, avait été envisagé par le ministère
de la Justice et inscrit au budget dès avant le procès. Un week-end
avait été bloqué, dont la date était connue de la presse. Lors d’une
réunion stratégique tenue le 9 mars au soir en présence de plusieurs
conseillers ministériels, et où «toutes les options ont été envisagées»
selon l’un des participants, il avait cependant été décidé que le
ministère public se prononcerait contre la reconstitution :
l’atmosphère des débats s’était par trop dégradée pour donner
l’impression de faire une concession à la défense «qui a dépassé les
bornes». Mais l’on espérait que la cour non représentée à ce comité,
reporterait sa décision de quelques jours. Le «niet» ferme et définitif
a donc surpris, et provoqué le clash. Il est plus que probable que si
la décision avait été autre, Yvan Colonna n’aurait pas quitté le box,
du moins pas ce jour-là.
Ouvert le 9 février, le procès était parti sur de mauvaises bases. Le
13, Didier Vinolas était venu témoigner. L’effet qu’ont produit ses
«révélations» a été dévastateur : les débats ont failli ne pas
reprendre le lundi 16. Car le 14, le palais de justice est en
effervescence. Selon nos informations, le président avait «égaré» la
note déposée fin décembre par M. Vinolas au parquet général, que
celui-ci lui a transmise un mois plus tard. Si la défense demande à
voir ce «soit transmis» et qu’il a disparu, c’en est fini. «Les avocats
généraux vont pouvoir garder leur réquisitoire au chaud pour l’année
prochaine», soupire un membre bien informé du parquet général.
Sollicité le 14 février par Le Figaro, M. Wacogne n’a pas souhaité
donner suite.
Guerre de procédure
Le 15, l’optimisme revient modestement : «Nous avons l’espoir
raisonnable que le procès se poursuive», confie un magistrat, en
croisant les doigts. Le lundi, à la reprise des débats (avec 25 minutes
de retard), le président verse la lettre de M. Vinolas dont il avait
été destinataire par ailleurs. Dans un climat délétère, la défense
exige de voir le soit-transmis. «C’est la même chose», avance le
président. Ce que confirme du bout des lèvres un avocat général. Mais
le flottement, évident à cet instant entre le siège et le parquet,
n’échappe à personne.
Me Garbarini : «Pourquoi n’avez-vous pas ce soit-transmis ?»
Le président : «Je n’apporte pas tout à l’audience. Il est dans mon
bureau…»
L’audience est suspendue à 11 h 40. Elle doit reprendre à midi. à 12 h
20, la cour réapparaît. Le président verse le soit-transmis. Le procès
reprend. Mais le compte-à-rebours est enclenché.
Histoires de drapeaux...
Concert de Canta U Populu Corsu à
Paris : Sarko n’aime pas les drapeaux.
Le 25 mars 2009 : (08:21 Unità Naziunale,
www.unita-naziunale.org - Corse -
Lutte de Masse)
Venneri sera, u 20 di marzu, simu andati, in famiglia, à l’Olympia à
vede Canta u Populu Corsu. Cù noi, aviamu trè bandere. Duie bandere
corse ; una grande è una chjuca per u figliulinu. A terza ghjera a
bandera di u Ribellu.
A Minnanna chì vuglia entre di bon’ora, cù un’amica, ùn hè micca
passata cù e so trè bandere. Ùn eranu micca i bastoni chì incumundavanu
u primu « vigile », era a bandera di u Ribellu. è stu « vigile » l’hà
dettu à Minnanna : « Ici, madame on ne fait pas de politique.
Vous devez me donner votre drapeau. Vous le reprendrez en sortant .»
A Minnanna hè surtita, in zerga, senza dà a so bandera, dicendu à u «
vigile » :
« Indè noi, quessu ùn s’hè mai vistu di cappià una bandera à un
furesteru.» .U nostru Ribellu ghjè un’amica chì l’hà piattatu è simu
entrati. Eiu, per passà cù u figliolinu, è e nostre duie bandere corse,
avemu piantatu quattre volte.
Quattru « vigile » è quattre volte à parlamintà. Quattre
discussione per annarbà a ghjente, è pò aghju dettu « eiu passsu
avà ». è simu tutti passati, quantunque cù e nostre bandere corse.
Quandu Canta u Populu Corsu hà cuminciatu à ripiglià e so canzone di
lotte, aghju surtitu a bandera di nostru Ribellu. Subbitu un antru «
vigile » hè venutu à cercami. è chì vulia ? A bandera ben intesu. Sò
surtitu di a seria di sedione è mi sò avvicinatu di u « vigile ». Ma
invece di dà a bandera à st’omu, sò andatu versu a scena è aghju
lampatu a bandera à i nostri cantadori. è ghjè cusì ch’avemu vistu dui
cantadori chì, cantendu, hanu purtatu a nostra bandera.
Un antru fattu di sta serata. Certi sò stati obligati, per entre, di
caccià u « tee shirt » di sustegnu à Yvan Colonna. è
l’avemu amparatu da Ceccè Buteau, chì ci hà dettu : « Sò e
RG chì, in sta serata, hanu datu e cunsigne à l’Olympia ». Ben intensu,
i nostri paisani hanu surtitu torna i so « tee shirt »
Ciò chì face piacè puru, ghjè, chì i nostri « vigile » cunnoscenu a
nostra lingua è hanu amparatu qualche parolle corse : - Libertà per
Yvan Colonna - è - A populu fattu bisognu à marchjà.
Dans la série "Sarko n’aime pas les drapeaux", le
Journal du Dimanche
daté du 22 mars 2009 dans un article intitulé : Otan : la police fait
le ménage à Strasbourg , a écrit :
« à quelques jours du sommet de l’Otan des 3 et 4 avril, la police a
obligé plusieurs Strasbourgeois à retirer de leurs fenêtres ou balcons
le drapeau de paix aux couleurs arc-en-ciel avec la mention « No
to Nato » (Non à l’Otan) . »
François Dominici – Choisy le Roi – le 24 03 2009
Source photo : Unità Naziunale, Archives du site.
Source info : Unità Naziunale
Voici donc les drapeaux interdits :
La France de Sarkozy n’est certes pas le Chili de Pinochet, mais ces
restrictions aux libertés publiques ont de quoi inquiéter tout
démocrate, de même que les dérives de la justice "antiterroriste" :
procès Colonna, affaire de Tarnac (voir l’article du Monde sur ce
sujet)...
Colonna: appel à
manifester samedi
Le comité de soutien à Yvan Colonna appelle à manifester samedi à 15
heures à Ajaccio "pour témoigner du refus d’accepter un verdict
inique", dans un communiqué.
"La démarche de mobilisation se poursuivra afin qu’Yvan bénéficie d’un
procès équitable", poursuit le texte, qui appelle "tous les démocrates
à y participer".
Le verdict de la cour d’assises spéciale de Paris, qui rejuge depuis le
9 février Yvan Colonna, est attendu vendredi.
5 questions autour de
l’affaire Colonna
Le verdict dans le procès en appel d’Yvan Colonna devrait être prononcé
vendredi prochain. A quelques jours de l’échéance, un point rapide sur
l’essentiel du dossier.
Quelles charges pèsent au juste sur
Yvan Colonna ?
Uniquement les mises en cause initiales des membres du commando qui a
assassiné Claude Erignac le 6 février 1998, à Ajaccio. Les autres
éléments du dossier (dont certains n’ont tout bonnement pas été pris en
compte par une instruction menée exclusivement à charge) sont à
décharge : l’analyse balistique qui conclut à un tireur de grande
taille, les témoins oculaires qui ne reconnaissent pas Yvan Colonna,
les écoutes téléphoniques qui n’indiquent rien de suspect, les
rétractations des membres du commando, les contradictions dans leurs
premières déclarations. C’est pourquoi la Fédération internationale des
droits de l’homme (FIDH), dans le rapport qu’elle a rendu après le
procès de 2007, a dénoncé la faiblesse d’une accusation ayant conduit à
une perpétuité.
Pourquoi ses "amis" l’auraient-ils
désigné à tort ?
Pour minimiser leur rôle dans l’assassinat ; pour couvrir d’autres
personnes ; parce que le nom d’Yvan Colonna leur aurait été "suggéré"
par les enquêteurs. Il ne s’agit-là que d’hypothèses, mais leur simple
formulation doit nous rappeler qu’il y a une place pour le doute. Dans
d’autres affaires (Dominique Baudis, Patrick Dils...), des aveux
circonstanciés ont conduit à accuser des individus finalement mis hors
de cause. Lors de l’audience du 9 mars 2009, Pierre Alessandri a en
outre lâché : « Effectivement, j’ai des reproches à faire à Yvan. Quand
j’ai décidé de franchir le pas de la violence clandestine, j’ai espéré
qu’il ferait partie de notre groupe. Ce que je lui reproche, c’est ça :
d’avoir laissé Didier Maranelli et Martin Ottaviani monter au charbon
alors que c’est lui qui aurait dû le faire, pour être cohérent avec son
discours. » Aussi pourrions-nous imaginer le choix d’un bouc-émissaire
(ou d’un leurre) qui s’expliquerait par un ressentiment : à l’encontre
d’un "ami" qui partage les mêmes idées, et qui ne veut pas pour autant
aller les défendre par l’action violente ou le meurtre. Depuis Dantès
envoyé au château d’If par Morcerf et Danglars, on sait qu’avec
certains "amis"... on n’a plus besoin d’ennemis. Combien de turpitudes
humaines, trop humaines, font les grandes affaires qui marquent
l’Histoire ?
Pourquoi la cavale ?
C’est l’un des arguments (sans valeur légale) qui revient souvent chez
les commentateurs : on ne fuit pas la Justice lorsqu’on est innocent.
S’ils lisaient le rapport de la FIDH de 1998 concernant les pratiques
de la Division nationale anti-terroriste (DNAT), notamment en Corse,
ils seraient probablement moins affirmatifs. Tous les abus révélés au
grand jour à l’occasion du procès en appel se trouvent dénoncés depuis
plus de dix ans dans les dizaines de pages de France : la porte ouverte
à l’arbitraire : les instructions à charge, les pressions sur les
témoins, les détentions "préventives" qui s’éternisent, les
"femmes-otages" qu’on utilise pour faire avouer n’importe quoi en garde
à vue, les multiples atteintes aux droits de la défense.
Je m’étonne à cet égard du silence de la gauche, et plus
particulièrement des mouvements altermondialistes ou d’extrême-gauche.
Ces derniers, effectivement, sont toujours prêts à scander
"Sarko=facho", à vilipender la guerre des Etats-Unis contre le
"terrorisme" ou à s’émouvoir du sort des prisonniers de Guantanamo.
Alors même que, toutes proportions gardées, les atteintes aux libertés
individuelles et les dérives qui peuvent survenir au nom de la lutte
contre le "terrorisme" existent en France depuis bien avant le 11
septembre 2001. Au lendemain du 6 février 1998, de nombreux insulaires,
qui n’avaient rien à voir de près ou de loin avec l’affaire Erignac,
sont passés dans les geôles de la DNAT ; certains ont fait des mois,
voire des années de "préventive", avant d’être libérés. J’attends
toujours que les bonnes âmes qui ont récemment appelé à une
manifestation de solidarité avec la Guadeloupe daignent se pencher sur
ce qui est en train de se passer à la cour d’assises spéciale de Paris.
Pourquoi l’Etat aurait-il intérêt à
faire condamner un innocent ?
Parce que les institutions, pour assurer leur crédibilité, peinent à
reconnaître leurs erreurs et ont besoin de sauver les apparences ;
quitte à sacrifier un individu. Or, les enquêteurs de la DNAT, les
magistrats de l’institution judiciaire ainsi que deux ministres de
l’Intérieur (Jean-Pierre Chevènement puis Nicolas Sarkozy), au mépris
de la présomption d’innocence, ont désigné Yvan Colonna comme étant
l’assassin du préfet Erignac. Revenir en arrière équivaudrait pour eux
à un camouflet. Pour l’institution médiatique également, qui a
massivement relayé le postulat de la culpabilité. Condamner Yvan
Colonna, qu’il soit coupable ou innocent, permettrait en outre à
l’appareil d’Etat d’entériner l’affront du 6 février 1998 en affirmant
qu’on ne défie pas impunément le pouvoir. Il s’agirait alors d’un rite
symbolique et expiatoire.
Peut-on rapprocher cette affaire de
l’affaire Dreyfus ?
Oui. Le spectre de la raison d’Etat n’est pas sans rappeler les mots de
Maurras au sujet de Dreyfus : "Qu’importe qu’il soit coupable ou
innocent ? L’intérêt de la Nation commande qu’il soit condamné !"
L’affaire Dreyfus s’est par ailleurs déroulée sur fond d’antisémitisme.
Or, lorsque Le Canard enchaîné titre Encore un procès bien corsé, ce
n’est finalement pas très éloigné de quelque chose qui ressemblerait à
Encore une histoire juive. Il y a un racisme anti-Corse, c’est-à-dire
une manière d’attribuer à toute une population un ensemble de
stéréotypes ou de travers. J’ai pu lire certains commentaires qui
disaient en substance : "Si ce n’est pas lui [Yvan Colonna], de toute
façon c’est un autre, ils [les Corses] n’ont qu’à se décider à parler."
Comme si la Corse entière était collectivement coupable de l’assassinat
du préfet Erignac. Comme si chaque insulaire était au courant (et
complice, bien sûr) des agissements de tous les autres. Lorsqu’un crime
a lieu à Paris, demande-t-on à chaque Parisien de se justifier et
d’assumer l’acte du criminel ?
Daniel Arnaud, philosophe et écrivain
Publié sur AgoraVox
Soirée de soutien à
Yvan Colonna
Le samedi 21 mars 2009, à partir de 19 h
Sous le marché couvert d’Ile Rousse
Avec A Filetta, Meridianu et l’Alba. Voir en page "agenda".
Les doutes d’un
citoyen...
Un très beau texte d’Yves Duteil :
Horrifié par l’assassinat de Claude Erignac, je partage la douleur des
siens et la révolte face à cette tragédie. mais sa mémoire ne saurait
se satisfaire de la condamnation d’un coupable de circonstance, s’il se
trouvait qu’il soit innocent.
Or, jour après jour, la procédure, d’escamotages en omissions, laisse
apparaître la construction d’une vérité sur mesures, fondée sur une
seule hypothèse et refusant d’explorer les pistes qui risqueraient de
la remettre en cause. Peu à peu le procès devient l’Affaire Colonna.
L’absence de preuve matérielle, l’expertise balistique qui le
disqualifie dans le rôle du tireur, les témoins directs qui ne le
reconnaissent pas, la rétractation de tous ceux qui l’avaient mis en
cause, le doute sur les conditions dans lesquelles leurs aveux avaient
été obtenus et leurs révélations sur la présence d’autres participants
à l’opération...
Tous ces éléments accumulés éclairent d’un jour nouveau le refus de la
reconstitution, les documents soustraits à la défense, les erreurs
d’interprétation des données téléphoniques lors du premier procès,
l’apparition du nom d’Yvan Colonna dans la procédure 6 mois avant
l’arrestation du commando, les écoutes téléphoniques dont la
transcription ne figure pas au dossier...
A l’inverse du but recherché, un faisceau d’éléments convergents rend
de plus en plus crédible l’hypothèse de son innocence et révèle en
filigrane le parti pris de l’accusation, qui semble redouter
l’expression de la vérité, même au prix de l’inacceptable, de
l’inéquitable.
Le doute fait son chemin dans le prétoire, le malaise atteint
l’opinion, les observateurs attentifs. Un verdict de culpabilité
paraîtrait aussi peu étayé qu’un château de cartes. Une condamnation "à
moitié" signerait l’embarras de la Cour devant cette gêne omniprésente.
Le calvaire de la famille Erignac, si digne et douloureuse, pourrait-il
être apaisé, dans ce contexte partial, par l’enfermement à perpétuité
d’un innocent plausible, désigné depuis le début comme présumé coupable
?
Yves Duteil
Le père d’Yvan Colonna
refuse de venir devant la cour d’assises
PARIS, 20 mars 2009 (AFP) - Le père d’Yvan Colonna a refusé de venir
témoigner vendredi devant la cour d’assises spéciale de Paris,
rejugeant son fils pour l’assassinat du préfet Claude Erignac, écrivant
dans un fax qu’il ne voulait pas "cautionner" un débat où "l’esprit de
vengeance remplace l’exigence de la vérité".
Jean-Hugues Colonna a adressé vendredi matin une télécopie au greffe de
la cour d’assises où il expliquait qu’il ne serait pas présent "au
motif d’une hospitalisation d’urgence à Marseille". "Quoiqu’il en soit,
je ne serais pas venu devant une cour spécialement composée pour
condamner et cautionner par ma présence un débat dans lequel l’esprit
de vengeance remplace l’exigence de la vérité", a ajouté M. Colonna
père.
Il a confirmé dans ce fax que le soir de l’assassinat du préfet Claude
Erignac, le 6 février 1998 à 21H00 à Ajaccio, il était "de 19H30 à 20H
environ en compagnie de (son) fils Yvan chez (sa) mère" à Cargèse
(Corse-du-Sud), ce qui rendait impossible la présence de l’accusé sur
les lieux de l’assassinat.
L’avocat général Christophe Teissier a estimé que ce fax ne faisait que
"confirmer le mépris affiché et voulu depuis le début de l’affaire" par
Yvan Colonna.
Un mépris partagé par de plus en plus d’observateurs...
"Le don d’ubiquité de Colonna n’émeut pas les assises"
Tel est le titre de l’article de Stéphane Durand-Souffland dans Le
Figaro du 18 mars dont voici quelques extraits :
Deux témoins, dont Jeanne Ferrandi, affirment avoir vu Yvan Colonna
dans deux endroits différents le lendemain du crime. En l’absence de
l’accusé et de sa défense, les contradictions entre témoins ne sont pas
relevées à l’audience. (...)
Arrêtée avec son ami en mai 1999, Valérie Dupuis, l’ex-compagne de
Didier Maranelli, avait introduit le nom d’Yvan Colonna dans la
procédure. (...)
à la fois franche et prudente, Mme Dupuis, qui a refait sa vie,
explique d’emblée qu’elle peut « dire des choses sur Didier Maranelli
mais rien sur Yvan. Je ne voudrais pas l’enfoncer parce que je ne sais
rien de cette histoire. On ne sait pas aujourd’hui s’il est innocent ou
coupable, et je ne peux pas dire si le fait qu’il soit venu chez moi, à
Cargèse, a un rapport ou pas avec ce procès ».
« Je l’ai vu une seule fois à la maison, c’était après les événements
», rappelle-t-elle. Invitée par le président à préciser la date de ce
conciliabule apparemment très bref entre MM. Colonna et Maranelli, le
témoin n’hésite pas : «Le 7 février, entre 9 heures et 10 heures du
matin ».
Comme la défense boycotte l’audience, personne ne pose à Mme Dupuis les
seules questions qui vaillent. Nul ne lui rappelle que Didier
Maranelli, à cette barre, a déclaré le 6 mars dernier qu’Yvan Colonna
n’était jamais venu à son domicile et qu’en tout état de cause, le 7
février 1998, il se trouvait non pas à Cargèse mais chez ses parents, à
Cristinacce.
Pas une voix ne pointe une faiblesse du dossier : selon la version
soutenue par l’accusation, Yvan Colonna se trouvait, ce 7 février au
matin, à Ajaccio, chez Alain Ferrandi, comme en attestent l’épouse de
celui-ci et celle de Pierre Alessandri. Une lecture linéaire du
dossier permet donc de démontrer que l’accusé - qui fut le premier à
s’en étonner après son arrestation - jouissait d’un prodigieux don
d’ubiquité, se trouvant simultanément en deux endroits distants d’une
cinquantaine de kilomètres.
On en vient à se demander s’il n’aurait pas mieux valu lancer
immédiatement les plaidoiries des parties civiles et le réquisitoire,
plutôt que de faire mine de s’intéresser à des dépositions qui, en
l’absence de débat contradictoire, n’ont pour ainsi dire aucun sens.
« Un procès sans défense, ce n’est rien d’autre que la validation
faussement critique d’une thèse écrite à l’instruction, avec l’alibi
tendancieux d’une oralité unijambiste. Il est plus que temps d’en finir
avec cet appel mort-né », conclut le journaliste.
Combien d’hommes dans le commando ?
Est-ce un tournant dans le procès ? La juge Laurence LeVert a été, avec
Jean-Louis Bruguière, l’un des trois juges d’instruction chargés du
dossier.
Mercredi 18 mars, Laurence LeVert a admis qu’il n’y avait que deux
hommes sur les lieux de l’assassinat du préfet Erignac, et non pas
trois comme elle le soutenait avec l’acte d’accusation.
Voici Yvan Colonna, censé être le troisième homme du commando,exclu de
la scène du crime. Du coup la construction bâtie par le parquet
s’effondre.
Autre déposition intéressante, celle du juge Gilbert Thiel qui a
expliqué pendant trois heures les "complots" qu’il a dû affronter au
cours de cette enquête hors norme :
Le complot des nationalistes, le complot des assassins, le complot des
gendarmes de la Section de recherche d’Ajaccio, le complot de la PJ
d’Ajaccio, obsédée par la « piste agricole », les complots ourdis par
le préfet Bonnet et par le patron de la DNAT, Roger Marion.
Et Thiel rappelle avec insistance la profession de foi de l’accusé, le
23 juin 2003, lors de leur premier entretien après son arrestation : «
Je vous affirme que je ne fais plus partie du groupe des anonymes, que
je n’ai pas tué le préfet Erignac. Je sais qu’il était votre ami, je
vous le dis les yeux dans les yeux. »
Depuis, Yvan Colonna ne s’est jamais départi de cette position...
Les avocats d’Yvan
Colonna portent plainte
17/03/2009
Mes Gilles Simeoni, Antoine Sollacaro, Pascal Garbarini, et Patrick
Maisonneuve ont déposé plainte auprès du procureur de Paris contre les
juges antiterroristes Jean-Louis Bruguière, Laurence Le Vert et Gilbert
Thiel. Visant l’article 434 du code pénal, ils accusent les magistrats
de «destruction, soustraction, recel ou altération d’un document public
ou privé de nature à faciliter la découverte d’un crime ou d’un délit,
la recherche des preuves ou la condamnation des coupables». La peine
encourue par les intéressés, du fait de leur fonction, est de cinq ans
de prison et 75 000 d’amende.
Les avocats de M. Colonna reprochent aux juges d’instruction co-saisis
de l’enquête sur l’attaque de la gendarmerie de Pietrosella (6
septembre 1997) et de l’assassinat du préfet Erignac (6 février 1998)
dossiers distincts qui ont été joints par le président de la première
cour d’assises, d’avoir délibérément écarté des écoutes téléphoniques
judiciaires de la procédure. Ces écoutes réalisées entre décembre 1998
et mai 1999 ont, notamment, surpris des conversations entre Alain
Ferrandi et la famille Colonna.
Ce n’est que sur la retranscription des auditions réalisées par une
commission d’enquête parlementaire sur la Corse mise en place en 1999
après «l’affaire des paillotes» que les avocats ont trouvé trace de ces
écoutes.
Pour la défense, ces éléments ont été sciemment occultés parce qu’ils
sont à décharge. Le 5 mars, les avocats ont demandé au président Didier
Wacogne de verser les pièces manquantes au dossier. Cela n’a été fait
que le 12, au lendemain du départ de l’accusé et de ses avocats...
Intervention
d’Edmond Simeoni devant l’Assemblée de Corse
Le procès Colonna a été évoqué à l’Assemblée de Corse : dans une motion
présentée le 16 mars par Edmond Simeoni au nom du PNC-Chjama (et
rejetée sans débat par l’Assemblée) , il a été demandé au Garde des
Sceaux de "mettre tout en œuvre pour que le procès en appel d’Yvan
Colonna bénéficie de toutes les garanties quant à l’application du
droit à l’équité judiciaire conformément à l’article 6 de la convention
européenne des droits de l’homme et de veiller au respect le plus
strict des fondements et des grands principes de la justice."
11/03/09
"Le jeu judiciaire est truqué" selon Me Garbarini
Interview d’un des avocats d’Yvan Colonna publiée dans "Le Nouvel
Observateur".
La décision d’Yvan Colonna de quitter le procès a pu être jugée comme
une "fuite", un "aveu" de sa culpabilité…
- La décision d’Yvan Colonna a été provoquée par la déloyauté de la
cour d’assises. Il n’avait aucun intérêt à quitter le procès, mais il
refuse de jouer le jeu judiciaire car il est truqué. Il ne veut pas
participer à une truquerie. Les droits de la défense sont violés de
manière flagrante alors qu’il encourt la peine maximale. Il n’avait pas
d’autre choix que de quitter le procès.
Quand la cour d’assises respectera les principes érigés par le code
pénal, les peines vont être prononcées et les accusés resteront.
Quitter le procès est un droit pour l’accusé et c’est un devoir pour
ses avocats de le suivre.
Ne craignez-vous pas que les nombreux coups d’éclats de la défense
finissent par lasser jusqu’à l’opinion publique et finalement nuisent à
votre ancien client ?
- C’est l’inverse ! L’opinion publique s’est posé la question suivante
lors du premier procès Colonna : "Sera-t-il condamné à la réclusion
criminelle à perpétuité ou moins?", tellement son statut de coupable
avait été présenté. Lorsque le procès s’est fini, le 14 décembre 2007,
l’opinion a pensé : "Cet homme a été condamné au bénéfice du doute".
Aujourd’hui pour le public, ce procès est une mascarade, inacceptable
dans notre démocratie, car il y a déloyauté et partialité. L’opinion
publique est scandalisée, elle se dit que l’on est en train de
fabriquer un coupable.
Est-il encore possible d’assister à un procès qui se déroulerait dans
de bonnes conditions?
- Comme vous le savez, il y aura un troisième procès lorsque la Cour de
cassation et la Cour européenne des droits de l’homme seront saisis. La
France va être condamnée et il y aura un nouveau procès. Pour qu’il n’y
ait pas d’incidents, il faudrait que les magistrats et le président de
la cour d’assises respectent ses prérogatives et ses fonctions. Qu’ils
soient indépendants et ne se conforment pas au statut de coupable livré
par l’accusation. Et enfin, qu’ils soient respectueux des droits de la
défense.
Au premier procès, présidé par Dominique Coujard, Yvan Colonna a été
condamné et cela n’avait provoqué aucun incident. Lorsqu’un président
est loyal, le procès de la cour d’assises peut aller à son terme.
Interview de Me Pascal Garbarini par
Marine Thomas
Les bizarreries d’un procès atypique
Fin décembre 2008, Didier Vinolas, ex-secrétaire général de la
préfecture de la Région Corse et, à ce titre, proche collaborateur de
Claude Erignac, écrit au parquet général. Ce n’est que fin janvier
2009, à onze jours de l’ouverture des débats, que ce courrier est
transmis au président Wacogne qui en reçoit par ailleurs un double de
M. Vinolas, sans diffuser l’information, alors que celle-ci aurait dû
être portée à la connaissance de la défense et de la partie civile...
Le 24 février on apprend qu’un policier, témoin capital de l’affaire, a
envoyé un certificat médical au président, annonçant qu’il n’est pas en
état de déposer. Vérification faite, il apparaît que le certificat est
du 4 février, le courrier du 6 et qu’il a été réceptionné par le greffe
des assises le 9 février, jour de l’ouverture des débats... Deux
"cachoteries" pour le moins bizarres ...
Le comportement du président est jugé "étrange" par nombre
d’observateurs : tantôt il interroge longuement un témoin qui n’a
manifestement rien à dire, tantôt il ne pose aucune question précise à
la jeune femme qui a dévisagé le tueur. Lorsqu’il interroge Pierre
Alessandri, il lui coupe l aparole sans arrêt lorsque ce membre
important du commando vient proposer un scénario inédit de l’assassinat
du préfet, impliquant d’autres individus - qu’il refuse d’identifier -
toujours en liberté. Et quand Alessandri déclare : «J’ai des reproches
à faire à Yvan. Quand j’ai décidé de franchir le pas de la violence
clandestine, j’ai espéré qu’il ferait partie de notre groupe. Ce que je
lui reproche, c’est ça: d’avoir laissé Didier Maranelli et Martin
Ottaviani monter au charbon alors que c’est lui qui aurait dû le faire,
pour être cohérent avec son discours.», déclarations capitales pour la
compréhension des faits, le président ne demande rien à Alessandri !
Yvan Colonna était-il au courant des projets des « anonymes » ? A-t-il
abandonné ses amis au dernier moment, ou avant, ou après ? Le
saura-t-on un jour ?
Alors que tous les témoins oculaires innocentent Yvan Colonna,
qu’aucune preuve matérielle n’a été apportée contre Yvan Colonna, la
cour refuse d’organiser une reconstitution. Comment la manifestation de
la vérité pourrait-elle intervenir ? Le doute ne doit-il pas profiter à
l’accusé ?
Yvan Colonna et ses
avocats quittent le procès
Après avoir visionné dans la matinée les photos prises en 2007 lors
d’un transport sur les lieux du crime au premier procès, la cour a
repoussé la demande de reconstitution demandée une nouvelle fois par la
défense.
Les avocats de l’accusé s’appuyaient notamment sur les dépositions de
trois des membres du commando déjà condamnés, qui ont livré un nouveau
scénario du crime et affirmé que d’autres hommes jamais arrêtés y
avaient participé.
La défense voulait donc que soient convoqués les témoins oculaires, qui
disent pour la plupart ne pas reconnaître Colonna, les experts et les
membres du commando (Didier Maranelli et Pierre Alessandri avaient
accepté de venir.)
La cour a estimé qu’il serait "sans objet et inutile" de faire une
reconstitution, « aucun élément précis n’étant fourni à l’appui des
affirmations faisant état de la présence d’autres membres du groupe
encore inconnus. »
A cet instant, Yvan Colonna se lève dans son box et déclare : «Je
n’accepte pas cette décision. La reconstitution est primordiale et
importantissime. Mais vu que pour vous, Pierre Alessandri ment tout le
temps, il n’y a qu’un moment où il ne ment pas, c’est quand il m’accuse
d’être l’assassin. Dans ce cas, il y a trois hommes, Pierre Alessandri,
Alain Ferrandi et moi... Tous les témoins oculaires disent qu’il n’y a
que deux hommes. Même le préfet Marion dit qu’il y a deux hommes autour
du préfet. Mais vous ne voulez pas car ça va invalider sur le terrain
le scénario mis en place. Je vois bien que quoi qu’on dise, quoi qu’on
fasse, on n’avance pas, on balaye tout d’un revers de main, ça ne sert
à rien (...) Le commando ment, sauf quand c’est pour m’accuser moi. Si
vous vouliez la vérité, vous devriez aller sur place, mais vous ne
voulez pas parce que ça vous gène. Quant à ce procès, depuis le début,
j’ai une très grande défiance. Alors j’ai décidé de quitter ce procès,
je demande à mes avocats de partir, je les récuse. Je veux partir et
descendre à la souricière où ça sent la pisse...
Si vous voulez me condamner au nom de la raison d’Etat pour faire
plaisir à la famille Erignac, à Marion, Le Vert, Bruguière et Thiel et
tous ces salauds, ce sera sans moi. Je suis innocent. Moi je m’en
vais, je suis innocent », a-t-il ajouté, sous les applaudissements
d’une partie du public.
Ses cinq avocats ont indiqué qu’ils le suivaient dans son refus de
participer au procès.
Aussitôt, le président commet d’office les avocats que l’accusé vient
de récuser. Mais ceux-ci refusent de continuer à le défendre dans ce
prétoire, quitte à «assumer le fait d’être poursuivi» comme le dit Me
Maisonneuve. « Je ne suis plus l’avocat d’Yvan Colonna » Me Sollacaro
ne veut pas «servir de potiche pour une décision prise d’avance». Son
collègue Gilles Siméoni déclare : «Je suis fier d’avoir été l’avocat
d’Yvan Colonna et je suis fier qu’il me demande de ne pas l’accompagner
au son des fifres et des tambours vers une condamnation à la prison à
vie. Je ne serai pas le commis de cette cour, je ne serai pas un alibi
judiciaire». Me Garbarini enchaîne : «Nous refusons d’être des alibis
judiciaires.»
Le président Wacogne annonce : «La cour va saisir le bâtonnier.» Me
Sollacaro répond : «Vous pouvez saisir le pape si vous voulez.»
L’audience est suspendue et le bâtonnier de Paris renonce finalement.
Ton tout différent du côté des parties civiles : "Ça ressemble à s’y
méprendre à un aveu de culpabilité. Quand on est innocent, on se bat
jusqu’au bout", dit à la presse Me Benoit Chabert, avocat de l’Etat
français, partie civile au procès.
Parlant pour la première fois à ce procès, la veuve du préfet,
Dominique Erignac, lisant un texte à la presse, s’est dite "choquée par
le manque de courage d’Yvan Colonna".
A la reprise de l’audience, le président somme l’accusé de venir
assister à l’audience. Devant le refus de ce dernier, il décide de
reprendre les débats. Il se trouvera confronté à la situation assez
inédite d’un procès sans accusé, ni défense...
Selon le porte-parole du parquet général de Paris, Didier Allard, « la
défense a fait le choix de quitter l’audience, c’est un choix qui lui
appartient. Mais en aucun cas la défense ne peut décider que le procès
se poursuive ou non, c’est une décision qui appartient à la seule cour
d’assises (...) Elle a les moyens juridiquement de poursuivre ce
procès, c’est en tout état de cause ce que demandera à la cour
d’assises le parquet général, dès que l’audience reprendra », a-t-il
expliqué.
Dans les couloirs, les avocats de la défense ont expliqué que leur
départ résultait d’une "décision d’Yvan Colonna". "C’est la conséquence
du scandale qu’on nous impose depuis un mois", a souligné Me Gilles
Simeoni. "Il ne peut pas par sa présence cautionner une justice indigne
d’une démocratie", a-t-il ajouté estimant que le peuple français, au
nom duquel est rendu la justice, "doit se senti trahi".
Un procès en appel sans accusé, voilà à quoi devrait ressembler le
procès Colonna dans les jours qui viennent. Situation problématique au
regard des règles européennes du procès équitable...
07/03/2009
Des membres du commando
non encore identifiés...
Au bout de quatre semaines de procès, la défense d’Yvan Colonna a fini
par obtenir des membres du commando un début d’explication : c’est
«pour protéger d’autres gens» qu’ils auraient «accepté» d’accuser Yvan
Colonna, le nom de celui-ci leur ayant été «soufflé» par
les policiers.
C’est d’abord Joseph Versini, condamné à quinze ans de prison pour la
seule attaque de la gendarmerie de Pietrosella : «Les policiers
m’ont soufflé le nom d’Yvan Colonna», «l’étanchéïté en garde à vue y en
avait pas», «fallait mettre sept noms dans le groupe». Quand l’avocat
général Kross lui fait remarquer qu’il a «bien été capable de dire que
Didier Maranelli n’était pas à Pietrosella mais de dire qu’Yvan Colonna
y était», Versini invoque des pressions policières: «Sur M. Colonna, le
forcing, il a été fait en garde à vue». Il a attendu les conseils de
son avocat avant de livrer le nom sur procès-verbal: «Mon avocat m’a
dit que c’était cuit, que les autres avaient avoué et m’a laissé
entendre d’aller dans le même sens».
Alors, il a donné les noms de ses comparses et les a maintenus jusqu’à
son procès en 2003. Me Siméoni l’aiguillonne et Versini finit par
lâcher: «Ne rien dire sur l’absence de Colonna sur les lieux permettait
de ne pas en cause d’autres personnes». Me Siméoni le supplie d’aller
plus loin en montrant du doigt Yvan Colonna: «Ne pouvez-vous nous en
dire plus pour sortir cet homme de prison?». Versini répond «Non».
Alors, Yvan Colonna se lève et s’en mêle, s’adresse en Corse à Joseph
Versini, puis en Français: «Alors on m’accuse à tort et toi tu ne dis
pas à ton avocat que j’y étais pas!». Versini, ennuyé: «Si si je l’ai
dit mais pas tout de suite». Colonna d’un ton dur: «Je veux bien moi,
le choc de l’incarcération des femmes mais moi je suis recherché, à
l’époque Marion (patron de la DNAT, ndlr) avait dit «Colonna mort ou
vif» et vous vous dites rien. Pourquoi ce silence pendant deux ou trois
ans?». Versini a compris: «Parce qu’y avait d’autres gens que nous sur
l’action, c’est peut-être pour les protéger». Colonna ne paraît qu’à
moitié satisfait du «peut-être» qu’il répète, déçu, avant de s’asseoir.
A son tour, Didier Maranelli, condamné à 20 ans de réclusion pour
l’assassinat du préfet Erignac, et premier du commando à passer aux
aveux, à donner six membres puis à les identifier explique qu’il
«a été contraint de rajouter un X et de mettre le nom d’Yvan Colonna
dessus. Donc toutes mes déclarations inhérentes à sa personne sont
totalement fausses (…) En tant que co-fondateur du groupe, je dis et je
maintiens qu’Yvan Colonna n’en faisait pas partie».
Didier Maranelli a refusé de participer à la reconstitution du crime à
Ajaccio «pour ne pas refaire l’action et parce que ça aurait fixé le
dossier et blanchi automatiquement Yvan Colonna, car comment placer
trois personnes sur le site alors qu’il n’y en avait que deux?». Me
Maisonneuve ne va pas manquer de s’en servir plus tard et d’obtenir de
Maranelli son accord pour une reconstitution que la défense réclame en
vain à la cour d’assises spéciale de Paris: «Bien que mon rôle
n’apporte pas grand chose sur le meurtre lui-même, je suis prêt à
participer à une reconstitution si vous l’organisez», accepte donc le
«guetteur» du commando.
Mais Me Maisonneuve lui soumet les propos de Joseph Versini qui a
«évoqué des membres du groupe non-identifiés et dit avoir cité le nom
d’Yvan Colonna pour éviter de parler de leur présence» et Maranelli
répond qu’il ne veut pas s’exprimer. L’avocat insiste: «Sans vous
demander leur identité, dites nous si oui ou non s’il a pu exister
d’autres personnes non-identifiées et si parler d’Yvan Colonna
permettait de ne pas les évoquer». Après un long silence, Didier
Maranelli lâche: «C’est exact»...
Procès Colonna : le
scénario du crime contesté
04/03/2009
Les avocats d’Yvan Colonna ont mis en avant deux arguments de taille.
D’une part, ils ont fait admettre au commissaire de la division
antiterroriste (DNAT) Philippe Frizon que des écoutes téléphoniques
judiciaires impliquant Alain Ferrandi et des membres de la famille
Colonna, dont Yvan, réalisées entre décembre 1998 et mai 1999, ne
figurent pas à la procédure.
L’un des membres du commando, Alain Ferrandi, condamné en 2003, avait
été placé sur écoutes à partir du 8 décembre 1998, à la suite de
renseignements parvenus à Philippe Frizon. Ces écoutes "ont fait
apparaître des conversations" entre Alain Ferrandi, Yvan Colonna ainsi
que le père et le frère de celui-ci, a reconnu le policier en réponse à
une question de Me Gilles Simeoni.
"Pourquoi ces écoutes judiciaires ne sont-elles pas au dossier ?
Pourquoi attend-on aujourd’hui pour apprendre leur existence ?", a
demandé Me Simeoni.
"Je l’ignore, il faut poser la question au magistrat instructeur", a
répondu le commissaire Frizon. Il a ajouté que si ces écoutes "avaient
mis en lumière des éléments intéressants" à propos d’Yvan Colonna,
"(il) s’en souviendrait".
Cet escamotage d’éléments importants donne du poids à la thèse de la
défense selon laquelle le nom d’Yvan Colonna aurait pu être "soufflé"
aux membres du commando au moment de leur garde à vue en mai 1999.
D’autre part, les membres du commando ont été confondus par l’étude
minutieuse de la téléphonie : les enquêteurs ont pu positionner leurs
portables au moment de l’assassinat du préfet érignac, commis le 6
février 1998 vers 21 heures.
Selon eux, Didier Maranelli se trouvait devant la préfecture, chargé de
signaler le départ de la victime à Alain Ferrandi, posté, avec Pierre
Alessandri et Yvan Colonna, à proximité du théâtre où se rendait M.
érignac. M. Frizon l’affirme : les trois hommes étaient constamment en
contact visuel. Pour le reste, M. Alessandri a livré un scénario validé
par la DNAT : Yvan Colonna a fait feu, lui-même étant en couverture. Le
trio avait pris position vers 20 heures, croyant que le spectacle
commençait à 20 h 30 ; il débutait en réalité à 21 heures.
Or, Me Gilles Simeoni, reprenant les pièces exploitées par la DNAT,
démontre qu’à 20 h 16, Didier Maranelli appelle Alain Ferrandi,
activant la borne-relais de la Punta, qui couvre la zone de l’aéroport
d’Ajaccio où travaille M. Ferrandi. Les deux hommes, chacun dans un
véhicule distinct d’après les explications de M. Maranelli au juge,
s’apprêtaient à rejoindre le centre-ville, à un bon quart d’heure de
voiture. Cette localisation, à cet horaire, est incompatible avec le
scénario Alessandri.
Ensuite, à 20 h 43, M. Ferrandi est localisé près de la préfecture,
soit à 1,5 km des lieux du crime, les deux endroits étant couverts par
deux bornes-relais différentes. Certes, il est trahi par son portable
dans le secteur correspondant à la rue Colonel-Colonna-d’Ornano à 20 h
50, mais ce trajet est également, en contradiction flagrante avec le
scénario Alessandri.
Cela semble démontrer que les membres du commando ont menti aux
enquêteurs. Dès lors, la vérité sur la mort du préfet érignac n’est pas
connue à ce jour...
Que reste-t-il alors de solide dans cette enquête ?
Procès
Colonna : il n’y aura pas de reconstitution
03/03/2009 - La défense jugeait la reconstitution indispensable pour
faire la lumière sur les faits. La reconstitution du crime devait
notamment permettre de trancher entre la thèse de l’accusation, qui
parle d’un groupe de trois hommes, et les témoins oculaires, qui pour
la plupart n’en ont vu que deux. La présence des personnes déjà
condamnées, des témoins oculaires, des médecins légistes et des experts
en balistique aurait pu permettre de voir plus clair dans cette affaire
de plus en plus ténébreuse.
Le président de la cour d’assises spéciale de Paris, Didier Wacogne, en
a jugé autrement, estimant qu’«en l’état des débats», il ne voyait
aucun élément nouveau justifiant l’organisation de la reconstitution de
l’assassinat du préfet de Corse Claude Erignac à Ajaccio.
«La confiance était déjà bien entamée, mais là, il n’y pas plus de
confiance du tout», a déclaré Me Garbarini à l’attention du président
de cette cour décidément très spéciale...
Procès
Colonna : le récit troublant d’un ancien policier
LE MONDE - 03.03.09
Jean-Pierre Colombani, 55 ans, a des cheveux blancs, la mémoire qui
flanche et l’audition défectueuse. Lundi 2 mars, avant de jurer de
"dire la vérité, toute la vérité", il préfère en informer le président
Didier Wacogne. Ce policier des renseignements généraux d’Ajaccio,
aujourd’hui en retraite, n’a rien à dire à la cour d’assises spéciale
qui juge Yvan Colonna pour l’assassinat, le 6 février 1998, du préfet
Claude Erignac. D’ailleurs, à l’instant où il se plante devant la barre
bras croisés sur la poitrine, il "ne comprend pas ce qu’il fait là".
Tout juste s’estime-t-il en mesure de confirmer ce qu’il avait déclaré
sous serment devant une commission d’enquête sénatoriale en octobre
1999. Aussi lorsque Me Gilles Simeoni, l’un des avocats de l’accusé,
vérifie qu’il a bien indiqué aux représentants du Sénat, qu’en
"décembre 1998, il y avait des policiers des renseignements généraux
qui pensaient qu’Yvan Colonna était l’assassin", il ne trouve rien à
redire.
Décembre 1998 ? Soit cinq mois avant l’interpellation, le 20 mai 1999,
du commando et la fuite d’Yvan Colonna, le 24 mai. Cinq mois avant les
aveux de Didier Maranelli, le premier à mettre en cause le berger de
Cargèse. Or, policiers, magistrats instructeurs et ministère public
affirment que le nom d’Yvan Colonna n’est apparu qu’à ce moment-là,
pendant la garde à vue des membres du commando et de leurs épouses,
entre les 20 et 23 mai 1999. Jusqu’à cet épisode, le nom du berger de
Cargèse ne figurait nulle part.
Entendu dans la matinée, l’ancien préfet Bernard Bonnet l’a répété. Les
renseignements qu’il avait obtenus à partir de juillet 1998 et dont il
avait révélé la teneur au procureur de la République de Paris
Jean-Pierre Dintilhac en décembre 1998, ne faisaient pas état d’Yvan
Colonna. "Je n’ai jamais évoqué le nom d’Yvan Colonna", a-t-il
insisté. Son informateur secret, le mystérieux Corte, dont il continue
à taire l’identité, lui avait livré des noms dont celui d’Alain
Ferrandi, le chef du "commando Erignac", mais jamais celui d’Yvan
Colonna.
Une seule fois, en novembre 1998, les gendarmes qui filaient Alain
Ferrandi, avait évoqué un Colonna. Mais il s’agissait de Stéphane, le
frère cadet d’Yvan, lequel n’a jamais fait l’objet de poursuite. Ce
n’est qu’aujourd’hui, en 2009, que l’ancien préfet considère que "des
éléments convergents font penser que l’implication d’Yvan Colonna est
crédible".
Soupçonné d’avoir été l’un des chefs du FLNC du secteur Sagone-Cargèse
(Corse du sud) au début des années 1990, Yvan Colonna avait été placé
sur écoute après l’assassinat du préfet. "Nous savions que Ferrandi,
Maranelli et Colonna étaient des amis proches", a précisé M. Colombani.
Pour les avocats du nationaliste corse qui défendent depuis juillet
2003 - date de la première comparution de leur client devant la juge
Laurence Le Vert -, la thèse qu’Yvan Colonna n’a pas été dénoncée
spontanément, mais après que les policiers ont suscité son nom, la
déposition de l’ancien policier tombe on ne peut mieux.
L’accusé, d’ordinaire plutôt silencieux, ne s’y est pas trompé. «
On s’aperçoit que mon nom était déjà cité dès décembre 1998. Cela veut
dire que Le Vert et Thiel [les juges d’instruction] ont menti. Cela
veut dire que mon nom est apparu bien avant le 22 mai 1999. Qui l’a
introduit ? Pourquoi et comment ? » s’est-il exclamé avant de lancer au
président Wacogne : « Cela ne vous interpelle pas, ce témoignage ? »
Yves Bordenave
Nouvel
incident au procès d’Yvan Colonna
(28/02/2009)
Alors que les juges ont estimé que les deux suspects, Erick A. et
Michel A. cités par Didier Vinolas sont déjà apparus dans la procédure
et n’apportent "rien de nouveau", la défense entend exploiter les
contradictions flagrantes apparues entre les déclarations de Didier
Vinolas, de l’ex-procureur Yves Bot et d’un ancien policier des
Renseignements généraux, Michel Poirson, qui a contesté à la fois être
l’informateur de M. Vinolas et avoir rencontré M. Bot en 2002.
L’un des avocats d’Yvan Colonna, Patrick Maisonneuve, a fait état d’une
"accumulation d’éléments qui pose un véritable problème". La semaine
prochaine sera décisive avec l’audition des policiers antiterroristes,
qui ont enquêté sur l’assassinat du préfet Erignac. Pour l’heure, aucun
des témoins oculaires entendus à l’audience n’a reconnu l’accusé comme
l’un des deux agresseurs. Certains témoins, déjà entendus en 2007, ont
même été catégoriques, comme lors du premier procès.
Ce vendredi 27 février, un nouvel incident a opposé la défense au
président de la cour d’assises spéciale, Didier Wacogne, au sujet du
certificat médical produit par Georges Lebbos, un des principaux
témoins.
Le policier Georges Lebbos, ancien membre de la Division nationale
anti-terroriste (DNAT), a mené une partie des gardes à vue des membres
du commando arrêtés en 1999 et avait obtenu leurs aveux.
Or les autres procès de l’affaire ont montré que ce policier
antiterroriste avait commis de nombreuses irrégularités au cours de
l’enquête, et la défense comptait bien sur une confrontation entre
Colonna et Lebbos :
Georges Lebbos est le signataire d’un procès-verbal de police antidaté,
mis au jour au deuxième procès de l’affaire en 2005 et qui impliquait
dans le dossier Vincent Andriuzzi et Jean Castela, initialement
condamnés à 30 ans de réclusion puis acquittés en appel. Il est aussi
apparu que ce policier a utilisé une commission rogatoire concernant la
recherche d’Yvan Colonna - délégation de pouvoir d’un juge
d’instruction - pour avoir recours à des moyens coercitifs afin de
tenter de retrouver son épouse volage. Selon la thèse de la défense, le
nom d’Yvan Colonna a été "soufflé" par cet enquêteur aux participants
déclarés de l’assassinat du préfet.
Didier Wacogne avait évoqué mardi, en révélant l’absence du témoin, que
Lebbos souffrait d’un état "anxio-dépressif sévère". Or le certificat
médical est daté du 4 février, soit cinq jours avant le début de
l’audience. Le président avait programmé son audition le 14 mars, date
jugée trop tardive par la défense. Pour les avocats, Lebbos ne voulait
tout simplement pas venir à la barre.
Les défenseurs d’Yvan Colonna ont reproché au président Wacogne de ne
leur avoir annoncé qu’au début de cette semaine l’existence de ce
certificat médical, le président affirmant de son côté n’avoir eu
connaissance du certificat que le 10 février.
La défense a jugé le président Didier Wacogne, "indigne de mener les
débats" et lui a demandé "de partir", provoquant une suspension de
l’audience.
Après la suspension, c’est Yvan Colonna lui-même qui a interpellé
Didier Wacogne: "J’ai vécu une semaine d’audience où j’ai cru que
j’étais sur une autre planète (...) Vous n’êtes pas impartial, je vous
le dis et je vous le répète, vous êtes en mission".
Une
enquête du "Monde" :
LE MONDE du 26.02.09
Il était le serviteur fidèle, le fonctionnaire irréprochable, le
collaborateur du préfet assassiné qui aida sa veuve à choisir le
costume du défunt. Mais, depuis le 13 février, Didier Vinolas, ancien
secrétaire général de la préfecture d’Ajaccio, est un réprouvé,
l’auteur de "pseudo-révélations" (dixit une journaliste), un témoin peu
fiable et "traumatisé" par la mort du préfet (selon un haut
fonctionnaire). Un "obscur ancien policier" qui veut "rester au centre
de l’affaire" (un magistrat).
Sa faute : avoir affirmé à la barre, devant la cour d’assises spéciale
de Paris, que des suspects "jamais inquiétés par la justice" étaient
peut-être impliqués dans l’attentat contre la gendarmerie de
Pietrosella, le 4 septembre 1997 - au cours de cet attentat a été
dérobée l’arme qui a servi à assassiner le préfet Claude Erignac, le 6
février 1998 à Ajaccio. Sous-entendu : Yvan Colonna, jugé en appel
depuis le 9 février après une condamnation en première instance, il y a
treize mois, ne devrait pas être seul dans le box des accusés. Onze ans
après les faits, l’enquête sur la mort du préfet reste inachevée.
Bancale, en tout cas.
Vinolas assure avoir vainement tenté de transmettre ses informations à
diverses autorités, dont l’ex-procureur de Paris Yves Bot, dès 2002.
Personne ne l’a pris au sérieux. "Des éléments périphériques de
l’enquête", a tranché Christian Lambert, ancien patron du RAID chargé
de la traque de Colonna, lors de son rappel devant la cour. Un ancien
policier des Renseignements généraux, également convoqué à la barre, a
nié avoir jamais rencontré Vinolas, qui l’avait pourtant présenté comme
l’un de ses informateurs.
A l’audience, ces "révélations" ont eu l’effet d’une bombe. D’autant
que Didier Vinolas assure avoir adressé deux courriers, en décembre
2008 puis en janvier, au président de la cour d’assises, Didier
Wacogne, offrant des éléments sur les deux fameux suspects. Mais le
président n’a pas décacheté les plis. D’où un tollé sur les bancs de la
défense et l’ouverture d’un supplément d’information exprès, bouclé en
soixante-douze heures, dernier avatar en date d’une affaire judiciaire
hors normes.
En première instance déjà, en novembre et décembre 2007, la cour
d’assises "spécialement composée" - seuls y siègent des magistrats
professionnels - avait eu à connaître de ces bizarreries qui encombrent
une procédure mal ficelée : un expert en balistique qui ne viendra
jamais témoigner ; un médecin légiste affirmant que le tireur était
plus grand que Colonna avant de se dédire à demi-mot; un ancien
officier de police de la DNAT (division nationale antiterroriste,
actuelle SDAT) poussé dans ses derniers retranchements, avouant à la
barre avoir soufflé le nom de Colonna pendant une garde à vue... Mais
ces éléments troublants n’avaient pas suffi à faire vaciller l’intime
conviction des sept magistrats : Yvan Colonna, 49 ans, avait été
condamné à une peine de réclusion criminelle à perpétuité - sans
période de sûreté - le 13 décembre 2007.
Pour les parties civiles et l’accusation, rien ne semble pouvoir
remettre en question les aveux du "commando Erignac", les mises en
cause circonstanciées et répétées contre Yvan Colonna et le rôle que la
justice lui a assigné le soir du 6 février 1998 : avoir logé trois
balles dans la tête du préfet Claude Erignac alors que le haut
fonctionnaire se rendait à un concert de musique classique. Mais, pour
la défense, les déclarations de Didier Vinolas, ajoutées à une longue
suite de tâtonnements policiers, constituent une preuve à décharge de
plus, dans un "dossier vide".
Les avocats des deux bords, les magistrats et les policiers chargés de
l’enquête conservent en mémoire la date du 22 février 2006. Ce jour-là,
après sept années de prison, Jean Castela et Vincent Andriuzzi,
présentés comme les commanditaires de l’assassinat du préfet et
condamnés à trente années de réclusion, en juillet 2003, sont acquittés
: leurs avocats sont parvenus à démontrer qu’une partie de l’accusation
reposait sur des procès-verbaux dont les dates ont été trafiquées.
S’ils restent condamnés pour des attentats remontant à 1994, leur mise
en liberté résonne comme le désaveu d’une enquête erratique, minée par
la sourde guerre que se sont livrés dix-huit mois durant policiers,
gendarmes et magistrats antiterroristes.
Quatre jours après le début des investigations, pourtant, le
commissaire Demetrius Dragacci, patron du SRPJ (service régional de
police judiciaire) d’Ajaccio, avait adressé à sa hiérarchie une note
aux conclusions sans appel : "L’assassinat du préfet Erignac est le
fait d’un groupe d’activistes clandestins dissidents de l’ex-FLNC canal
historique." Mais le commissaire sera mis à l’écart au profit de Roger
Marion, chef de la DNAT, alors que ses intuitions seront confirmées un
an et demi plus tard avec l’arrestation des membres du commando, tous
dissidents de la mouvance nationaliste.
Entre-temps seront successivement exploitées la piste agricole, celle
des "tueurs venus de Miami", des patrons de discothèques, des pompiers,
la piste du rachat de l’ancienne caserne Montlaur de Bonifacio, celle
du casino d’Ajaccio et des réseaux corses en Afrique : dès les premiers
jours qui suivent l’assassinat du préfet, l’enquête s’égare dans des
impasses, se nourrit de vieilles rumeurs et d’informations de seconde
main distillées par de troubles informateurs. Pour la seule année 1998,
selon les chiffres du ministère de l’intérieur, 364 personnes ont été
interpellées dans le cadre de l’enquête Erignac ; plus de 1 habitant de
l’île sur 1 000 - l’équivalent de 60 000 interpellations sur le
continent.
Prudents, les magistrats antiterroristes ont paré aux critiques en
usant d’un artifice douteux mais légal : l’ouverture de deux
informations judiciaires concurrentes. La première, inscrite au n°
1338, rassemble les éléments les plus saillants de l’enquête
judiciaire. La seconde, la n° 1337, sobrement baptisée "enquête
poubelle", sert de voiture-balai à l’instruction. Y échouent auditions
tangentes et commissions rogatoires sans espoir dans le cadre de la
"piste agricole". Depuis 1998, plusieurs personnes figurent encore dans
ces centaines de cotes, anciens militants nationalistes ou simples
syndicalistes agricoles, blanchis par l’enquête mais dont certains
attendent toujours une ordonnance de non-lieu.
L’irruption du préfet Bernard Bonnet, nommé en remplacement de Claude
Erignac, achèvera de compliquer le jeu des juges et des enquêteurs.
Arrivé dans l’île trois jours après l’assassinat de son prédécesseur,
le plus haut représentant de l’Etat en Corse veut mener sa propre
enquête, confiée aux gendarmes de sa garde prétorienne, le groupe de
pelotons de sécurité (GPS). Pendant des semaines, les militaires
travaillent sur des "objectifs" dont l’identité a été murmurée au
préfet Bonnet par un mystérieux informateur surnommé "Corte", au point
que gendarmes et policiers, qui ont eu vent de la même piste, finissent
par partager sans le savoir filatures et écoutes...
L’épopée des gendarmes d’élite partira en fumée dans l’incendie d’une
paillote, en avril 1999. Sur ordre "illégal" du préfet Bonnet,
enrageant de ne pouvoir obtenir la destruction d’un établissement sur
le domaine public maritime, les gendarmes incendieront le restaurant
Chez Francis en semant derrière eux indices et blessés. Un mois plus
tard, l’un d’eux confirmera devant l’inspection technique de la
gendarmerie nationale l’existence d’une enquête parallèle menée "hors
de tout cadre légal".
Le 21 mai 1999, en partie grâce aux informations collectées par le
préfet Bonnet, les services de police interpellent finalement les
membres du commando et leurs compagnes. Quarante-huit heures plus tard,
à 2 heures du matin, l’un d’eux, Didier Maranelli, craque et désigne un
berger de 39 ans, Yvan Colonna, comme le tireur. Cette mise en cause
sera confirmée par les aveux des conjurés et de leurs compagnes, mais
Colonna, lui, est introuvable, "parti aux chèvres" après avoir clamé
son innocence au cours d’une conférence de presse filmée par les
caméras de TF1. Envolé. En cavale.
Pendant plus de quatre années, le berger de Cargèse va se jouer des
policiers. On le signale au Venezuela, en Sardaigne, à la tête d’un
réseau de trafiquants de drogue marocain... Toutes les pistes sont
explorées : son arrestation est devenue un véritable enjeu pour Nicolas
Sarkozy, alors ministre de l’intérieur. Jusqu’à l’épilogue du 4 juillet
2003. Peu après 19 heures, alors que la Corse s’apprête à décider de
son avenir institutionnel à l’occasion d’un référendum voulu par
Nicolas Sarkozy, les hommes du RAID interpellent Yvan Colonna dans la
bergerie de Monti Barbatu, près de Propriano (Corse-du-Sud). Presque
aussitôt, M. Sarkozy, en meeting à Carpentras (Vaucluse), annonce
publiquement - et sans précautions - l’arrestation de "l’assassin" du
préfet Erignac.
Cinq ans après ces accusations précipitées, bien des zones d’ombre
demeurent, compte tenu des rebondissements d’un procès déjà suspendu à
deux reprises, où apparaissent de nouveaux noms, où le président de la
cour d’assises ne lit pas le courrier qu’un témoin de premier plan lui
adresse, où un avocat des parties civiles reconnaît benoîtement que
d’autres membres du commando sont peut-être dans la nature...
Pour la troisième fois, depuis le box des parties civiles, la famille
Erignac ne peut opposer à ces errements qu’une souffrance résignée. Il
y a dix ans presque jour pour jour, les proches du préfet étaient
sortis de leur réserve pour fustiger le "remue-ménage entre policiers
et juges" et exhorter les "serviteurs de l’Etat" à unir leurs efforts
pour que se manifeste enfin la vérité. Mais cette vérité s’obstine à
fuir entre les doigts des magistrats de la cour d’assises de Paris.
Antoine Albertini
Article paru dans l’édition du 27.02.09
Au cours de la semaine dernière, la défense a marqué des points :
Le procureur Yves Bot a confirmé point par point la déposition du
commissaire Vinolas :
"En septembre 2002, au cours d’un repas, le commissaire Didier Vinolas
m’a indiqué qu’un Monsieur X souhaitait transmettre de graves
informations concernant Yvan Colonna. A condition qu’elles soient
reçues par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, ou par l’un
des membres de son cabinet. C’était un renseignement de police. Je l’ai
immédiatement communiqué au préfet Guéant, alors directeur de cabinet
de Sarkozy."
Ces déclarations interviennent alors que parquet et parties civiles
avaient tenté de déconsidérer le policier. Didier Vinolas a confirmé
détenir les noms de deux membres présumés du commando nationaliste à
l’origine du plasticage de Pietrosella et peut-être de l’assassinat du
préfet Erignac, qui n’auraient jamais été inquiétés. Ces noms, a-t-il
assuré, avaient été transmis notamment en 2002 à Yves Bot et en 2004 à
Christian Lambert, le chef du Raid.
Par ailleurs, aucun des trois témoins visuels du drame, Jean-Pierre
Versini, Joseph Colombani et Marie-Ange Contart n’ont identifié Yvan
Colonna comme le tireur. Présents sur les lieux de l’assassinat du
préfet, ils décrivent un homme plus grand que le berger de Cargèse.
Tous se souviennent de deux hommes plutôt grands - 1,80 m environ -,
quand le berger de Cargèse ne mesure que 1,72 m.
"Lorsque j’ai vu Yvan Colonna, je n’ai pas vu l’homme dont j’ai gardé
le souvenir en train d’assassiner le préfet érignac." C’est ce qu’a
affirmé à la barre mercredi 25 février Joseph Colombani, organisateur
de la soirée musicale où se rendait le préfet de Corse et ami de ce
dernier. Comme à l’instruction et au premier procès, Joseph Colombani a
réaffirmé que, d’après son souvenir, le meurtrier ne lui semblait pas
être Yvan Colonna, condamné à perpétuité en première instance en 2007.
Questionné par la défense, il précise qu’il n’a jamais été invité par
les enquêteurs à identifier les membres du commando définitivement
condamnés. Il précise aussi : «Je parle en conscience. Je suis un homme
libre, honnête, je dis ce dont je me souviens.»
Mlle Contart lui succède. Elle relate comment, passagère du véhicule
conduit par sa mère, elle entend des détonations. Arrivant au niveau de
la scène de crime, qui lui est dissimulée par d’autres voitures en
stationnement, elle voit un individu «tirer par terre» et manipuler son
arme : «Il est plus grand que moi - je mesure 1,75 m -, blond, avec des
yeux rapprochés et une barbe naissante.» Surtout, elle croise, pendant
quelques secondes, son regard : «J’ai posé mes yeux sur ses yeux, ça
m’a fait bizarre.» Ces yeux-là, elle ne les a jamais retrouvés dans le
box des assises.
Umbria è sulia
"Parolla
sbucinata" à Lupino
Coup de théâtre au
procès d’Yvan Colonna
Un coup de théâtre s’est produit vendredi soir au procès en appel
d’Yvan Colonna. Didier Vinolas, commissaire de police, ancien
secrétaire général de Claude Erignac à la préfecture d’Ajaccio, a
affirmé que deux hommes soupçonnés d’avoir participé à l’assassinat du
préfet, en 1998 à Ajaccio, étaient « peut-être » en liberté.
Vendredi, devant la cour d’assises spéciale, Didier Vinolas a affirmé
tenir « deux noms », qu’il a refusé de révéler, d’un mystérieux
informateur depuis septembre 2002, et les avoir transmis quelques jours
plus tard au procureur.
L’informateur, qu’il a baptisé « X », « une personne tout à fait
respectable », a ajouté Didier Vinolas, lui a présenté les deux hommes
« comme faisant partie de la sphère » à l’origine de l’attaque de la
gendarmerie de Pietrosella en septembre 1997, une des premières actions
du groupe nationaliste dit des « anonymes ». L’ancien collaborateur de
Claude Erignac a ajouté que l’ex sous-préfet de Corse Jacques Nodin
détenait depuis 2001 des informations nouvelles sur Pietrosella. « Il
souhaiterait être entendu », a-t-il précisé. Didier Vinolas a dit aussi
avoir transmis les noms de deux suspects en février 2004 à Christian
Lambert, ancien chef du RAID à l’origine de l’arrestation d’Yvan
Colonna et plus récemment à Charles-Antoine Erignac, le fils du préfet.
Les avocats de la défense sont d’autant plus indignés que Didier
Vinolas affirme avoir transmis cette information au procureur de la
République de Paris, Yves Bot, dès 2002, et au président de la cour
d’assises Didier Wacogne, ainsi qu’au procureur général Laurent Le
Mesle par lettre fin décembre 2008. Ni l’un ni l’autre ne semblent
avoir informé la défense ou la partie civile ! Visiblement embarrassé,
Laurent Le Mesle a tenté de se justifier en faisant valoir que "la
procédure devant la cour d’assises est orale" et que "le seul devoir du
parquet général, était de convoquer M. Vinolas pour qu’il puisse faire
à la barre, les déclarations qu’il souhaitait". "C’est ce qui a été
fait", conclut-il. Pour les parties civiles, le président n’avait pas
le droit de faire état de ce témoignage avant que M. Vinolas ne soit
venu déposer.
Dénonçant un "scandale d’Etat", les avocats d’Yvan Colonna ont annoncé
le dépôt lundi d’une plainte contre X pour "entrave à la manifestation
de la vérité". "Ce qui est grave, c’est que des policiers, des
magistrats, ont mis sous le coude des éléments à décharge pour Yvan
Colonna", a tonné l’un d’entre eux, Me Antoine Sollacaro. Un autre
avocat, Me Pascal Garbarini, a estimé que ce nouvel élément devait
"entraîner la remise en liberté d’Yvan Colonna".
Les avocats comptent également déposer une demande de supplément
d’information, susceptible de faire capoter le procès après seulement
une semaine. "Nous attendons d’ici lundi des justifications sur ce qui
s’est passé, sinon comment voudriez-vous que l’on continue de
participer à cette mascarade avec des magistrats faussaires?", a fait
valoir Me Sollacaro.
"On a décrété dès 1999, comme une vérité d’Etat officielle qu’Yvan
Colonna était nécessairement coupable et tous les éléments de nature à
prouver son innocence ont été systématiquement écartés ou détruits", a
dénoncé Me Gilles Simeoni lors d’une conférence de presse samedi
affirmant que Didier Vinolas, bras droit de M. Erignac en tant que
secrétaire général de la préfecture de Corse et commissaire
divisionnaire en détachement, était un "témoin particulièrement
crédible".
Sur la base des aveux passés en garde à vue en mai 1999, l’accusation a
en effet toujours retenu le scénario selon lequel le préfet avait été
victime d’un commando composé de six hommes: Yvan Colonna, que ses
complices présumés ont identifié comme le tireur, Pierre Alessandri et
Alain Ferrandi présents sur les lieux pour le couvrir, Martin Ottaviani
au volant de la voiture, Didier Maranelli en guetteur devant la
préfecture et Marcel Istria resté dans le hangar servant de base
arrière.
A ces six hommes se serait ajouté Joseph Versini pour l’attaque de la
gendarmerie de Pietrosella en septembre 1997 au cours de laquelle
l’arme ayant servi à tuer le préfet a été dérobée. C’est d’ailleurs de
deux personnes "faisant partie de la sphère" de Pietrosella, que M.
Vinolas a parlé vendredi soir indiquant détenir leurs noms d’un
informateur fiable qu’il a appelé X. C’est en partant de ce constat,
sachant que les deux actions ont été revendiquées par le même groupe,
que Didier Vinolas s’est dit "qu’il y a peut-être d’autres personnes
ayant participé à l’assassinat" qui n’ont jamais été arrêtées.
Le procès en appel d’Yvan Colonna
Je reproduis ici le texte signé de Sampiero sur Agora Vox.fr :
A l’heure où j’écris ces lignes, la Corse est sous la neige qui tombe à
gros flocons. Un temps qui favorise la mélancolie, le repli sur soi.
Bien au chaud sous la couette, monsieur tout le monde a des soucis en
ce début d ’année. La crise, le chômage, les prix qui continuent de
grimper, le froid qui ne fait pas oublier qu’il faut acheter du fuel ou
de gaz, toujours très cher ici. Pendant ce temps, un homme
est loin de chez lui depuis cinq ans et demi, à quoi s’ajoutent quatre
ans de cavale, terrible épreuve physique et morale. Du fond de sa
prison, et sur le banc des accusés, il clame son innocence. Pendant ce
temps , une famille éprouvée pleure une vie dérobée, et subit une
quatrième et pénible épreuve, à la recherche de la vérité.
Le drame qui se déroule paraît dérisoire, dans cette tourmente
existentielle où la gravité et la cadence des événements mondiaux
absorbent l’attention des gens. Et pourtant, ce qui se joue met en
cause non seulement l’avenir d’un homme, mais surtout deux principes
majeurs de notre société : l’indépendance de la justice et la
présomption d’innocence. Un homme de bien un préfet (que j’avais
approché et apprécié professionnellement) a perdu la vie uniquement du
fait de ses fonctions. le cas n’est pas unique. On a tué en France des
président, des ministres aussi parait-il.
Chaque fois, pour quel bénéfice ?
Le procès en appel a débuté et Yvan Colonna se trouve à nouveau face à
neuf magistrats de la cour d’appel spéciale, spécialement désignés (par
qui ?) présidée par Mr Didier Wacogne. Pourquoi une cour spéciale ? La
France n’aurait-elle pas confiance dans sa « justice ordinaire » ? Un
article sur ce sujet pourrait se résumer à une simple interrogation :
Yvan Colonna est-il l’assassin du Préfet Erignac ? Qui peut prétendre,
avec absolue certitude, avoir la réponse ? Malgré la certitude exprimée
par l’ex-ministre de l’intérieur devenu président de la République, des
avocats de la partie civile, notamment Maître Philippe Lemaire, ainsi
que celle de Madame Erignac, qui demande aujourd’hui que le prévenu
avoue « son crime », nombre de spécialistes, et une majeure partie de
l’opinion, avaient déjà exprimé de sérieux doutes quant à la
culpabilité de cet homme.
Puis reste l’homme de la rue :
Les « contre » avancent l’argument suprême :
- Il a fui !
Dans le contexte de l’époque, et compte tenu de ses idées politiques,
peut-être aussi des raisons qu’il est seul à connaître, l’homme a
peut-être pensé que même innocent, il avait de fortes chance de passer
de nombreuses années en prison. En tous cas une fuite ne peut être
considérée comme un aveu de culpabilité, suffisante pour justifier une
condamnation à perpétuité, le spectre de l’erreur judiciaire doit
obligatoirement se présenter à l’esprit.
- Ses « complices » ne l’ont pas dédouané par une prise de position
franche !
Là encore, le doute reste permis, et condamner sur ces seules deux
bases est périlleux.
- Son père s’est excusé auprès de la veuve :
Son père est un ex-député, homme de bien et d’honneur. Il n’a pas
encore communiqué avec son fils, la presse, la rumeur, le ministre lui
même dit que c’est l’assassin, il doit donc en être ainsi, voyons ! Il
le croit, et en homme d’honneur, il demande pardon à la veuve. C’est
une preuve ? Irréfutable ?
Les « pour » ont quantité d’arguments à avancer :
- La désignation officielle du coupable,ce qui met à mal la
présomption d’innocence.
Si cela était venu de l’homme de la rue, encore, mais d’un avocat de
métier, ministre de l’intérieur de surcroit, difficile d’invoquer le «
lapsus ».... - Une enquête sans reconstitution, ou des témoins
oculaires n’auraient pas été entendus ? ou écoutés suffisament ?
- Des « complices » qui ont pu subir des pressions,
- Des policiers et des juges qui , aux dires d’un avocat de la défense,
ont accumulé des dysfonctionnements, que Colonna était désigné coupable
avant même qu’il soit mis en cause pendant les gardes à vue... la liste
peut être longue.
Alors coupable ou pas ? Personnellement je ne saurais le dire dans
l’état actuel de ce je connais de cette affaire. En toute objectivité,
je souhaite que le coupable paie sa faute. le coupable ! et
personne d’autre. Quel qu’il soit, car si on a le moindre doute , alors
qu’un homme innocent fini sa vie sous les verrous, pendant que l’
assassin court les rue en se tordant de rire, cela ne peut pas être
pour la société un motif de satisfaction, et pour la famille du préfet
assassiné et sa veuve, un véritable motif d’apaisement.
Quand à « l’intime et absolue conviction « des avocats, n’oublions pas
que quand leur client a perdu son proçès, leurs certitudes étaient
érronées, et quand leur client a gagné, elles étaient fondées !
Pourtant ils étaient en possession exactement des mêmes éléments que
les juges qui ont tranché !
Pourvu donc que ce procès fasse enfin la lumière, mais gardons présent
à l’esprit, comme l’a souligné un des avocats, que se serait une faute
d’attendre de la défense qu’elle fasse la preuve de l’innocence de
l’accusé, alors que c’est l’accusation qui doit faire la preuve de sa
culpabilité.
Quelle que que soit l’issue, l’opinion et les parties en cause ne
pourront donc se déclarer satisfaites que si cette condition est
réunie. Si elle ne l’est pas, on peut se poser la question : Yvan
Colonna peut-il aujourd’hui, s’il s’avère être innocent, être acquitté
? Si oui, qui va payer les conséquences d’une vie volée : les
enquêteurs, les juges, les accusateurs, ou le contribuable ? et de
quelle façon ? De toute façon, outre la terrible occurrence qu’un homme
de bien a été définitivement privé de sa vie, celle de l’accusé, encore
présumé coupable, condamné ou pas, peut être d’ores et déjà considérée
comme étant irrémédiablement gâchée.
A lire également le rapport de la mission d’observation au 1er procès
mandatée par la Ligue Suisse des Droits de l’Homme.
Et aussi l’excellente bande dessinée relatant le procès.
Soutien à Abdellatif
Hedhli
Diverses associations, dont U Svegliu Calvese, le réseau Education sans
frontières et d’autres, se mobilisent contre la menace d’expulsion
d’Abdellatif Hedhli, boulanger de profession. Habitant Calvi depuis
1999, Monsieur Hedhli a toujours travaillé et s’est parfaitement
intégré à la vie calvaise.
Son dossier de régularisation est en cours d’instruction.
Malgré cela il devait être expulsé du territoire français demain jeudi
5 février 2009 à 8 heures.
04/02/2009 : Devant cette forte mobilisation, la mesure a été reportée.
Chjami è rispondi à
Pigna
Un reportage sur les animateurs de la revue Fora! :
http://www.kewego.fr/video/iLyROoaftKqI.phpl
5ème Université
Citoyenne de Corsica Diaspora
Vendredi 24 et samedi 25 juillet 2009 Corsica Diaspora et Amis de la
Corse organise à Corte sa 5ème Université Citoyenne : ‘’La Corse au
cœur de l’Euro-Méditerranée’’.
Corsica Diaspora a pour mission de soutenir le développement des
initiatives et des projets dans l’île et à l’extérieur en créant ou
sollicitant les réseaux de la diaspora et des amis de la Corse.
L’’’Université Citoyenne de Corsica Diaspora’’, ‘’la Journée Mondiale
de la Corse’’ et ‘’la Biennale des Cultures Euro-méditerranéennes’’,
sont autant d’évènements passerelles qui permettent à nos compatriotes,
nos amis, ici et ailleurs de se retrouver autour de projets qu’ils
portent, de réalisations concrètes communes, dans l’île et dans le
monde. Le matériau de base, solide, est le lien affectif inaltérable
qui enjambe les siècles, solidarise les générations et rattache les
Corses de manière indissoluble à leur terre.
Depuis 2004, Corsica Diaspora organise tous les ans, fin juillet, à
l’Université Pasquale Paoli, à Corte, cette rencontre importante. Le
choix de la date ne doit rien au hasard ; en effet, nous connaissons
tous et attendons le retour estival massif des Corses et amis de la
Corse qui vivent à l’extérieur de l’île. La période est propice aux
retrouvailles familiales, au renouvellement de ce bain affectif rituel,
rempli d’émotion partagée, qui est un bien précieux pour celles et ceux
qui, par obligation mais aussi parfois volontairement, ont leurs
activités professionnelles ailleurs.
Tables rondes et débats accueillerons des invités prestigieux et des
experts dans les domaines de l’Environnement et du développement
durable, de la Société de la connaissance, de la Culture et des
échanges en Méditerranée, des nouvelles technologies (et leur
utilisation dans le réseau), et des médias. Cette manifestation apporte
des éclairages sur des thématiques importantes pour l’île que
l’association développera dans le cadre de la Biennale des Cultures
Euro-méditerranéennes, que Corsica Diaspora co-organise à Marseille
(11, 12, 13 décembre 2009 – Parc Chanot).
Renseignements :
http://www.corsicadiaspora.com
Tempi
Fa
Tribbiera à Vallecalle
Une enquête du "Monde" :
Fièvre immobilière et risques affairistes en Corse
LE MONDE | 15.07.09
BASTIA CORRESPONDANT
En lettres bâtons, l'argumentaire commercial incite le futur acquéreur
à saisir les "possibilités de défiscalisation" et profiter sans plus
tarder de "T4 de standing" avec "vue sur parc arboré". Depuis quelques
mois, les imposants panneaux publicitaires aux couleurs criardes, qui
jalonnent les itinéraires touristiques corses, de Bastia à Calvi en
passant par Porto-Vecchio, donnent aux voies de communication
insulaires des allures de routes pavées d'or. Maisons individuelles,
appartements, pavillons de lotissements aux noms champêtres ou pompeux,
ont parfois trouvé preneurs avant même l'achèvement des travaux.
Certains de ces lots seront revendus par des propriétaires qui n'en
auront pas même poussé la porte. Avec une confortable plus-value à la
clé.
Difficile de connaître avec précision la surface totale de ces projets
immobiliers champignons.
Une certitude est toutefois inscrite dans les chiffres du ministère de
l'industrie : pour la seule année 2008, les délivrances de permis de
construire ont explosé : + 49,3 %. Longtemps préservée du béton, la
Corse se hérisse de flèches de grues et avance au son des claquements
métalliques des mâchoires de pelleteuses. Même les côtes paisibles du
Cap Corse, semées de minuscules villages de pêcheurs aux terrains
jusqu'ici peu convoités, sont gagnées par le tsunami immobilier et la
hausse du prix du mètre carré. D'après les chiffres parvenus aux deux
fédérations départementales du BTP, près de 50 % des résidences
édifiées dans la région de Porto-Vecchio (Corse-du-Sud) ont été
acquises par des "non résidents", notamment d'origine italienne.
Lancés au cours des quatre dernières années, ces programmes auraient
surtout bénéficié des différents dispositifs gouvernementaux destinés à
faciliter l'accession à la propriété (prêts à taux zéro, etc.). Reste
que ce brutal développement ne manque pas d'aiguiser l'appétit
d'acteurs moins institutionnels. Bon an mal an, une ou deux affaires de
racket viennent troubler la réalisation des profits d'un secteur qui
contribue à hauteur de 7 % au PIB local. Les affaires "sorties" par les
services de police ou de gendarmerie grâce aux rares témoignages de
victimes ne constituent que la partie émergée de l'iceberg.
ENGINS DE CHANTIER INCENDIéS
Pour s'en convaincre, il suffit de se pencher sur les statistiques des
services des deux préfectures de Corse pour constater combien la nature
des cibles de plasticages a changé. Palais de justice et gendarmeries,
symboles de "l'Etat français colonial" honni des indépendantistes
armés, constituent aujourd'hui la portion congrue. Ils ont été détrônés
par les entreprises de BTP et, fait nouveau, par les chantiers en cours.
Le 6 juin, à Alata (Corse-du-Sud), une résidence en construction est
soufflée par une charge explosive ; deux jours auparavant, c'est à
Lucciana, une grosse commune du sud de Bastia, qu'un immeuble en
construction était endommagé ; dix jours plus tôt, une maison en cours
d'achèvement à deux pas de la plage de Palombaggia, près de
Porto-Vecchio, avait été rasée.
Sur octobre et novembre 2008, quatorze engins de chantier appartenant à
plusieurs sociétés du BTP ont été incendiés à travers la Corse. En deux
ans, 57 attentats et tentatives ont visé des sociétés du secteur à
travers le territoire de l'île, jusqu'à de petits villages comme
Casalabriva (Corse-du-Sud), où la voiture d'un entrepreneur avait été
soufflée par une bombe en novembre. "Soyons honnêtes, tempère Jean-Marc
Cermolacce, entrepreneur et patron du Medef dans l'île, la situation
est beaucoup moins tendue qu'il y a dix ans. Il y aura toujours des
tensions commerciales exacerbées, mais nous ne sommes plus face aux
tentatives de prédation organisées des années passées."
Les services de sécurité ne partagent pas cet optimisme. Signe des
temps, les atteintes aux entreprises du BTP étaient auparavant
intégrées dans la statistique globale sur les attentats : "Elles sont
différenciées depuis 2006, explique un officier de gendarmerie. Oui, il
y a bien un phénomène, c'est certain. Restent à définir les mobiles...
et à persuader les victimes de coopérer." Dans un climat plombé par une
quarantaine d'assassinats en trois ans, dont treize pour les six
premiers mois de 2009, cette "coopération" reste toute théorique.
Si la fièvre immobilière est loin de suffire à expliquer la série de
règlements de compte qui a lieu dans l'île, les services d'enquête
regardent en direction des équipes de voyous locaux, visiblement
engagées, comme de véritables entreprises, dans une concurrence
effrénée pour profiter des retombées de la manne immobilière et
touristique. Paul-Marie Romani, professeur d'économie à l'université de
Corse, s'inquiète "non de l'abondance des projets mais des gens qui
sont derrière. D'anciens projets ressortent des cartons, de grands
groupes financiers reviennent, et on se retrouve dans la même situation
qu'avant Aleria". Aleria est ce bourg de la côte orientale où Edmond
Simeoni, alors jeune médecin bastiais, avait donné le coup d'envoi de
la revendication nationaliste en occupant une cave viticole, fusil de
chasse au poing. A l'époque, les premiers autonomistes dénonçaient les
liens entre spéculation immobilière et affairisme. C'était en août 1975.
Antoine Albertini
Article paru dans l'édition du 16.07.09
Polémique au Festival
de Cannes
Extrait de l'article de Corse Matin daté du 18 mai 2009
Lorsqu'à la sortie d'un film vous entendez des spectateurs déclarer
haut et fort
« Les Corses ne sont vraiment que des brutes sanguinaires », avouez
qu'un certain malaise peut vous saisir imparablement.
C'est ce qui s'est produit ce dernier week-end après la projection du
film de Jacques Audiard, Un prophète, qui, excusez du peu, représente
la France dans la compétition officielle du Festival de Cannes.
Ce long-métrage qui, durant 2 h 30, vous plonge dans un terrible
univers carcéral où des nationalistes corses comparés à des voyous sans
foi ni loi font régner la terreur, a suscité une vive polémique sur la
Croisette.
René Viale, le président du Festival du cinéma italien de Bastia, s'est
déclaré « très choqué par ce film qui, une fois encore, donne une
déplorable image de la Corse et des Corses ».
« Même s'il s'agit d'une fiction, je trouve intolérable ce côté
réducteur qui fait passer les insulaires pour des assassins avides de
sang et de pouvoir, racistes et désormais esclavagistes. Comme le
festival de Cannes a une portée internationale, que va-t-on penser de
nous dans le monde entier ? Il faut arrêter de sacrifier la Corse sur
l'autel du septième art. La série télévisée de Canal +, Mafiosa, avait
déjà déchaîné les passions par des scènes violentes et totalement
gratuites. Là, c'est encore pire, car dans le film de Jacques Audiard
l'hémoglobine coule à flots à cause des Corses, bien sûr ».
Un prophète a été tourné cet hiver à Gennevilliers dans un décor de
prison superbement reconstitué. Sa distribution officielle est prévue
pour le 26 août.
L'histoire raconte le parcours initiatique d'un jeune maghrébin qui,
suite à son incarcération, tombe sous la coupe d'un groupe de
prisonniers corses dont il devient l'esclave. Un vieux truand insulaire
du nom de César Lucciani lui donne alors l'ordre de tuer une « balance
» puis d'assurer des missions de plus en plus violentes, à l'intérieur
et à l'extérieur de la prison lorsqu'il sort en permission. Mais, très
rusé, le jeune Malik utilisera toute son intelligence pour développer
discrètement son propre réseau afin de se venger.
Certaines séquences sont véritablement insoutenables. Et le clan des
voyous corses est toujours là quand la violence atteint son paroxysme.
Plusieurs acteurs corses
Jacques Audiard qui, rappelons-le, est le fils du célèbre scénariste
Michel Audiard, et le réalisateur du film aux six Césars De battre mon
coeur s'est arrêté, a souhaité jouer « la carte identitaire ». C'est
pour cela qu'il a donc choisi de mettre en exergue des Corses dans son
film. Mais, selon nous, sa décision ne tient pas car il aurait pu alors
y intégrer des gitans ou des basques. Selon René Viale, « s'il a décidé
que les Corses seraient les brutes de service de son film, c'est parce
que la Corse est aujourd'hui à la mode et que tous les faits-divers qui
défrayent la chronique judiciaire insulaire sont très vendeurs ».
Ce qu'il faut également remarquer est que dans ce film, l'avocat
insulaire du vieux truand joué par Niels Arestrup, est bien entendu
malhonnête : on n'en est plus à un excès près !
Il faut noter aussi que plusieurs comédiens insulaires tiennent un rôle
dans Un prophète. On retrouve notamment Jean-Emmanuel Pagni,
Jean-Philippe Ricci, Pierre Leccia qui a écrit le scénario de Mafiosa,
et Frédéric Graziani qui a réalisé il y a quelques années à Bastia Le
cadeau d'Elena. Ils sont tous remarquables dans la peau de leurs
personnages respectifs. De fait, beaucoup de festivaliers se sont
étonnés de ne pas les voir lors de la traditionnelle conférence de
presse cannoise.
Ambiguïté malsaine
Président de la cinémathèque de Corse, Dominique Landron, estime pour
sa part que « ce film est réussi d'un point de vue purement
cinématographique ». Selon lui, « depuis Le Trou de Jacques Becker, on
n'avait pas fait mieux sur l'univers carcéral ». Il pense également
qu'il « faut prendre Un prophète pour ce qu'il est, à savoir une oeuvre
fictionnelle et pas un documentaire.
« Il ne faut pas retirer à un créateur son pouvoir de création,
précise-t-il. Toutefois, je regrette amèrement deux choses.
« La première est une erreur historique, en l'occurrence faire croire
au public que le rapprochement des prisonniers politiques corses a été
accepté par Nicolas Sarkozy et que, de ce fait, les détenus peuvent
désormais regagner la prison de Borgo et quitter les prisons
continentales en chantant le Dio vi salvi Regina, comme c'est le cas
dans le film.
« Le second point qui m'a vraiment interpellé est que le réalisateur a
créé un véritable amalgame entre les nationalistes et les voyous. »
Dans son film, qui est souvent parlé corse avec des sous-titres
français, Jacques Audiard laisse en effet planer une ambiguïté malsaine.
Jean-Baptiste Croce
Bientôt un lieu de
culture pour Calvi !
Sylvain Ettori sur Ci
Simu !
Source : Ci Simu avril/mai 2009 (article supprimé à la demande de l'IRCA)
Le pesant silence du
Parti socialiste sur le procès Colonna
Le journal réunionnais
Témoignages
publiait le lundi 6 avril 2009 un article sous ce titre.
Le procès en appel d’Yvan Colonna, accusé d’être l’assassin du préfet
Erignac, s’est déroulé devant un tribunal d’exception, une Cour
d’assises composée uniquement de magistrats professionnels nommés par
le pouvoir.
Bien qu’il n’intègre en son sein aucun jury populaire, ce tribunal très
spécial héritier direct de la cour de sûreté de l’Etat (abolie,
rappelons-le, par un ministre socialiste), est censé, paradoxalement,
rendre la justice au nom du peuple français.
Il a condamné en appel Yvan Colonna, citoyen français, à la réclusion à
perpétuité assortie d’une peine de sureté de 22 ans, la peine la plus
lourde de notre code pénal et "réservée" d’ordinaire aux tueurs en
série.
Cette sentence a été rendue sur la seule foi des accusations des
membres du commando ayant avoué avoir assassiné le préfet, puisqu’il
n’existe aucune preuve matérielle contre Colonna et que les dépositions
des témoins directs du crime l’innocentent.
Ce tribunal d’exception, qui n’a donc pas été capable de prouver les
responsabilités exactes de Colonna dans cette affaire lui a toutefois
attribué le rôle du tireur, et a condamné cet homme à la peine maximale
sur la base de son "intime conviction".
Pour bon nombre d’observateurs français et étrangers bon connaisseurs
du dossier (dont la Fédération internationale des Droits de l’Homme),
ce procès a été mené uniquement à charge contre l’accusé, le doute qui
doit bénéficier à tout citoyen de notre pays n’ayant à aucun instant
été pris en compte par cette cour de magistrats pour rendre sa sentence.
Le procès en appel, tout comme l’instruction, a été entaché de graves
atteintes au droit ainsi qu’au au déroulement serein de la justice. (…)
Sans parler de l’étrange refus d’une reconstitution, (pourtant réclamée
pour la troisième fois par l’accusé lui-même), du refus de
confrontation de ce dernier avec ses accusateurs, de l’absence
d’expertise balistique, etc. Toutes démarches pourtant très habituelles
dans un procès d’assises « ordinaire ».
Que l’on croie ou non à l’innocence du berger de Cargèse, force est de
constater pour les observateurs impartiaux que, dans ce procès,
l’article 11 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen qui
proclame que : « Toute personne accusée d’un acte délictueux est
présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement
établie au cours d’un procès public où toutes les garanties nécessaires
à sa défense lui auront été assurées. » a été largement bafoué.
Comment la justice française peut-elle affirmer, au nom du peuple
français, quelque chose qu’elle a été incapable d’établir ? Comment
l’avocat général, dans son réquisitoire, a-t-il pu affirmer de l’accusé
qu’il était « le tireur, l’exécuteur et le bourreau » ?
Les Verts relèvent « les nombreuses carences dans le dossier
d’instruction venant corroborer les remarques déjà émises par la FIDH
concernant les manques graves au respect des droits de la défense, et
réaffirment qu’en démocratie la raison d’Etat ne doit en aucun cas se
substituer à la Justice sous peine d’entraîner son discrédit ». (…)
Hormis une piteuse déclaration de François Hollande (1) (qui n’engage,
espérons-le, que lui - même), le silence du parti socialiste sur ce
procès est assourdissant.
Pas un commentaire. Pas un mot.
Ce Parti prétend pourtant qu’il « plonge ses racines dans la tradition
de l’humanisme et dans la philosophie des Lumières ». Et qu’il « fait
siennes les valeurs de Liberté, d’Egalité, de Fraternité, proclamées
par la Révolution Française. »
Il faut donc supposer qu’aujourd’hui le Parti socialiste, pourtant si
épris de justice sociale, s’est affranchi aujourd’hui de l’esprit des
Lumières, s’accommode fort bien des tribunaux d’exception - nommés par
le pouvoir - au pays des droits de l’homme, qu’il admet ce nouveau
fonctionnement des institutions françaises, qu’il n’a rien à redire sur
la remise en question de l’idée somme toute assez partagée selon
laquelle, dans une démocratie, la justice ne pourrait enfermer
quelqu’un à vie que si elle a la certitude - honnêtement acquise - du
geste accompli ou de la faute commise.
Enfin, depuis quand, en France, un accusé doit-il apporter la preuve de
son innocence, ainsi que l’a exigé l’accusation tout au long de ce
procès ?
Yvan Colonna, désigné autrefois par Sarkozy comme « l’assassin du
préfet Erignac » au mépris (déjà) de toute présomption d’innocence (2),
n’intéresse donc pas le parti qui fait sienne les valeurs de la
Liberté, de l’Egalité, de la Fraternité et de la Justice. (…)
Lorsque les tribunaux d’exception avancent, ce sont les droits les plus
élémentaires du citoyen qui reculent.
Patric Nottret
(1) L’ancien numéro un du PS, François Hollande, a jugé « moralement
inacceptable et politiquement intenable » une comparaison entre
l’affaire Dreyfus et le procès d’Yvan Colonna, comme l’ont fait les
défenseurs du berger corse. « Cette comparaison me choque. Dreyfus a
été condamné par une parodie de justice, un déni de justice », il a été
victime d’un « complot contre la vérité ».
(2) Pour mémoire, le public ignore souvent qu’auparavant, deux autres
hommes avaient été désignés comme étant les commanditaires du meurtre
d’Erignac : Jean Castela et Vincent Andriuzzi, deux enseignants,
avaient été condamnés par une même cour spéciale à trente ans de
réclusion criminelle pour avoir été reconnus (principalement par le
commissaire Marion et le juge Bruguière, principaux accusateurs de
Colonna), comme étant les "cerveaux" ayant commandité l’assassinat du
Préfet Erignac, et pour attentats.
A la veille de leur procès en appel, la Ligue des droits de l´homme
s´interrogeait déjà sur « les possibles conséquences d´un certain
nombre de dérives dans la justice qui hypothéquaient le droit à un
procès équitable et qui, par voie de conséquence, pouvaient faire
craindre une erreur judiciaire ».
Après avoir été maintenus en détention provisoire durant 7 ans, Jean
Castela et Vincent Andriuzzi ont été lavés de ces accusations et
relaxés après leur procès en appel.
Dernier procès
d'assises pour Wacogne
Didier Wacogne, le président très controversé de la cour d’assises
spéciales de Paris qui a jugé en appel Yvan Colonna, ne présidera plus
à l’avenir de session d’assises. En effet, il a été convoqué par le
premier président de la cour d’appel de Paris, Jean-Claude Magendie qui
lui a notifié sa décision en vertu d’un pouvoir discrétionnaire.
Yvan
Colonna se pourvoit en cassation
Les avocats d'Yvan Colonna ont déposé lundi 30 mars un pourvoi en
cassation contre la condamnation vendredi par la cour d'assises d'appel
de Paris du berger de Cargèse à la réclusion criminelle à perpétuité,
assortie d'une mesure de sûreté de 22 ans.
Ce pourvoi, déposé en milieu d'après-midi, vise notamment le manque de
partialité et l'absence de loyauté du président de la cour d'assises
d'appel, Didier Wacogne, a précisé Me Garbarini.
Le silence et la
démission des journalistes
Sur le blog de Jean-Michel Aphatie :
"Samedi, Libération a titré ainsi son papier, publié page 6: « Yvan
Colonna: le procès tangue, pas le verdict. » Cette mise en
contradiction du procès et du verdict synthétise formidablement le
problème. Ce titre dit bien que le verdict est indépendant du procès.
Ce qui, dans une démocratie, n’est pas acceptable.
Curieusement, ce constat, partagé, est demeuré sans suites. Nulle part
dans la presse, un éditorial n’a posé la question, soulevé le problème.
Certains papiers, mais de manière très inégale, ont souligné la
partialité du président, donc l’orientation du cours de la justice.
Mais pas un commentaire sur ce sujet, dans la presse, donc encore moins
d’indignation. Le procès a été suivi de manière factuelle, et faut-il
le préciser, de manière très inégale, mais pas une plume ne s’est
consacrée à l’observation des principes."
On pourrait en dire autant de la plupart des partis de gauche, prompts
à dénoncer les manquements aux Droits de l'Homme en dehors de
l'Hexagone. Seuls à ce jour les Verts et le NPA ont réagi...
Une commission
d'enquête parlementaire ?
Jean-Guy Talamoni a déposé à l'Assemblée de Corse une motion demandant
la constitution d'une commission d'enquête parlementaire sur "l'affaire
Colonna et les activités des juridictions spéciales dites
"antiterroristes".
"De graves atteintes aux droits de la défense" justifient cette
demande, a précisé Jean-Guy Talamoni.
"Malgré les doutes que l'on peut nourrir sur la capacité des
institutions politico-judiciaires françaises à se remettre en cause,
surtout lorsqu'il s'agit du problème politique corse, il n'est sans
doute pas inintéressant de voir une telle commission enquêter sur les
dérives des juridictions dites "antiterroristes", a-t-il ajouté.
Manifestation à Ajaccio
C’est la réponse de la rue au verdict de la cour d’assises. Hier
après-midi, à Ajaccio (Corse-du-Sud), plusieurs milliers de
manifestants ont défilé pour dénoncer la condamnation d’Yvan Colonna.
Peu importe le chiffre exact, entre 4 000 selon la police et plus de 10
000 pour les organisateurs, cette manifestation a rempli son objectif :
montrer qu’une partie de la population corse soutient le berger
condamné, et pas seulement la mouvance nationaliste.
Le défilé s’est déroulé dans le calme et sous la pluie avec, au premier
rang du cortège, les proches de Colonna, son père et sa sœur notamment,
mais aussi des leaders politiques locaux comme Jean-Guy Talamoni et
Jean-Christophe Angelini. Edmond Simeoni a déclaré : "C'est une honte
dans un pays démocratique comme la France et notre combat prend
aujourd'hui une valeur symbolique", a-t-il dit. "Nous devons tous nous
dresser contre ce déni de justice. Ce n'est pas une affaire entre les
Corses et les Français. C'est une affaire de justice, de démocratie et
de droits de l'Homme qui nous concerne tous".
Procès Colonna : "Un
fiasco"
Par Marie-Lys LUBRANO
Le JDD.fr
Reconnu coupable de l'assassinat du préfet Erignac, Yvan Colonna a été
condamné, vendredi soir, à la réclusion criminelle à perpétuité
assortie d'une peine de sûreté de vingt-deux ans. Une peine plus lourde
qu'en première instance, puisque c'est la peine maximale.
Pour le JDD.fr, Maître Gilles Simeoni, avocat de Colonna, réagit au
verdict et revient sur ce procès particulièrement agité.
A la fin du procès en première
instance, vous disiez que votre client,
qui avait échappé à la peine de sûreté, avait été condamné "au bénéfice
du doute". Est-ce encore le cas?
Là non, on n'est plus dans le bénéfice du doute. Avec ce procès en
appel, on était dans un train lancé sur les rails de la condamnation à
tout prix. Dans des conditions normales, il n'y aurait pas eu d'autres
issues que l'acquittement. Malheureusement ce que nous avions pressenti
est arrivé. La cour nous a démontré de façon délibérée, systématique et
même provocante, qu'elle n'était pas là pour arbitrer entre la thèse de
l'accusation et celle de la défense. Elle a refusé ne serait-ce que
d'envisager l'hypothèse de l'innocence d'Yvan Colonna. Sa seule
fonction et son seul objectif étaient d'arriver - au forceps si
nécessaire - à une condamnation, y compris au mépris de la vérité.
C'est ce qu'il s'est passé.
En première instance, vous disiez dans
votre plaidoirie que le procès s'était bien passé. Cela n'a pas été le
cas en appel?
On disait du procès en première instance qu'il avait présenté les
apparences de l'équité. Mais nous avions déjà bien compris, notamment
au travers de la reconstitution "croupion" qui avait été ordonnée -
c'est à dire un simple transport sur place - que la cour d'assises,
même en première instance, ne voulait pas aller au bout de la vérité.
Nous avions décidé d'exercer une défense classique parce que nous
n'avions rien à craindre du débat judiciaire, dès lors qu'il se tenait
dans des conditions normales. En appel, nous sommes encore venus jouer
le jeu judiciaire. Mais on nous a bien fait comprendre qu'il n'y avait
pas de place pour le débat et pour l'équité. Cette condamnation
intervient dans des conditions particulièrement scandaleuses.
Le "diktat" de Sarkozy
Yvan Colonna a écopé d'une peine plus lourde qu'en première instance,
comment l'interprétez vous ?
La cour d'assises a voulu se venger de lui. Les juges n'ont pas accepté
qu'il résiste à l'injustice. Et cette condamnation n'est autre que la
traduction juridique du diktat énoncé contre lui, à l'époque de son
arrestation, par le ministre de l'Intérieur (Nicolas Sarkozy, ndlr), en
violation totale de la présomption d'innocence.
Ne regrettez-vous pas, maintenant, de
ne pas avoir plaidé?
Nous ne regrettons pas parce que nos plaidoiries n'auraient eu aucune
incidence. La cour avait démontré qu'elle ne voulait pas aller vers la
vérité, alors nous n'avons pas eu d'autre choix que de quitter le
procès.
Qu'auriez-vous pu dire de plus si vous
aviez plaidé?
Il y avait tout à dire... Mais de toute façon, si nous avions été
devant une cour d'assises fonctionnant normalement, il n'y aurait même
pas eu besoin de plaidoirie de la défense.
Vous allez vous pourvoir en cassation.
Mais l'absence de l'accusé
pendant les débats n'étant pas du fait de la cour, quels vices de
procédures allez-vous invoquer?
Nous avons plusieurs autres moyens. D'abord la rupture de l'égalité des
armes entre la défense et l'accusation: le témoignage de Didier Vinolas
était connu de l'accusation mais pas de nous. Ensuite, il y a des
écoutes téléphoniques effectuées pendant l'enquête qui nous ont été
cachées et la reconstitution précise des faits qui nous a été refusée.
Enfin, il y a les témoins qu'on a bombardés de questions avant même
qu'ils ne fassent leurs dépositions...
Toute cette affaire, y compris sur le terrain juridique, est un
véritable fiasco.
A lire, une très intéressante étude de Daniel Arnaud :
Le Procès Colonna, les médias et la démocratie
C'est ici : http://generation69.blogs.nouvelobs.com/index-2.phpl
Condamnation d'Yvan
Colonna
Yvan Colonna a été condamné en appel à la réclusion criminelle à
perpétuité avec une période de sûreté incompressible de 22 ans pour
l'assassinat du préfet de Corse Claude Erignac en 1998.
Lors d'une déclaration publique à Bastia, Edmond Simeoni a qualifié le
verdict de "terrible parce qu'il aggrave la peine du premier procès,
marquant ainsi la volonté délibérée, provocatrice, d'emmurer Yvan
Colonna vivant".
Une manifestation est prévue à Ajaccio samedi à 15h00.
Edmond Simeoni a souligné "l'intention des nationalistes de manifester
dans le calme et la dignité, non pas pour protester seulement contre un
jugement inique, mais pour montrer aussi qu'il s'agit d'un problème
concernant le peuple français au nom duquel la justice est rendue".
"A chaque fois que les justices d'exception avancent, la démocratie
recule. Le combat continue! Nous irons en cassation, puis
éventuellement devant la juridiction européenne des droits de l'Homme".
Les avocats de la défense ont d'ores et déjà annoncé leur intention de
se pourvoir en cassation.
Communiqué du comité de soutien à Yvan Colonna :
Madame, Monsieur, cari amichi,
Malgré la démonstration du caractère exclusivement à
charge de l´instruction et des pressions scandaleuses éxercées par le
pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire.
Malgré l´absence totale de preuves ou d´indices matériels,
et des dépositions de témoins oculaires de la scène du crime, qui
innocentent Yvan Colonna, malgré les témoignages non démentis,
établissant l´impossibilité matérielle qu´Yvan ait participé aux faits
qui lui sont reprochés.
Malgré la mise à jour de pratiques policières dignes d´un
état totalitaire (faux procès verbaux, pressions sur les témoins,
détournement de procédures, disparition d´éléments de preuves
favorables à l´accusé).
Malgré le fait que le doute doive profiter à l´accusé
alors qu´il a été présent tout au long d´un procès émaillé de zones
d´ombres et d´incertitudes.
Malgré le fait que la conviction intime du juge ne doive
s´appliquer qu´en cas d´acquittement,
YVAN COLONNA A ETE CONDAMNE A LA RECLUSION CRIMINELLE A PERPETUITE
par une justice solidaire du pouvoir politique au titre de la raison
d´état et animée d´un esprit de vengeance.
En fait, les audiences «équitables» dans leur forme ont dissimulé le
poids de la raison d´état.
Appel a aussitôt été formé contre cette décision.
Yvan reste présumé innocent.
Le comité de soutien fort à ce jour de plus de 48 000 signatures,
continue et accentue son combat, y compris sur le plan européen, pour
que soit enfin reconnue l´innocence d´Yvan Colonna à la prochaine
échéance judiciaire en appel.
Au delà du cas d´Yvan, c´est aussi une exigence de démocratie et
d´indépendance de la justice face au pouvoir politique et à la raison
d´état que nous revendiquons.
http://www.yvan-colonna.com/
Sept
semaines de procès dans une ambiance délétère
Un article édifiant du Figaro sous la plume de Stéphane
Durand-Souffland, dont il faut souligner l'objectivité et la pertinence
tout au long de ce procès.
27/03/2009
La tension entre la cour et les défenseurs de l'accusé n'a cessé de
croître au fil des audiences.
Un rendez-vous de Me Pascal Garbarini chez son dentiste a sans doute
précipité le départ d'Yvan Colonna et de sa défense. Mais le procès du
berger de Cargèse avait déjà failli s'arrêter, à peine commencé. Voici
pourquoi.
Me Garbarini, donc, avait prévenu le président Wacogne qu'il serait
légèrement en retard le 10 mars au matin de fait, l'avocat de la
défense arrive peu après 10 heures. Le soir de ce 10 mars, Me Lemaire,
principal conseil de la partie civile, demande que soient projetées des
photos prises en 2007, lors d'un transport de la première cour
d'assises sur les lieux du crime. Il est déjà 19 h 40 et la défense
charge Me Garbarini qui, contrairement à Me Sollacaro, n'a jamais tenu
de propos désobligeants à l'encontre des juges, d'aller solliciter un
report de ce visionnage au lendemain, arguant de la fatigue générale.
L'avocat se rend dans la chambre du conseil, où les dix magistrats
(neuf titulaires et un suppléant) de la cour spécialement composée
discutent à bâtons rompus.
Reconstitution refusée
Alors qu'il plaide la lassitude, un assesseur rétorque sèchement :
«Vous ne devez pas être si fatigué que ça, puisque vous êtes arrivé à
10 h 30 ce matin». L'une de ses collègues renchérit : «Nous ne sommes
pas à la botte d'Yvan Colonna». Le président n'intervient pas. Un
magistrat, témoin de la scène, en a confirmé le déroulement au Figaro,
ironisant : «Reprocher à un avocat d'être en retard alors que le
président n'a jamais repris l'audience à l'heure…»
Le report est accepté, mais les cinq avocats concluent que l'hostilité
est telle à leur égard que certains assesseurs ne font même plus
l'effort de la masquer : ils décident de claquer la porte au premier
incident. Pourtant, jusque-là, ils étaient partagés sur cette
stratégie, certains restant partisans du combat judiciaire traditionnel.
Le prétexte leur sera fourni le 11 mars, avec le refus prononcé par la
cour d'organiser une reconstitution. Ce déplacement, bien que lourd à
organiser et à l'intérêt aléatoire, avait été envisagé par le ministère
de la Justice et inscrit au budget dès avant le procès. Un week-end
avait été bloqué, dont la date était connue de la presse. Lors d'une
réunion stratégique tenue le 9 mars au soir en présence de plusieurs
conseillers ministériels, et où «toutes les options ont été envisagées»
selon l'un des participants, il avait cependant été décidé que le
ministère public se prononcerait contre la reconstitution :
l'atmosphère des débats s'était par trop dégradée pour donner
l'impression de faire une concession à la défense «qui a dépassé les
bornes». Mais l'on espérait que la cour non représentée à ce comité,
reporterait sa décision de quelques jours. Le «niet» ferme et définitif
a donc surpris, et provoqué le clash. Il est plus que probable que si
la décision avait été autre, Yvan Colonna n'aurait pas quitté le box,
du moins pas ce jour-là.
Ouvert le 9 février, le procès était parti sur de mauvaises bases. Le
13, Didier Vinolas était venu témoigner. L'effet qu'ont produit ses
«révélations» a été dévastateur : les débats ont failli ne pas
reprendre le lundi 16. Car le 14, le palais de justice est en
effervescence. Selon nos informations, le président avait «égaré» la
note déposée fin décembre par M. Vinolas au parquet général, que
celui-ci lui a transmise un mois plus tard. Si la défense demande à
voir ce «soit transmis» et qu'il a disparu, c'en est fini. «Les avocats
généraux vont pouvoir garder leur réquisitoire au chaud pour l'année
prochaine», soupire un membre bien informé du parquet général.
Sollicité le 14 février par Le Figaro, M. Wacogne n'a pas souhaité
donner suite.
Guerre de procédure
Le 15, l'optimisme revient modestement : «Nous avons l'espoir
raisonnable que le procès se poursuive», confie un magistrat, en
croisant les doigts. Le lundi, à la reprise des débats (avec 25 minutes
de retard), le président verse la lettre de M. Vinolas dont il avait
été destinataire par ailleurs. Dans un climat délétère, la défense
exige de voir le soit-transmis. «C'est la même chose», avance le
président. Ce que confirme du bout des lèvres un avocat général. Mais
le flottement, évident à cet instant entre le siège et le parquet,
n'échappe à personne.
Me Garbarini : «Pourquoi n'avez-vous pas ce soit-transmis ?»
Le président : «Je n'apporte pas tout à l'audience. Il est dans mon
bureau…»
L'audience est suspendue à 11 h 40. Elle doit reprendre à midi. à 12 h
20, la cour réapparaît. Le président verse le soit-transmis. Le procès
reprend. Mais le compte-à-rebours est enclenché.
Histoires de drapeaux...
Concert de Canta U Populu Corsu à
Paris : Sarko n’aime pas les drapeaux.
Le 25 mars 2009 : (08:21 Unità Naziunale,
www.unita-naziunale.org - Corse -
Lutte de Masse)
Venneri sera, u 20 di marzu, simu andati, in famiglia, à l’Olympia à
vede Canta u Populu Corsu. Cù noi, aviamu trè bandere. Duie bandere
corse ; una grande è una chjuca per u figliulinu. A terza ghjera a
bandera di u Ribellu.
A Minnanna chì vuglia entre di bon’ora, cù un’amica, ùn hè micca
passata cù e so trè bandere. Ùn eranu micca i bastoni chì incumundavanu
u primu « vigile », era a bandera di u Ribellu. è stu « vigile » l’hà
dettu à Minnanna : « Ici, madame on ne fait pas de politique.
Vous devez me donner votre drapeau. Vous le reprendrez en sortant .»
A Minnanna hè surtita, in zerga, senza dà a so bandera, dicendu à u «
vigile » :
« Indè noi, quessu ùn s’hè mai vistu di cappià una bandera à un
furesteru.» .U nostru Ribellu ghjè un’amica chì l’hà piattatu è simu
entrati. Eiu, per passà cù u figliolinu, è e nostre duie bandere corse,
avemu piantatu quattre volte.
Quattru « vigile » è quattre volte à parlamintà. Quattre
discussione per annarbà a ghjente, è pò aghju dettu « eiu passsu
avà ». è simu tutti passati, quantunque cù e nostre bandere corse.
Quandu Canta u Populu Corsu hà cuminciatu à ripiglià e so canzone di
lotte, aghju surtitu a bandera di nostru Ribellu. Subbitu un antru «
vigile » hè venutu à cercami. è chì vulia ? A bandera ben intesu. Sò
surtitu di a seria di sedione è mi sò avvicinatu di u « vigile ». Ma
invece di dà a bandera à st’omu, sò andatu versu a scena è aghju
lampatu a bandera à i nostri cantadori. è ghjè cusì ch’avemu vistu dui
cantadori chì, cantendu, hanu purtatu a nostra bandera.
Un antru fattu di sta serata. Certi sò stati obligati, per entre, di
caccià u « tee shirt » di sustegnu à Yvan Colonna. è
l’avemu amparatu da Ceccè Buteau, chì ci hà dettu : « Sò e
RG chì, in sta serata, hanu datu e cunsigne à l’Olympia ». Ben intensu,
i nostri paisani hanu surtitu torna i so « tee shirt »
Ciò chì face piacè puru, ghjè, chì i nostri « vigile » cunnoscenu a
nostra lingua è hanu amparatu qualche parolle corse : - Libertà per
Yvan Colonna - è - A populu fattu bisognu à marchjà.
Dans la série "Sarko n’aime pas les drapeaux", le
Journal du Dimanche
daté du 22 mars 2009 dans un article intitulé : Otan : la police fait
le ménage à Strasbourg , a écrit :
« à quelques jours du sommet de l’Otan des 3 et 4 avril, la police a
obligé plusieurs Strasbourgeois à retirer de leurs fenêtres ou balcons
le drapeau de paix aux couleurs arc-en-ciel avec la mention « No
to Nato » (Non à l’Otan) . »
François Dominici – Choisy le Roi – le 24 03 2009
Source photo : Unità Naziunale, Archives du site.
Source info : Unità Naziunale
Voici donc les drapeaux interdits :
La France de Sarkozy n'est certes pas le Chili de Pinochet, mais ces
restrictions aux libertés publiques ont de quoi inquiéter tout
démocrate, de même que les dérives de la justice "antiterroriste" :
procès Colonna, affaire de Tarnac (voir l'article du Monde sur ce
sujet)...
Colonna: appel à
manifester samedi
Le comité de soutien à Yvan Colonna appelle à manifester samedi à 15
heures à Ajaccio "pour témoigner du refus d'accepter un verdict
inique", dans un communiqué.
"La démarche de mobilisation se poursuivra afin qu'Yvan bénéficie d'un
procès équitable", poursuit le texte, qui appelle "tous les démocrates
à y participer".
Le verdict de la cour d'assises spéciale de Paris, qui rejuge depuis le
9 février Yvan Colonna, est attendu vendredi.
5 questions autour de
l’affaire Colonna
Le verdict dans le procès en appel d’Yvan Colonna devrait être prononcé
vendredi prochain. A quelques jours de l’échéance, un point rapide sur
l’essentiel du dossier.
Quelles charges pèsent au juste sur
Yvan Colonna ?
Uniquement les mises en cause initiales des membres du commando qui a
assassiné Claude Erignac le 6 février 1998, à Ajaccio. Les autres
éléments du dossier (dont certains n’ont tout bonnement pas été pris en
compte par une instruction menée exclusivement à charge) sont à
décharge : l’analyse balistique qui conclut à un tireur de grande
taille, les témoins oculaires qui ne reconnaissent pas Yvan Colonna,
les écoutes téléphoniques qui n’indiquent rien de suspect, les
rétractations des membres du commando, les contradictions dans leurs
premières déclarations. C’est pourquoi la Fédération internationale des
droits de l’homme (FIDH), dans le rapport qu’elle a rendu après le
procès de 2007, a dénoncé la faiblesse d’une accusation ayant conduit à
une perpétuité.
Pourquoi ses "amis" l’auraient-ils
désigné à tort ?
Pour minimiser leur rôle dans l’assassinat ; pour couvrir d’autres
personnes ; parce que le nom d’Yvan Colonna leur aurait été "suggéré"
par les enquêteurs. Il ne s’agit-là que d’hypothèses, mais leur simple
formulation doit nous rappeler qu’il y a une place pour le doute. Dans
d’autres affaires (Dominique Baudis, Patrick Dils...), des aveux
circonstanciés ont conduit à accuser des individus finalement mis hors
de cause. Lors de l’audience du 9 mars 2009, Pierre Alessandri a en
outre lâché : « Effectivement, j’ai des reproches à faire à Yvan. Quand
j’ai décidé de franchir le pas de la violence clandestine, j’ai espéré
qu’il ferait partie de notre groupe. Ce que je lui reproche, c’est ça :
d’avoir laissé Didier Maranelli et Martin Ottaviani monter au charbon
alors que c’est lui qui aurait dû le faire, pour être cohérent avec son
discours. » Aussi pourrions-nous imaginer le choix d’un bouc-émissaire
(ou d’un leurre) qui s’expliquerait par un ressentiment : à l’encontre
d’un "ami" qui partage les mêmes idées, et qui ne veut pas pour autant
aller les défendre par l’action violente ou le meurtre. Depuis Dantès
envoyé au château d’If par Morcerf et Danglars, on sait qu’avec
certains "amis"... on n’a plus besoin d’ennemis. Combien de turpitudes
humaines, trop humaines, font les grandes affaires qui marquent
l’Histoire ?
Pourquoi la cavale ?
C’est l’un des arguments (sans valeur légale) qui revient souvent chez
les commentateurs : on ne fuit pas la Justice lorsqu’on est innocent.
S’ils lisaient le rapport de la FIDH de 1998 concernant les pratiques
de la Division nationale anti-terroriste (DNAT), notamment en Corse,
ils seraient probablement moins affirmatifs. Tous les abus révélés au
grand jour à l’occasion du procès en appel se trouvent dénoncés depuis
plus de dix ans dans les dizaines de pages de France : la porte ouverte
à l’arbitraire : les instructions à charge, les pressions sur les
témoins, les détentions "préventives" qui s’éternisent, les
"femmes-otages" qu’on utilise pour faire avouer n’importe quoi en garde
à vue, les multiples atteintes aux droits de la défense.
Je m’étonne à cet égard du silence de la gauche, et plus
particulièrement des mouvements altermondialistes ou d’extrême-gauche.
Ces derniers, effectivement, sont toujours prêts à scander
"Sarko=facho", à vilipender la guerre des Etats-Unis contre le
"terrorisme" ou à s’émouvoir du sort des prisonniers de Guantanamo.
Alors même que, toutes proportions gardées, les atteintes aux libertés
individuelles et les dérives qui peuvent survenir au nom de la lutte
contre le "terrorisme" existent en France depuis bien avant le 11
septembre 2001. Au lendemain du 6 février 1998, de nombreux insulaires,
qui n’avaient rien à voir de près ou de loin avec l’affaire Erignac,
sont passés dans les geôles de la DNAT ; certains ont fait des mois,
voire des années de "préventive", avant d’être libérés. J’attends
toujours que les bonnes âmes qui ont récemment appelé à une
manifestation de solidarité avec la Guadeloupe daignent se pencher sur
ce qui est en train de se passer à la cour d’assises spéciale de Paris.
Pourquoi l’Etat aurait-il intérêt à
faire condamner un innocent ?
Parce que les institutions, pour assurer leur crédibilité, peinent à
reconnaître leurs erreurs et ont besoin de sauver les apparences ;
quitte à sacrifier un individu. Or, les enquêteurs de la DNAT, les
magistrats de l’institution judiciaire ainsi que deux ministres de
l’Intérieur (Jean-Pierre Chevènement puis Nicolas Sarkozy), au mépris
de la présomption d’innocence, ont désigné Yvan Colonna comme étant
l’assassin du préfet Erignac. Revenir en arrière équivaudrait pour eux
à un camouflet. Pour l’institution médiatique également, qui a
massivement relayé le postulat de la culpabilité. Condamner Yvan
Colonna, qu’il soit coupable ou innocent, permettrait en outre à
l’appareil d’Etat d’entériner l’affront du 6 février 1998 en affirmant
qu’on ne défie pas impunément le pouvoir. Il s’agirait alors d’un rite
symbolique et expiatoire.
Peut-on rapprocher cette affaire de
l’affaire Dreyfus ?
Oui. Le spectre de la raison d’Etat n’est pas sans rappeler les mots de
Maurras au sujet de Dreyfus : "Qu’importe qu’il soit coupable ou
innocent ? L’intérêt de la Nation commande qu’il soit condamné !"
L’affaire Dreyfus s’est par ailleurs déroulée sur fond d’antisémitisme.
Or, lorsque Le Canard enchaîné titre Encore un procès bien corsé, ce
n’est finalement pas très éloigné de quelque chose qui ressemblerait à
Encore une histoire juive. Il y a un racisme anti-Corse, c’est-à-dire
une manière d’attribuer à toute une population un ensemble de
stéréotypes ou de travers. J’ai pu lire certains commentaires qui
disaient en substance : "Si ce n’est pas lui [Yvan Colonna], de toute
façon c’est un autre, ils [les Corses] n’ont qu’à se décider à parler."
Comme si la Corse entière était collectivement coupable de l’assassinat
du préfet Erignac. Comme si chaque insulaire était au courant (et
complice, bien sûr) des agissements de tous les autres. Lorsqu’un crime
a lieu à Paris, demande-t-on à chaque Parisien de se justifier et
d’assumer l’acte du criminel ?
Daniel Arnaud, philosophe et écrivain
Publié sur AgoraVox
Soirée de soutien à
Yvan Colonna
Le samedi 21 mars 2009, à partir de 19 h
Sous le marché couvert d'Ile Rousse
Avec A Filetta, Meridianu et l'Alba. Voir en page "agenda".
Les doutes d'un
citoyen...
Un très beau texte d'Yves Duteil :
Horrifié par l'assassinat de Claude Erignac, je partage la douleur des
siens et la révolte face à cette tragédie. mais sa mémoire ne saurait
se satisfaire de la condamnation d'un coupable de circonstance, s'il se
trouvait qu'il soit innocent.
Or, jour après jour, la procédure, d'escamotages en omissions, laisse
apparaître la construction d'une vérité sur mesures, fondée sur une
seule hypothèse et refusant d'explorer les pistes qui risqueraient de
la remettre en cause. Peu à peu le procès devient l'Affaire Colonna.
L'absence de preuve matérielle, l'expertise balistique qui le
disqualifie dans le rôle du tireur, les témoins directs qui ne le
reconnaissent pas, la rétractation de tous ceux qui l'avaient mis en
cause, le doute sur les conditions dans lesquelles leurs aveux avaient
été obtenus et leurs révélations sur la présence d'autres participants
à l'opération...
Tous ces éléments accumulés éclairent d'un jour nouveau le refus de la
reconstitution, les documents soustraits à la défense, les erreurs
d'interprétation des données téléphoniques lors du premier procès,
l'apparition du nom d'Yvan Colonna dans la procédure 6 mois avant
l'arrestation du commando, les écoutes téléphoniques dont la
transcription ne figure pas au dossier...
A l'inverse du but recherché, un faisceau d'éléments convergents rend
de plus en plus crédible l'hypothèse de son innocence et révèle en
filigrane le parti pris de l'accusation, qui semble redouter
l'expression de la vérité, même au prix de l'inacceptable, de
l'inéquitable.
Le doute fait son chemin dans le prétoire, le malaise atteint
l'opinion, les observateurs attentifs. Un verdict de culpabilité
paraîtrait aussi peu étayé qu'un château de cartes. Une condamnation "à
moitié" signerait l'embarras de la Cour devant cette gêne omniprésente.
Le calvaire de la famille Erignac, si digne et douloureuse, pourrait-il
être apaisé, dans ce contexte partial, par l'enfermement à perpétuité
d'un innocent plausible, désigné depuis le début comme présumé coupable
?
Yves Duteil
Le père d'Yvan Colonna
refuse de venir devant la cour d'assises
PARIS, 20 mars 2009 (AFP) - Le père d’Yvan Colonna a refusé de venir
témoigner vendredi devant la cour d’assises spéciale de Paris,
rejugeant son fils pour l’assassinat du préfet Claude Erignac, écrivant
dans un fax qu’il ne voulait pas "cautionner" un débat où "l’esprit de
vengeance remplace l’exigence de la vérité".
Jean-Hugues Colonna a adressé vendredi matin une télécopie au greffe de
la cour d’assises où il expliquait qu’il ne serait pas présent "au
motif d’une hospitalisation d’urgence à Marseille". "Quoiqu’il en soit,
je ne serais pas venu devant une cour spécialement composée pour
condamner et cautionner par ma présence un débat dans lequel l’esprit
de vengeance remplace l’exigence de la vérité", a ajouté M. Colonna
père.
Il a confirmé dans ce fax que le soir de l’assassinat du préfet Claude
Erignac, le 6 février 1998 à 21H00 à Ajaccio, il était "de 19H30 à 20H
environ en compagnie de (son) fils Yvan chez (sa) mère" à Cargèse
(Corse-du-Sud), ce qui rendait impossible la présence de l’accusé sur
les lieux de l’assassinat.
L’avocat général Christophe Teissier a estimé que ce fax ne faisait que
"confirmer le mépris affiché et voulu depuis le début de l’affaire" par
Yvan Colonna.
Un mépris partagé par de plus en plus d'observateurs...
"Le don d'ubiquité de Colonna n'émeut pas les assises"
Tel est le titre de l'article de Stéphane Durand-Souffland dans Le
Figaro du 18 mars dont voici quelques extraits :
Deux témoins, dont Jeanne Ferrandi, affirment avoir vu Yvan Colonna
dans deux endroits différents le lendemain du crime. En l'absence de
l'accusé et de sa défense, les contradictions entre témoins ne sont pas
relevées à l'audience. (...)
Arrêtée avec son ami en mai 1999, Valérie Dupuis, l'ex-compagne de
Didier Maranelli, avait introduit le nom d'Yvan Colonna dans la
procédure. (...)
à la fois franche et prudente, Mme Dupuis, qui a refait sa vie,
explique d'emblée qu'elle peut « dire des choses sur Didier Maranelli
mais rien sur Yvan. Je ne voudrais pas l'enfoncer parce que je ne sais
rien de cette histoire. On ne sait pas aujourd'hui s'il est innocent ou
coupable, et je ne peux pas dire si le fait qu'il soit venu chez moi, à
Cargèse, a un rapport ou pas avec ce procès ».
« Je l'ai vu une seule fois à la maison, c'était après les événements
», rappelle-t-elle. Invitée par le président à préciser la date de ce
conciliabule apparemment très bref entre MM. Colonna et Maranelli, le
témoin n'hésite pas : «Le 7 février, entre 9 heures et 10 heures du
matin ».
Comme la défense boycotte l'audience, personne ne pose à Mme Dupuis les
seules questions qui vaillent. Nul ne lui rappelle que Didier
Maranelli, à cette barre, a déclaré le 6 mars dernier qu'Yvan Colonna
n'était jamais venu à son domicile et qu'en tout état de cause, le 7
février 1998, il se trouvait non pas à Cargèse mais chez ses parents, à
Cristinacce.
Pas une voix ne pointe une faiblesse du dossier : selon la version
soutenue par l'accusation, Yvan Colonna se trouvait, ce 7 février au
matin, à Ajaccio, chez Alain Ferrandi, comme en attestent l'épouse de
celui-ci et celle de Pierre Alessandri. Une lecture linéaire du
dossier permet donc de démontrer que l'accusé - qui fut le premier à
s'en étonner après son arrestation - jouissait d'un prodigieux don
d'ubiquité, se trouvant simultanément en deux endroits distants d'une
cinquantaine de kilomètres.
On en vient à se demander s'il n'aurait pas mieux valu lancer
immédiatement les plaidoiries des parties civiles et le réquisitoire,
plutôt que de faire mine de s'intéresser à des dépositions qui, en
l'absence de débat contradictoire, n'ont pour ainsi dire aucun sens.
« Un procès sans défense, ce n'est rien d'autre que la validation
faussement critique d'une thèse écrite à l'instruction, avec l'alibi
tendancieux d'une oralité unijambiste. Il est plus que temps d'en finir
avec cet appel mort-né », conclut le journaliste.
Combien d'hommes dans le commando ?
Est-ce un tournant dans le procès ? La juge Laurence LeVert a été, avec
Jean-Louis Bruguière, l’un des trois juges d’instruction chargés du
dossier.
Mercredi 18 mars, Laurence LeVert a admis qu’il n’y avait que deux
hommes sur les lieux de l’assassinat du préfet Erignac, et non pas
trois comme elle le soutenait avec l’acte d’accusation.
Voici Yvan Colonna, censé être le troisième homme du commando,exclu de
la scène du crime. Du coup la construction bâtie par le parquet
s’effondre.
Autre déposition intéressante, celle du juge Gilbert Thiel qui a
expliqué pendant trois heures les "complots" qu’il a dû affronter au
cours de cette enquête hors norme :
Le complot des nationalistes, le complot des assassins, le complot des
gendarmes de la Section de recherche d’Ajaccio, le complot de la PJ
d’Ajaccio, obsédée par la « piste agricole », les complots ourdis par
le préfet Bonnet et par le patron de la DNAT, Roger Marion.
Et Thiel rappelle avec insistance la profession de foi de l’accusé, le
23 juin 2003, lors de leur premier entretien après son arrestation : «
Je vous affirme que je ne fais plus partie du groupe des anonymes, que
je n’ai pas tué le préfet Erignac. Je sais qu’il était votre ami, je
vous le dis les yeux dans les yeux. »
Depuis, Yvan Colonna ne s’est jamais départi de cette position...
Les avocats d'Yvan
Colonna portent plainte
17/03/2009
Mes Gilles Simeoni, Antoine Sollacaro, Pascal Garbarini, et Patrick
Maisonneuve ont déposé plainte auprès du procureur de Paris contre les
juges antiterroristes Jean-Louis Bruguière, Laurence Le Vert et Gilbert
Thiel. Visant l'article 434 du code pénal, ils accusent les magistrats
de «destruction, soustraction, recel ou altération d'un document public
ou privé de nature à faciliter la découverte d'un crime ou d'un délit,
la recherche des preuves ou la condamnation des coupables». La peine
encourue par les intéressés, du fait de leur fonction, est de cinq ans
de prison et 75 000 d'amende.
Les avocats de M. Colonna reprochent aux juges d'instruction co-saisis
de l'enquête sur l'attaque de la gendarmerie de Pietrosella (6
septembre 1997) et de l'assassinat du préfet Erignac (6 février 1998)
dossiers distincts qui ont été joints par le président de la première
cour d'assises, d'avoir délibérément écarté des écoutes téléphoniques
judiciaires de la procédure. Ces écoutes réalisées entre décembre 1998
et mai 1999 ont, notamment, surpris des conversations entre Alain
Ferrandi et la famille Colonna.
Ce n'est que sur la retranscription des auditions réalisées par une
commission d'enquête parlementaire sur la Corse mise en place en 1999
après «l'affaire des paillotes» que les avocats ont trouvé trace de ces
écoutes.
Pour la défense, ces éléments ont été sciemment occultés parce qu'ils
sont à décharge. Le 5 mars, les avocats ont demandé au président Didier
Wacogne de verser les pièces manquantes au dossier. Cela n'a été fait
que le 12, au lendemain du départ de l'accusé et de ses avocats...
Intervention
d'Edmond Simeoni devant l'Assemblée de Corse
Le procès Colonna a été évoqué à l’Assemblée de Corse : dans une motion
présentée le 16 mars par Edmond Simeoni au nom du PNC-Chjama (et
rejetée sans débat par l'Assemblée) , il a été demandé au Garde des
Sceaux de "mettre tout en œuvre pour que le procès en appel d’Yvan
Colonna bénéficie de toutes les garanties quant à l’application du
droit à l’équité judiciaire conformément à l’article 6 de la convention
européenne des droits de l’homme et de veiller au respect le plus
strict des fondements et des grands principes de la justice."
11/03/09
"Le jeu judiciaire est truqué" selon Me Garbarini
Interview d'un des avocats d'Yvan Colonna publiée dans "Le Nouvel
Observateur".
La décision d'Yvan Colonna de quitter le procès a pu être jugée comme
une "fuite", un "aveu" de sa culpabilité…
- La décision d'Yvan Colonna a été provoquée par la déloyauté de la
cour d'assises. Il n'avait aucun intérêt à quitter le procès, mais il
refuse de jouer le jeu judiciaire car il est truqué. Il ne veut pas
participer à une truquerie. Les droits de la défense sont violés de
manière flagrante alors qu'il encourt la peine maximale. Il n'avait pas
d'autre choix que de quitter le procès.
Quand la cour d'assises respectera les principes érigés par le code
pénal, les peines vont être prononcées et les accusés resteront.
Quitter le procès est un droit pour l'accusé et c'est un devoir pour
ses avocats de le suivre.
Ne craignez-vous pas que les nombreux coups d'éclats de la défense
finissent par lasser jusqu'à l'opinion publique et finalement nuisent à
votre ancien client ?
- C'est l'inverse ! L'opinion publique s'est posé la question suivante
lors du premier procès Colonna : "Sera-t-il condamné à la réclusion
criminelle à perpétuité ou moins?", tellement son statut de coupable
avait été présenté. Lorsque le procès s'est fini, le 14 décembre 2007,
l'opinion a pensé : "Cet homme a été condamné au bénéfice du doute".
Aujourd'hui pour le public, ce procès est une mascarade, inacceptable
dans notre démocratie, car il y a déloyauté et partialité. L'opinion
publique est scandalisée, elle se dit que l'on est en train de
fabriquer un coupable.
Est-il encore possible d'assister à un procès qui se déroulerait dans
de bonnes conditions?
- Comme vous le savez, il y aura un troisième procès lorsque la Cour de
cassation et la Cour européenne des droits de l'homme seront saisis. La
France va être condamnée et il y aura un nouveau procès. Pour qu'il n'y
ait pas d'incidents, il faudrait que les magistrats et le président de
la cour d'assises respectent ses prérogatives et ses fonctions. Qu'ils
soient indépendants et ne se conforment pas au statut de coupable livré
par l'accusation. Et enfin, qu'ils soient respectueux des droits de la
défense.
Au premier procès, présidé par Dominique Coujard, Yvan Colonna a été
condamné et cela n'avait provoqué aucun incident. Lorsqu'un président
est loyal, le procès de la cour d'assises peut aller à son terme.
Interview de Me Pascal Garbarini par
Marine Thomas
Les bizarreries d'un procès atypique
Fin décembre 2008, Didier Vinolas, ex-secrétaire général de la
préfecture de la Région Corse et, à ce titre, proche collaborateur de
Claude Erignac, écrit au parquet général. Ce n'est que fin janvier
2009, à onze jours de l'ouverture des débats, que ce courrier est
transmis au président Wacogne qui en reçoit par ailleurs un double de
M. Vinolas, sans diffuser l'information, alors que celle-ci aurait dû
être portée à la connaissance de la défense et de la partie civile...
Le 24 février on apprend qu'un policier, témoin capital de l'affaire, a
envoyé un certificat médical au président, annonçant qu'il n'est pas en
état de déposer. Vérification faite, il apparaît que le certificat est
du 4 février, le courrier du 6 et qu'il a été réceptionné par le greffe
des assises le 9 février, jour de l'ouverture des débats... Deux
"cachoteries" pour le moins bizarres ...
Le comportement du président est jugé "étrange" par nombre
d'observateurs : tantôt il interroge longuement un témoin qui n'a
manifestement rien à dire, tantôt il ne pose aucune question précise à
la jeune femme qui a dévisagé le tueur. Lorsqu'il interroge Pierre
Alessandri, il lui coupe l aparole sans arrêt lorsque ce membre
important du commando vient proposer un scénario inédit de l'assassinat
du préfet, impliquant d'autres individus - qu'il refuse d'identifier -
toujours en liberté. Et quand Alessandri déclare : «J'ai des reproches
à faire à Yvan. Quand j'ai décidé de franchir le pas de la violence
clandestine, j'ai espéré qu'il ferait partie de notre groupe. Ce que je
lui reproche, c'est ça: d'avoir laissé Didier Maranelli et Martin
Ottaviani monter au charbon alors que c'est lui qui aurait dû le faire,
pour être cohérent avec son discours.», déclarations capitales pour la
compréhension des faits, le président ne demande rien à Alessandri !
Yvan Colonna était-il au courant des projets des « anonymes » ? A-t-il
abandonné ses amis au dernier moment, ou avant, ou après ? Le
saura-t-on un jour ?
Alors que tous les témoins oculaires innocentent Yvan Colonna,
qu'aucune preuve matérielle n'a été apportée contre Yvan Colonna, la
cour refuse d'organiser une reconstitution. Comment la manifestation de
la vérité pourrait-elle intervenir ? Le doute ne doit-il pas profiter à
l'accusé ?
Yvan Colonna et ses
avocats quittent le procès
Après avoir visionné dans la matinée les photos prises en 2007 lors
d'un transport sur les lieux du crime au premier procès, la cour a
repoussé la demande de reconstitution demandée une nouvelle fois par la
défense.
Les avocats de l'accusé s'appuyaient notamment sur les dépositions de
trois des membres du commando déjà condamnés, qui ont livré un nouveau
scénario du crime et affirmé que d'autres hommes jamais arrêtés y
avaient participé.
La défense voulait donc que soient convoqués les témoins oculaires, qui
disent pour la plupart ne pas reconnaître Colonna, les experts et les
membres du commando (Didier Maranelli et Pierre Alessandri avaient
accepté de venir.)
La cour a estimé qu'il serait "sans objet et inutile" de faire une
reconstitution, « aucun élément précis n'étant fourni à l'appui des
affirmations faisant état de la présence d'autres membres du groupe
encore inconnus. »
A cet instant, Yvan Colonna se lève dans son box et déclare : «Je
n'accepte pas cette décision. La reconstitution est primordiale et
importantissime. Mais vu que pour vous, Pierre Alessandri ment tout le
temps, il n’y a qu'un moment où il ne ment pas, c'est quand il m'accuse
d'être l'assassin. Dans ce cas, il y a trois hommes, Pierre Alessandri,
Alain Ferrandi et moi... Tous les témoins oculaires disent qu'il n'y a
que deux hommes. Même le préfet Marion dit qu'il y a deux hommes autour
du préfet. Mais vous ne voulez pas car ça va invalider sur le terrain
le scénario mis en place. Je vois bien que quoi qu'on dise, quoi qu'on
fasse, on n'avance pas, on balaye tout d'un revers de main, ça ne sert
à rien (...) Le commando ment, sauf quand c'est pour m'accuser moi. Si
vous vouliez la vérité, vous devriez aller sur place, mais vous ne
voulez pas parce que ça vous gène. Quant à ce procès, depuis le début,
j'ai une très grande défiance. Alors j'ai décidé de quitter ce procès,
je demande à mes avocats de partir, je les récuse. Je veux partir et
descendre à la souricière où ça sent la pisse...
Si vous voulez me condamner au nom de la raison d'Etat pour faire
plaisir à la famille Erignac, à Marion, Le Vert, Bruguière et Thiel et
tous ces salauds, ce sera sans moi. Je suis innocent. Moi je m'en
vais, je suis innocent », a-t-il ajouté, sous les applaudissements
d’une partie du public.
Ses cinq avocats ont indiqué qu'ils le suivaient dans son refus de
participer au procès.
Aussitôt, le président commet d'office les avocats que l'accusé vient
de récuser. Mais ceux-ci refusent de continuer à le défendre dans ce
prétoire, quitte à «assumer le fait d'être poursuivi» comme le dit Me
Maisonneuve. « Je ne suis plus l'avocat d'Yvan Colonna » Me Sollacaro
ne veut pas «servir de potiche pour une décision prise d'avance». Son
collègue Gilles Siméoni déclare : «Je suis fier d'avoir été l'avocat
d'Yvan Colonna et je suis fier qu'il me demande de ne pas l'accompagner
au son des fifres et des tambours vers une condamnation à la prison à
vie. Je ne serai pas le commis de cette cour, je ne serai pas un alibi
judiciaire». Me Garbarini enchaîne : «Nous refusons d'être des alibis
judiciaires.»
Le président Wacogne annonce : «La cour va saisir le bâtonnier.» Me
Sollacaro répond : «Vous pouvez saisir le pape si vous voulez.»
L'audience est suspendue et le bâtonnier de Paris renonce finalement.
Ton tout différent du côté des parties civiles : "Ça ressemble à s'y
méprendre à un aveu de culpabilité. Quand on est innocent, on se bat
jusqu'au bout", dit à la presse Me Benoit Chabert, avocat de l'Etat
français, partie civile au procès.
Parlant pour la première fois à ce procès, la veuve du préfet,
Dominique Erignac, lisant un texte à la presse, s'est dite "choquée par
le manque de courage d'Yvan Colonna".
A la reprise de l'audience, le président somme l'accusé de venir
assister à l'audience. Devant le refus de ce dernier, il décide de
reprendre les débats. Il se trouvera confronté à la situation assez
inédite d'un procès sans accusé, ni défense...
Selon le porte-parole du parquet général de Paris, Didier Allard, « la
défense a fait le choix de quitter l'audience, c'est un choix qui lui
appartient. Mais en aucun cas la défense ne peut décider que le procès
se poursuive ou non, c'est une décision qui appartient à la seule cour
d'assises (...) Elle a les moyens juridiquement de poursuivre ce
procès, c'est en tout état de cause ce que demandera à la cour
d'assises le parquet général, dès que l'audience reprendra », a-t-il
expliqué.
Dans les couloirs, les avocats de la défense ont expliqué que leur
départ résultait d'une "décision d'Yvan Colonna". "C'est la conséquence
du scandale qu'on nous impose depuis un mois", a souligné Me Gilles
Simeoni. "Il ne peut pas par sa présence cautionner une justice indigne
d'une démocratie", a-t-il ajouté estimant que le peuple français, au
nom duquel est rendu la justice, "doit se senti trahi".
Un procès en appel sans accusé, voilà à quoi devrait ressembler le
procès Colonna dans les jours qui viennent. Situation problématique au
regard des règles européennes du procès équitable...
07/03/2009
Des membres du commando
non encore identifiés...
Au bout de quatre semaines de procès, la défense d’Yvan Colonna a fini
par obtenir des membres du commando un début d'explication : c’est
«pour protéger d’autres gens» qu’ils auraient «accepté» d'accuser Yvan
Colonna, le nom de celui-ci leur ayant été «soufflé» par
les policiers.
C'est d'abord Joseph Versini, condamné à quinze ans de prison pour la
seule attaque de la gendarmerie de Pietrosella : «Les policiers
m’ont soufflé le nom d’Yvan Colonna», «l’étanchéïté en garde à vue y en
avait pas», «fallait mettre sept noms dans le groupe». Quand l’avocat
général Kross lui fait remarquer qu’il a «bien été capable de dire que
Didier Maranelli n’était pas à Pietrosella mais de dire qu’Yvan Colonna
y était», Versini invoque des pressions policières: «Sur M. Colonna, le
forcing, il a été fait en garde à vue». Il a attendu les conseils de
son avocat avant de livrer le nom sur procès-verbal: «Mon avocat m’a
dit que c’était cuit, que les autres avaient avoué et m’a laissé
entendre d’aller dans le même sens».
Alors, il a donné les noms de ses comparses et les a maintenus jusqu’à
son procès en 2003. Me Siméoni l’aiguillonne et Versini finit par
lâcher: «Ne rien dire sur l’absence de Colonna sur les lieux permettait
de ne pas en cause d’autres personnes». Me Siméoni le supplie d’aller
plus loin en montrant du doigt Yvan Colonna: «Ne pouvez-vous nous en
dire plus pour sortir cet homme de prison?». Versini répond «Non».
Alors, Yvan Colonna se lève et s’en mêle, s’adresse en Corse à Joseph
Versini, puis en Français: «Alors on m’accuse à tort et toi tu ne dis
pas à ton avocat que j’y étais pas!». Versini, ennuyé: «Si si je l’ai
dit mais pas tout de suite». Colonna d’un ton dur: «Je veux bien moi,
le choc de l’incarcération des femmes mais moi je suis recherché, à
l’époque Marion (patron de la DNAT, ndlr) avait dit «Colonna mort ou
vif» et vous vous dites rien. Pourquoi ce silence pendant deux ou trois
ans?». Versini a compris: «Parce qu’y avait d’autres gens que nous sur
l’action, c’est peut-être pour les protéger». Colonna ne paraît qu’à
moitié satisfait du «peut-être» qu’il répète, déçu, avant de s’asseoir.
A son tour, Didier Maranelli, condamné à 20 ans de réclusion pour
l’assassinat du préfet Erignac, et premier du commando à passer aux
aveux, à donner six membres puis à les identifier explique qu’il
«a été contraint de rajouter un X et de mettre le nom d’Yvan Colonna
dessus. Donc toutes mes déclarations inhérentes à sa personne sont
totalement fausses (…) En tant que co-fondateur du groupe, je dis et je
maintiens qu’Yvan Colonna n’en faisait pas partie».
Didier Maranelli a refusé de participer à la reconstitution du crime à
Ajaccio «pour ne pas refaire l’action et parce que ça aurait fixé le
dossier et blanchi automatiquement Yvan Colonna, car comment placer
trois personnes sur le site alors qu’il n’y en avait que deux?». Me
Maisonneuve ne va pas manquer de s’en servir plus tard et d’obtenir de
Maranelli son accord pour une reconstitution que la défense réclame en
vain à la cour d’assises spéciale de Paris: «Bien que mon rôle
n’apporte pas grand chose sur le meurtre lui-même, je suis prêt à
participer à une reconstitution si vous l’organisez», accepte donc le
«guetteur» du commando.
Mais Me Maisonneuve lui soumet les propos de Joseph Versini qui a
«évoqué des membres du groupe non-identifiés et dit avoir cité le nom
d’Yvan Colonna pour éviter de parler de leur présence» et Maranelli
répond qu'il ne veut pas s'exprimer. L’avocat insiste: «Sans vous
demander leur identité, dites nous si oui ou non s’il a pu exister
d’autres personnes non-identifiées et si parler d’Yvan Colonna
permettait de ne pas les évoquer». Après un long silence, Didier
Maranelli lâche: «C’est exact»...
Procès Colonna : le
scénario du crime contesté
04/03/2009
Les avocats d'Yvan Colonna ont mis en avant deux arguments de taille.
D'une part, ils ont fait admettre au commissaire de la division
antiterroriste (DNAT) Philippe Frizon que des écoutes téléphoniques
judiciaires impliquant Alain Ferrandi et des membres de la famille
Colonna, dont Yvan, réalisées entre décembre 1998 et mai 1999, ne
figurent pas à la procédure.
L'un des membres du commando, Alain Ferrandi, condamné en 2003, avait
été placé sur écoutes à partir du 8 décembre 1998, à la suite de
renseignements parvenus à Philippe Frizon. Ces écoutes "ont fait
apparaître des conversations" entre Alain Ferrandi, Yvan Colonna ainsi
que le père et le frère de celui-ci, a reconnu le policier en réponse à
une question de Me Gilles Simeoni.
"Pourquoi ces écoutes judiciaires ne sont-elles pas au dossier ?
Pourquoi attend-on aujourd'hui pour apprendre leur existence ?", a
demandé Me Simeoni.
"Je l'ignore, il faut poser la question au magistrat instructeur", a
répondu le commissaire Frizon. Il a ajouté que si ces écoutes "avaient
mis en lumière des éléments intéressants" à propos d'Yvan Colonna,
"(il) s'en souviendrait".
Cet escamotage d'éléments importants donne du poids à la thèse de la
défense selon laquelle le nom d'Yvan Colonna aurait pu être "soufflé"
aux membres du commando au moment de leur garde à vue en mai 1999.
D'autre part, les membres du commando ont été confondus par l'étude
minutieuse de la téléphonie : les enquêteurs ont pu positionner leurs
portables au moment de l'assassinat du préfet érignac, commis le 6
février 1998 vers 21 heures.
Selon eux, Didier Maranelli se trouvait devant la préfecture, chargé de
signaler le départ de la victime à Alain Ferrandi, posté, avec Pierre
Alessandri et Yvan Colonna, à proximité du théâtre où se rendait M.
érignac. M. Frizon l'affirme : les trois hommes étaient constamment en
contact visuel. Pour le reste, M. Alessandri a livré un scénario validé
par la DNAT : Yvan Colonna a fait feu, lui-même étant en couverture. Le
trio avait pris position vers 20 heures, croyant que le spectacle
commençait à 20 h 30 ; il débutait en réalité à 21 heures.
Or, Me Gilles Simeoni, reprenant les pièces exploitées par la DNAT,
démontre qu'à 20 h 16, Didier Maranelli appelle Alain Ferrandi,
activant la borne-relais de la Punta, qui couvre la zone de l'aéroport
d'Ajaccio où travaille M. Ferrandi. Les deux hommes, chacun dans un
véhicule distinct d'après les explications de M. Maranelli au juge,
s'apprêtaient à rejoindre le centre-ville, à un bon quart d'heure de
voiture. Cette localisation, à cet horaire, est incompatible avec le
scénario Alessandri.
Ensuite, à 20 h 43, M. Ferrandi est localisé près de la préfecture,
soit à 1,5 km des lieux du crime, les deux endroits étant couverts par
deux bornes-relais différentes. Certes, il est trahi par son portable
dans le secteur correspondant à la rue Colonel-Colonna-d'Ornano à 20 h
50, mais ce trajet est également, en contradiction flagrante avec le
scénario Alessandri.
Cela semble démontrer que les membres du commando ont menti aux
enquêteurs. Dès lors, la vérité sur la mort du préfet érignac n'est pas
connue à ce jour...
Que reste-t-il alors de solide dans cette enquête ?
Procès
Colonna : il n'y aura pas de reconstitution
03/03/2009 - La défense jugeait la reconstitution indispensable pour
faire la lumière sur les faits. La reconstitution du crime devait
notamment permettre de trancher entre la thèse de l'accusation, qui
parle d'un groupe de trois hommes, et les témoins oculaires, qui pour
la plupart n'en ont vu que deux. La présence des personnes déjà
condamnées, des témoins oculaires, des médecins légistes et des experts
en balistique aurait pu permettre de voir plus clair dans cette affaire
de plus en plus ténébreuse.
Le président de la cour d'assises spéciale de Paris, Didier Wacogne, en
a jugé autrement, estimant qu'«en l'état des débats», il ne voyait
aucun élément nouveau justifiant l'organisation de la reconstitution de
l'assassinat du préfet de Corse Claude Erignac à Ajaccio.
«La confiance était déjà bien entamée, mais là, il n'y pas plus de
confiance du tout», a déclaré Me Garbarini à l'attention du président
de cette cour décidément très spéciale...
Procès
Colonna : le récit troublant d'un ancien policier
LE MONDE - 03.03.09
Jean-Pierre Colombani, 55 ans, a des cheveux blancs, la mémoire qui
flanche et l'audition défectueuse. Lundi 2 mars, avant de jurer de
"dire la vérité, toute la vérité", il préfère en informer le président
Didier Wacogne. Ce policier des renseignements généraux d'Ajaccio,
aujourd'hui en retraite, n'a rien à dire à la cour d'assises spéciale
qui juge Yvan Colonna pour l'assassinat, le 6 février 1998, du préfet
Claude Erignac. D'ailleurs, à l'instant où il se plante devant la barre
bras croisés sur la poitrine, il "ne comprend pas ce qu'il fait là".
Tout juste s'estime-t-il en mesure de confirmer ce qu'il avait déclaré
sous serment devant une commission d'enquête sénatoriale en octobre
1999. Aussi lorsque Me Gilles Simeoni, l'un des avocats de l'accusé,
vérifie qu'il a bien indiqué aux représentants du Sénat, qu'en
"décembre 1998, il y avait des policiers des renseignements généraux
qui pensaient qu'Yvan Colonna était l'assassin", il ne trouve rien à
redire.
Décembre 1998 ? Soit cinq mois avant l'interpellation, le 20 mai 1999,
du commando et la fuite d'Yvan Colonna, le 24 mai. Cinq mois avant les
aveux de Didier Maranelli, le premier à mettre en cause le berger de
Cargèse. Or, policiers, magistrats instructeurs et ministère public
affirment que le nom d'Yvan Colonna n'est apparu qu'à ce moment-là,
pendant la garde à vue des membres du commando et de leurs épouses,
entre les 20 et 23 mai 1999. Jusqu'à cet épisode, le nom du berger de
Cargèse ne figurait nulle part.
Entendu dans la matinée, l'ancien préfet Bernard Bonnet l'a répété. Les
renseignements qu'il avait obtenus à partir de juillet 1998 et dont il
avait révélé la teneur au procureur de la République de Paris
Jean-Pierre Dintilhac en décembre 1998, ne faisaient pas état d'Yvan
Colonna. "Je n'ai jamais évoqué le nom d'Yvan Colonna", a-t-il
insisté. Son informateur secret, le mystérieux Corte, dont il continue
à taire l'identité, lui avait livré des noms dont celui d'Alain
Ferrandi, le chef du "commando Erignac", mais jamais celui d'Yvan
Colonna.
Une seule fois, en novembre 1998, les gendarmes qui filaient Alain
Ferrandi, avait évoqué un Colonna. Mais il s'agissait de Stéphane, le
frère cadet d'Yvan, lequel n'a jamais fait l'objet de poursuite. Ce
n'est qu'aujourd'hui, en 2009, que l'ancien préfet considère que "des
éléments convergents font penser que l'implication d'Yvan Colonna est
crédible".
Soupçonné d'avoir été l'un des chefs du FLNC du secteur Sagone-Cargèse
(Corse du sud) au début des années 1990, Yvan Colonna avait été placé
sur écoute après l'assassinat du préfet. "Nous savions que Ferrandi,
Maranelli et Colonna étaient des amis proches", a précisé M. Colombani.
Pour les avocats du nationaliste corse qui défendent depuis juillet
2003 - date de la première comparution de leur client devant la juge
Laurence Le Vert -, la thèse qu'Yvan Colonna n'a pas été dénoncée
spontanément, mais après que les policiers ont suscité son nom, la
déposition de l'ancien policier tombe on ne peut mieux.
L'accusé, d'ordinaire plutôt silencieux, ne s'y est pas trompé. «
On s'aperçoit que mon nom était déjà cité dès décembre 1998. Cela veut
dire que Le Vert et Thiel [les juges d'instruction] ont menti. Cela
veut dire que mon nom est apparu bien avant le 22 mai 1999. Qui l'a
introduit ? Pourquoi et comment ? » s'est-il exclamé avant de lancer au
président Wacogne : « Cela ne vous interpelle pas, ce témoignage ? »
Yves Bordenave
Nouvel
incident au procès d'Yvan Colonna
(28/02/2009)
Alors que les juges ont estimé que les deux suspects, Erick A. et
Michel A. cités par Didier Vinolas sont déjà apparus dans la procédure
et n'apportent "rien de nouveau", la défense entend exploiter les
contradictions flagrantes apparues entre les déclarations de Didier
Vinolas, de l'ex-procureur Yves Bot et d'un ancien policier des
Renseignements généraux, Michel Poirson, qui a contesté à la fois être
l'informateur de M. Vinolas et avoir rencontré M. Bot en 2002.
L'un des avocats d'Yvan Colonna, Patrick Maisonneuve, a fait état d'une
"accumulation d'éléments qui pose un véritable problème". La semaine
prochaine sera décisive avec l'audition des policiers antiterroristes,
qui ont enquêté sur l'assassinat du préfet Erignac. Pour l'heure, aucun
des témoins oculaires entendus à l'audience n'a reconnu l'accusé comme
l'un des deux agresseurs. Certains témoins, déjà entendus en 2007, ont
même été catégoriques, comme lors du premier procès.
Ce vendredi 27 février, un nouvel incident a opposé la défense au
président de la cour d'assises spéciale, Didier Wacogne, au sujet du
certificat médical produit par Georges Lebbos, un des principaux
témoins.
Le policier Georges Lebbos, ancien membre de la Division nationale
anti-terroriste (DNAT), a mené une partie des gardes à vue des membres
du commando arrêtés en 1999 et avait obtenu leurs aveux.
Or les autres procès de l'affaire ont montré que ce policier
antiterroriste avait commis de nombreuses irrégularités au cours de
l'enquête, et la défense comptait bien sur une confrontation entre
Colonna et Lebbos :
Georges Lebbos est le signataire d'un procès-verbal de police antidaté,
mis au jour au deuxième procès de l'affaire en 2005 et qui impliquait
dans le dossier Vincent Andriuzzi et Jean Castela, initialement
condamnés à 30 ans de réclusion puis acquittés en appel. Il est aussi
apparu que ce policier a utilisé une commission rogatoire concernant la
recherche d'Yvan Colonna - délégation de pouvoir d'un juge
d'instruction - pour avoir recours à des moyens coercitifs afin de
tenter de retrouver son épouse volage. Selon la thèse de la défense, le
nom d'Yvan Colonna a été "soufflé" par cet enquêteur aux participants
déclarés de l'assassinat du préfet.
Didier Wacogne avait évoqué mardi, en révélant l'absence du témoin, que
Lebbos souffrait d'un état "anxio-dépressif sévère". Or le certificat
médical est daté du 4 février, soit cinq jours avant le début de
l'audience. Le président avait programmé son audition le 14 mars, date
jugée trop tardive par la défense. Pour les avocats, Lebbos ne voulait
tout simplement pas venir à la barre.
Les défenseurs d'Yvan Colonna ont reproché au président Wacogne de ne
leur avoir annoncé qu'au début de cette semaine l'existence de ce
certificat médical, le président affirmant de son côté n'avoir eu
connaissance du certificat que le 10 février.
La défense a jugé le président Didier Wacogne, "indigne de mener les
débats" et lui a demandé "de partir", provoquant une suspension de
l'audience.
Après la suspension, c'est Yvan Colonna lui-même qui a interpellé
Didier Wacogne: "J'ai vécu une semaine d'audience où j'ai cru que
j'étais sur une autre planète (...) Vous n'êtes pas impartial, je vous
le dis et je vous le répète, vous êtes en mission".
Une
enquête du "Monde" :
LE MONDE du 26.02.09
Il était le serviteur fidèle, le fonctionnaire irréprochable, le
collaborateur du préfet assassiné qui aida sa veuve à choisir le
costume du défunt. Mais, depuis le 13 février, Didier Vinolas, ancien
secrétaire général de la préfecture d'Ajaccio, est un réprouvé,
l'auteur de "pseudo-révélations" (dixit une journaliste), un témoin peu
fiable et "traumatisé" par la mort du préfet (selon un haut
fonctionnaire). Un "obscur ancien policier" qui veut "rester au centre
de l'affaire" (un magistrat).
Sa faute : avoir affirmé à la barre, devant la cour d'assises spéciale
de Paris, que des suspects "jamais inquiétés par la justice" étaient
peut-être impliqués dans l'attentat contre la gendarmerie de
Pietrosella, le 4 septembre 1997 - au cours de cet attentat a été
dérobée l'arme qui a servi à assassiner le préfet Claude Erignac, le 6
février 1998 à Ajaccio. Sous-entendu : Yvan Colonna, jugé en appel
depuis le 9 février après une condamnation en première instance, il y a
treize mois, ne devrait pas être seul dans le box des accusés. Onze ans
après les faits, l'enquête sur la mort du préfet reste inachevée.
Bancale, en tout cas.
Vinolas assure avoir vainement tenté de transmettre ses informations à
diverses autorités, dont l'ex-procureur de Paris Yves Bot, dès 2002.
Personne ne l'a pris au sérieux. "Des éléments périphériques de
l'enquête", a tranché Christian Lambert, ancien patron du RAID chargé
de la traque de Colonna, lors de son rappel devant la cour. Un ancien
policier des Renseignements généraux, également convoqué à la barre, a
nié avoir jamais rencontré Vinolas, qui l'avait pourtant présenté comme
l'un de ses informateurs.
A l'audience, ces "révélations" ont eu l'effet d'une bombe. D'autant
que Didier Vinolas assure avoir adressé deux courriers, en décembre
2008 puis en janvier, au président de la cour d'assises, Didier
Wacogne, offrant des éléments sur les deux fameux suspects. Mais le
président n'a pas décacheté les plis. D'où un tollé sur les bancs de la
défense et l'ouverture d'un supplément d'information exprès, bouclé en
soixante-douze heures, dernier avatar en date d'une affaire judiciaire
hors normes.
En première instance déjà, en novembre et décembre 2007, la cour
d'assises "spécialement composée" - seuls y siègent des magistrats
professionnels - avait eu à connaître de ces bizarreries qui encombrent
une procédure mal ficelée : un expert en balistique qui ne viendra
jamais témoigner ; un médecin légiste affirmant que le tireur était
plus grand que Colonna avant de se dédire à demi-mot; un ancien
officier de police de la DNAT (division nationale antiterroriste,
actuelle SDAT) poussé dans ses derniers retranchements, avouant à la
barre avoir soufflé le nom de Colonna pendant une garde à vue... Mais
ces éléments troublants n'avaient pas suffi à faire vaciller l'intime
conviction des sept magistrats : Yvan Colonna, 49 ans, avait été
condamné à une peine de réclusion criminelle à perpétuité - sans
période de sûreté - le 13 décembre 2007.
Pour les parties civiles et l'accusation, rien ne semble pouvoir
remettre en question les aveux du "commando Erignac", les mises en
cause circonstanciées et répétées contre Yvan Colonna et le rôle que la
justice lui a assigné le soir du 6 février 1998 : avoir logé trois
balles dans la tête du préfet Claude Erignac alors que le haut
fonctionnaire se rendait à un concert de musique classique. Mais, pour
la défense, les déclarations de Didier Vinolas, ajoutées à une longue
suite de tâtonnements policiers, constituent une preuve à décharge de
plus, dans un "dossier vide".
Les avocats des deux bords, les magistrats et les policiers chargés de
l'enquête conservent en mémoire la date du 22 février 2006. Ce jour-là,
après sept années de prison, Jean Castela et Vincent Andriuzzi,
présentés comme les commanditaires de l'assassinat du préfet et
condamnés à trente années de réclusion, en juillet 2003, sont acquittés
: leurs avocats sont parvenus à démontrer qu'une partie de l'accusation
reposait sur des procès-verbaux dont les dates ont été trafiquées.
S'ils restent condamnés pour des attentats remontant à 1994, leur mise
en liberté résonne comme le désaveu d'une enquête erratique, minée par
la sourde guerre que se sont livrés dix-huit mois durant policiers,
gendarmes et magistrats antiterroristes.
Quatre jours après le début des investigations, pourtant, le
commissaire Demetrius Dragacci, patron du SRPJ (service régional de
police judiciaire) d'Ajaccio, avait adressé à sa hiérarchie une note
aux conclusions sans appel : "L'assassinat du préfet Erignac est le
fait d'un groupe d'activistes clandestins dissidents de l'ex-FLNC canal
historique." Mais le commissaire sera mis à l'écart au profit de Roger
Marion, chef de la DNAT, alors que ses intuitions seront confirmées un
an et demi plus tard avec l'arrestation des membres du commando, tous
dissidents de la mouvance nationaliste.
Entre-temps seront successivement exploitées la piste agricole, celle
des "tueurs venus de Miami", des patrons de discothèques, des pompiers,
la piste du rachat de l'ancienne caserne Montlaur de Bonifacio, celle
du casino d'Ajaccio et des réseaux corses en Afrique : dès les premiers
jours qui suivent l'assassinat du préfet, l'enquête s'égare dans des
impasses, se nourrit de vieilles rumeurs et d'informations de seconde
main distillées par de troubles informateurs. Pour la seule année 1998,
selon les chiffres du ministère de l'intérieur, 364 personnes ont été
interpellées dans le cadre de l'enquête Erignac ; plus de 1 habitant de
l'île sur 1 000 - l'équivalent de 60 000 interpellations sur le
continent.
Prudents, les magistrats antiterroristes ont paré aux critiques en
usant d'un artifice douteux mais légal : l'ouverture de deux
informations judiciaires concurrentes. La première, inscrite au n°
1338, rassemble les éléments les plus saillants de l'enquête
judiciaire. La seconde, la n° 1337, sobrement baptisée "enquête
poubelle", sert de voiture-balai à l'instruction. Y échouent auditions
tangentes et commissions rogatoires sans espoir dans le cadre de la
"piste agricole". Depuis 1998, plusieurs personnes figurent encore dans
ces centaines de cotes, anciens militants nationalistes ou simples
syndicalistes agricoles, blanchis par l'enquête mais dont certains
attendent toujours une ordonnance de non-lieu.
L'irruption du préfet Bernard Bonnet, nommé en remplacement de Claude
Erignac, achèvera de compliquer le jeu des juges et des enquêteurs.
Arrivé dans l'île trois jours après l'assassinat de son prédécesseur,
le plus haut représentant de l'Etat en Corse veut mener sa propre
enquête, confiée aux gendarmes de sa garde prétorienne, le groupe de
pelotons de sécurité (GPS). Pendant des semaines, les militaires
travaillent sur des "objectifs" dont l'identité a été murmurée au
préfet Bonnet par un mystérieux informateur surnommé "Corte", au point
que gendarmes et policiers, qui ont eu vent de la même piste, finissent
par partager sans le savoir filatures et écoutes...
L'épopée des gendarmes d'élite partira en fumée dans l'incendie d'une
paillote, en avril 1999. Sur ordre "illégal" du préfet Bonnet,
enrageant de ne pouvoir obtenir la destruction d'un établissement sur
le domaine public maritime, les gendarmes incendieront le restaurant
Chez Francis en semant derrière eux indices et blessés. Un mois plus
tard, l'un d'eux confirmera devant l'inspection technique de la
gendarmerie nationale l'existence d'une enquête parallèle menée "hors
de tout cadre légal".
Le 21 mai 1999, en partie grâce aux informations collectées par le
préfet Bonnet, les services de police interpellent finalement les
membres du commando et leurs compagnes. Quarante-huit heures plus tard,
à 2 heures du matin, l'un d'eux, Didier Maranelli, craque et désigne un
berger de 39 ans, Yvan Colonna, comme le tireur. Cette mise en cause
sera confirmée par les aveux des conjurés et de leurs compagnes, mais
Colonna, lui, est introuvable, "parti aux chèvres" après avoir clamé
son innocence au cours d'une conférence de presse filmée par les
caméras de TF1. Envolé. En cavale.
Pendant plus de quatre années, le berger de Cargèse va se jouer des
policiers. On le signale au Venezuela, en Sardaigne, à la tête d'un
réseau de trafiquants de drogue marocain... Toutes les pistes sont
explorées : son arrestation est devenue un véritable enjeu pour Nicolas
Sarkozy, alors ministre de l'intérieur. Jusqu'à l'épilogue du 4 juillet
2003. Peu après 19 heures, alors que la Corse s'apprête à décider de
son avenir institutionnel à l'occasion d'un référendum voulu par
Nicolas Sarkozy, les hommes du RAID interpellent Yvan Colonna dans la
bergerie de Monti Barbatu, près de Propriano (Corse-du-Sud). Presque
aussitôt, M. Sarkozy, en meeting à Carpentras (Vaucluse), annonce
publiquement - et sans précautions - l'arrestation de "l'assassin" du
préfet Erignac.
Cinq ans après ces accusations précipitées, bien des zones d'ombre
demeurent, compte tenu des rebondissements d'un procès déjà suspendu à
deux reprises, où apparaissent de nouveaux noms, où le président de la
cour d'assises ne lit pas le courrier qu'un témoin de premier plan lui
adresse, où un avocat des parties civiles reconnaît benoîtement que
d'autres membres du commando sont peut-être dans la nature...
Pour la troisième fois, depuis le box des parties civiles, la famille
Erignac ne peut opposer à ces errements qu'une souffrance résignée. Il
y a dix ans presque jour pour jour, les proches du préfet étaient
sortis de leur réserve pour fustiger le "remue-ménage entre policiers
et juges" et exhorter les "serviteurs de l'Etat" à unir leurs efforts
pour que se manifeste enfin la vérité. Mais cette vérité s'obstine à
fuir entre les doigts des magistrats de la cour d'assises de Paris.
Antoine Albertini
Article paru dans l'édition du 27.02.09
Au cours de la semaine dernière, la défense a marqué des points :
Le procureur Yves Bot a confirmé point par point la déposition du
commissaire Vinolas :
"En septembre 2002, au cours d’un repas, le commissaire Didier Vinolas
m’a indiqué qu’un Monsieur X souhaitait transmettre de graves
informations concernant Yvan Colonna. A condition qu’elles soient
reçues par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, ou par l’un
des membres de son cabinet. C’était un renseignement de police. Je l’ai
immédiatement communiqué au préfet Guéant, alors directeur de cabinet
de Sarkozy."
Ces déclarations interviennent alors que parquet et parties civiles
avaient tenté de déconsidérer le policier. Didier Vinolas a confirmé
détenir les noms de deux membres présumés du commando nationaliste à
l'origine du plasticage de Pietrosella et peut-être de l’assassinat du
préfet Erignac, qui n'auraient jamais été inquiétés. Ces noms, a-t-il
assuré, avaient été transmis notamment en 2002 à Yves Bot et en 2004 à
Christian Lambert, le chef du Raid.
Par ailleurs, aucun des trois témoins visuels du drame, Jean-Pierre
Versini, Joseph Colombani et Marie-Ange Contart n'ont identifié Yvan
Colonna comme le tireur. Présents sur les lieux de l'assassinat du
préfet, ils décrivent un homme plus grand que le berger de Cargèse.
Tous se souviennent de deux hommes plutôt grands - 1,80 m environ -,
quand le berger de Cargèse ne mesure que 1,72 m.
"Lorsque j'ai vu Yvan Colonna, je n'ai pas vu l'homme dont j'ai gardé
le souvenir en train d'assassiner le préfet érignac." C'est ce qu'a
affirmé à la barre mercredi 25 février Joseph Colombani, organisateur
de la soirée musicale où se rendait le préfet de Corse et ami de ce
dernier. Comme à l'instruction et au premier procès, Joseph Colombani a
réaffirmé que, d'après son souvenir, le meurtrier ne lui semblait pas
être Yvan Colonna, condamné à perpétuité en première instance en 2007.
Questionné par la défense, il précise qu'il n'a jamais été invité par
les enquêteurs à identifier les membres du commando définitivement
condamnés. Il précise aussi : «Je parle en conscience. Je suis un homme
libre, honnête, je dis ce dont je me souviens.»
Mlle Contart lui succède. Elle relate comment, passagère du véhicule
conduit par sa mère, elle entend des détonations. Arrivant au niveau de
la scène de crime, qui lui est dissimulée par d'autres voitures en
stationnement, elle voit un individu «tirer par terre» et manipuler son
arme : «Il est plus grand que moi - je mesure 1,75 m -, blond, avec des
yeux rapprochés et une barbe naissante.» Surtout, elle croise, pendant
quelques secondes, son regard : «J'ai posé mes yeux sur ses yeux, ça
m'a fait bizarre.» Ces yeux-là, elle ne les a jamais retrouvés dans le
box des assises.
Umbria è sulia
"Parolla
sbucinata" à Lupino
Coup de théâtre au
procès d'Yvan Colonna
Un coup de théâtre s'est produit vendredi soir au procès en appel
d'Yvan Colonna. Didier Vinolas, commissaire de police, ancien
secrétaire général de Claude Erignac à la préfecture d'Ajaccio, a
affirmé que deux hommes soupçonnés d'avoir participé à l'assassinat du
préfet, en 1998 à Ajaccio, étaient « peut-être » en liberté.
Vendredi, devant la cour d'assises spéciale, Didier Vinolas a affirmé
tenir « deux noms », qu'il a refusé de révéler, d'un mystérieux
informateur depuis septembre 2002, et les avoir transmis quelques jours
plus tard au procureur.
L'informateur, qu'il a baptisé « X », « une personne tout à fait
respectable », a ajouté Didier Vinolas, lui a présenté les deux hommes
« comme faisant partie de la sphère » à l'origine de l'attaque de la
gendarmerie de Pietrosella en septembre 1997, une des premières actions
du groupe nationaliste dit des « anonymes ». L'ancien collaborateur de
Claude Erignac a ajouté que l'ex sous-préfet de Corse Jacques Nodin
détenait depuis 2001 des informations nouvelles sur Pietrosella. « Il
souhaiterait être entendu », a-t-il précisé. Didier Vinolas a dit aussi
avoir transmis les noms de deux suspects en février 2004 à Christian
Lambert, ancien chef du RAID à l'origine de l'arrestation d'Yvan
Colonna et plus récemment à Charles-Antoine Erignac, le fils du préfet.
Les avocats de la défense sont d'autant plus indignés que Didier
Vinolas affirme avoir transmis cette information au procureur de la
République de Paris, Yves Bot, dès 2002, et au président de la cour
d'assises Didier Wacogne, ainsi qu'au procureur général Laurent Le
Mesle par lettre fin décembre 2008. Ni l'un ni l'autre ne semblent
avoir informé la défense ou la partie civile ! Visiblement embarrassé,
Laurent Le Mesle a tenté de se justifier en faisant valoir que "la
procédure devant la cour d'assises est orale" et que "le seul devoir du
parquet général, était de convoquer M. Vinolas pour qu'il puisse faire
à la barre, les déclarations qu'il souhaitait". "C'est ce qui a été
fait", conclut-il. Pour les parties civiles, le président n'avait pas
le droit de faire état de ce témoignage avant que M. Vinolas ne soit
venu déposer.
Dénonçant un "scandale d'Etat", les avocats d'Yvan Colonna ont annoncé
le dépôt lundi d'une plainte contre X pour "entrave à la manifestation
de la vérité". "Ce qui est grave, c'est que des policiers, des
magistrats, ont mis sous le coude des éléments à décharge pour Yvan
Colonna", a tonné l'un d'entre eux, Me Antoine Sollacaro. Un autre
avocat, Me Pascal Garbarini, a estimé que ce nouvel élément devait
"entraîner la remise en liberté d'Yvan Colonna".
Les avocats comptent également déposer une demande de supplément
d'information, susceptible de faire capoter le procès après seulement
une semaine. "Nous attendons d'ici lundi des justifications sur ce qui
s'est passé, sinon comment voudriez-vous que l'on continue de
participer à cette mascarade avec des magistrats faussaires?", a fait
valoir Me Sollacaro.
"On a décrété dès 1999, comme une vérité d'Etat officielle qu'Yvan
Colonna était nécessairement coupable et tous les éléments de nature à
prouver son innocence ont été systématiquement écartés ou détruits", a
dénoncé Me Gilles Simeoni lors d'une conférence de presse samedi
affirmant que Didier Vinolas, bras droit de M. Erignac en tant que
secrétaire général de la préfecture de Corse et commissaire
divisionnaire en détachement, était un "témoin particulièrement
crédible".
Sur la base des aveux passés en garde à vue en mai 1999, l'accusation a
en effet toujours retenu le scénario selon lequel le préfet avait été
victime d'un commando composé de six hommes: Yvan Colonna, que ses
complices présumés ont identifié comme le tireur, Pierre Alessandri et
Alain Ferrandi présents sur les lieux pour le couvrir, Martin Ottaviani
au volant de la voiture, Didier Maranelli en guetteur devant la
préfecture et Marcel Istria resté dans le hangar servant de base
arrière.
A ces six hommes se serait ajouté Joseph Versini pour l'attaque de la
gendarmerie de Pietrosella en septembre 1997 au cours de laquelle
l'arme ayant servi à tuer le préfet a été dérobée. C'est d'ailleurs de
deux personnes "faisant partie de la sphère" de Pietrosella, que M.
Vinolas a parlé vendredi soir indiquant détenir leurs noms d'un
informateur fiable qu'il a appelé X. C'est en partant de ce constat,
sachant que les deux actions ont été revendiquées par le même groupe,
que Didier Vinolas s'est dit "qu'il y a peut-être d'autres personnes
ayant participé à l'assassinat" qui n'ont jamais été arrêtées.
Le procès en appel d'Yvan Colonna
Je reproduis ici le texte signé de Sampiero sur Agora Vox.fr :
A l’heure où j’écris ces lignes, la Corse est sous la neige qui tombe à
gros flocons. Un temps qui favorise la mélancolie, le repli sur soi.
Bien au chaud sous la couette, monsieur tout le monde a des soucis en
ce début d ’année. La crise, le chômage, les prix qui continuent de
grimper, le froid qui ne fait pas oublier qu’il faut acheter du fuel ou
de gaz, toujours très cher ici. Pendant ce temps, un homme
est loin de chez lui depuis cinq ans et demi, à quoi s’ajoutent quatre
ans de cavale, terrible épreuve physique et morale. Du fond de sa
prison, et sur le banc des accusés, il clame son innocence. Pendant ce
temps , une famille éprouvée pleure une vie dérobée, et subit une
quatrième et pénible épreuve, à la recherche de la vérité.
Le drame qui se déroule paraît dérisoire, dans cette tourmente
existentielle où la gravité et la cadence des événements mondiaux
absorbent l’attention des gens. Et pourtant, ce qui se joue met en
cause non seulement l’avenir d’un homme, mais surtout deux principes
majeurs de notre société : l’indépendance de la justice et la
présomption d’innocence. Un homme de bien un préfet (que j’avais
approché et apprécié professionnellement) a perdu la vie uniquement du
fait de ses fonctions. le cas n’est pas unique. On a tué en France des
président, des ministres aussi parait-il.
Chaque fois, pour quel bénéfice ?
Le procès en appel a débuté et Yvan Colonna se trouve à nouveau face à
neuf magistrats de la cour d’appel spéciale, spécialement désignés (par
qui ?) présidée par Mr Didier Wacogne. Pourquoi une cour spéciale ? La
France n’aurait-elle pas confiance dans sa « justice ordinaire » ? Un
article sur ce sujet pourrait se résumer à une simple interrogation :
Yvan Colonna est-il l’assassin du Préfet Erignac ? Qui peut prétendre,
avec absolue certitude, avoir la réponse ? Malgré la certitude exprimée
par l’ex-ministre de l’intérieur devenu président de la République, des
avocats de la partie civile, notamment Maître Philippe Lemaire, ainsi
que celle de Madame Erignac, qui demande aujourd’hui que le prévenu
avoue « son crime », nombre de spécialistes, et une majeure partie de
l’opinion, avaient déjà exprimé de sérieux doutes quant à la
culpabilité de cet homme.
Puis reste l’homme de la rue :
Les « contre » avancent l’argument suprême :
- Il a fui !
Dans le contexte de l’époque, et compte tenu de ses idées politiques,
peut-être aussi des raisons qu’il est seul à connaître, l’homme a
peut-être pensé que même innocent, il avait de fortes chance de passer
de nombreuses années en prison. En tous cas une fuite ne peut être
considérée comme un aveu de culpabilité, suffisante pour justifier une
condamnation à perpétuité, le spectre de l’erreur judiciaire doit
obligatoirement se présenter à l’esprit.
- Ses « complices » ne l’ont pas dédouané par une prise de position
franche !
Là encore, le doute reste permis, et condamner sur ces seules deux
bases est périlleux.
- Son père s’est excusé auprès de la veuve :
Son père est un ex-député, homme de bien et d’honneur. Il n’a pas
encore communiqué avec son fils, la presse, la rumeur, le ministre lui
même dit que c’est l’assassin, il doit donc en être ainsi, voyons ! Il
le croit, et en homme d’honneur, il demande pardon à la veuve. C’est
une preuve ? Irréfutable ?
Les « pour » ont quantité d’arguments à avancer :
- La désignation officielle du coupable,ce qui met à mal la
présomption d’innocence.
Si cela était venu de l’homme de la rue, encore, mais d’un avocat de
métier, ministre de l’intérieur de surcroit, difficile d’invoquer le «
lapsus ».... - Une enquête sans reconstitution, ou des témoins
oculaires n’auraient pas été entendus ? ou écoutés suffisament ?
- Des « complices » qui ont pu subir des pressions,
- Des policiers et des juges qui , aux dires d’un avocat de la défense,
ont accumulé des dysfonctionnements, que Colonna était désigné coupable
avant même qu’il soit mis en cause pendant les gardes à vue... la liste
peut être longue.
Alors coupable ou pas ? Personnellement je ne saurais le dire dans
l’état actuel de ce je connais de cette affaire. En toute objectivité,
je souhaite que le coupable paie sa faute. le coupable ! et
personne d’autre. Quel qu’il soit, car si on a le moindre doute , alors
qu’un homme innocent fini sa vie sous les verrous, pendant que l’
assassin court les rue en se tordant de rire, cela ne peut pas être
pour la société un motif de satisfaction, et pour la famille du préfet
assassiné et sa veuve, un véritable motif d’apaisement.
Quand à « l’intime et absolue conviction « des avocats, n’oublions pas
que quand leur client a perdu son proçès, leurs certitudes étaient
érronées, et quand leur client a gagné, elles étaient fondées !
Pourtant ils étaient en possession exactement des mêmes éléments que
les juges qui ont tranché !
Pourvu donc que ce procès fasse enfin la lumière, mais gardons présent
à l’esprit, comme l’a souligné un des avocats, que se serait une faute
d’attendre de la défense qu’elle fasse la preuve de l’innocence de
l’accusé, alors que c’est l’accusation qui doit faire la preuve de sa
culpabilité.
Quelle que que soit l’issue, l’opinion et les parties en cause ne
pourront donc se déclarer satisfaites que si cette condition est
réunie. Si elle ne l’est pas, on peut se poser la question : Yvan
Colonna peut-il aujourd’hui, s’il s’avère être innocent, être acquitté
? Si oui, qui va payer les conséquences d’une vie volée : les
enquêteurs, les juges, les accusateurs, ou le contribuable ? et de
quelle façon ? De toute façon, outre la terrible occurrence qu’un homme
de bien a été définitivement privé de sa vie, celle de l’accusé, encore
présumé coupable, condamné ou pas, peut être d’ores et déjà considérée
comme étant irrémédiablement gâchée.
A lire également le rapport de la mission d'observation au 1er procès
mandatée par la Ligue Suisse des Droits de l'Homme.
Et aussi l'excellente bande dessinée relatant le procès.
Soutien à Abdellatif
Hedhli
Diverses associations, dont U Svegliu Calvese, le réseau Education sans
frontières et d'autres, se mobilisent contre la menace d’expulsion
d’Abdellatif Hedhli, boulanger de profession. Habitant Calvi depuis
1999, Monsieur Hedhli a toujours travaillé et s’est parfaitement
intégré à la vie calvaise.
Son dossier de régularisation est en cours d’instruction.
Malgré cela il devait être expulsé du territoire français demain jeudi
5 février 2009 à 8 heures.
04/02/2009 : Devant cette forte mobilisation, la mesure a été reportée.
Chjami è rispondi à
Pigna